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Discussion : Relations amoureuses et comparaisons

artichaut
le dimanche 30 mars 2025 à 21h08
crest
Ce qui rend complexe ce dont on parle quand il s’agit de relation amoureuse et du sentiment d’être comparé c'est que :
- c’est une institution qui dans son essence même donne une place à l’individu en relation avec un autre (je te choisis toi)
- pour un individu donné il n’existe qu’une seule place de ce type-là (c’est ce que l’on nomme l’exclusivité, la monogamie)
- cette « place » ce sont des règles que l’on s’attend à voir respecter, qu’il s’agisse des protagoniste de la relation ou des autres
- il n’est possible de bricoler/changer ces règles qu’au prix effort, d’inconfort, d’ambiguïté car il n’est possible de changer une institution à soit tout seul ou à quelques individu (car ces règles ont une portée générales, elles valent à l’échelle de toute société)
- Parler de polyamour au sens d’avoir plusieurs relations amoureuse c’est réactiver cette institution donc ces règles donc l’attente de les voir être respectées.
- le but affiché du polyamour est que plusieurs relations amoureuses existent sans être en concurrence. Mais il faut alors construire des manières de différencier les places de chacun. Les hiérarchiser explicitement est une manière de faire (couple socle etc). Les autres manières vont plutôt être dans le fait d’éviter de faire le même genre d’activité ou de cloisonner sévèrement les espaces et les temps de chaque relation.
- l’insécurité naît quand il n’aura pas été possible de différencier les places (souvent par inconscience et manque de vigilance à mon avis, ou bien par fatigue des efforts à faire puisqu’on n’a pas toute faite la façon de faire). C’est manifestement le cas quand la relation n’arrive pas à quitter un script romantique qui d’abord naît d’un élan très intime mais qui ensuite suit des étapes codées socialement (des règles). C’est aussi le cas quand la hiérarchisation et le cloisonnement de l’espace et du temps atteignent leur limites propres (refuser d’être une relation secondaire, croiser l’autre partenaire dans les mêmes scènes sociales, recevoir des confidences sur les autres partenaires etc).
Je relis plusieurs fois cette liste, car je la trouve décidément très pertinente.
Déjà, j'aime beaucoup cette phrase qu'il me semble n'avoir lu nulle part : le but affiché du polyamour est que plusieurs relations amoureuses existent sans être en concurrence.
(Bien sûr certain·e·s chipotterons en disant que le polyamour, ou la polyamorie, n'implique pas forcément une/des relations amoureuses… mais dans la pratique, soyons sincères, c'est ça la principale promesse du poly-amour, autant que son sens littéral.)
Je tente de reformuler pour en mettre en exergue certaines idées :
L'amour monogame est une institution (qu'on ne peut changer à soi seul).
Elle est fondée sur la notion de place, la place de chacun dans une relation duale.
Le polyamour est un aménagement de l'amour monogame.
Cet aménagement créé des insécurités (car il ne supprime ni l'institution, ni ses règles).
Discussion : Recevoir d'autres poly-voyageurs

artichaut
le dimanche 30 mars 2025 à 20h27
Il y a depuis 2018 un groupe facebook dédié : PolyEnVadrouille.
Vivement le groupe Mastodon.
Discussion : Habitat et non-monogamies

artichaut
le dimanche 30 mars 2025 à 19h36
Je me suis demandé ici, si le notre manière d'habiter avait à voir avec notre style d'attachement.
Discussion : [Outil] Théorie de l'attachement chez l'adulte
Discussion : [Outil] Théorie de l'attachement chez l'adulte

artichaut
le dimanche 30 mars 2025 à 19h30
Tiré du zine de Viva écrit en français, inspiré du livre Polysecure de Jessica Fern on trouve les termes suivants :
- sécurié
- anxieux
- évitant
- ambivalent
extrait
Nos stratégies d’attachement se développent principalement durant les premières années de notre vie en réaction à notre environnement. Elles ont pour fonction, durant l’enfance, de maximiser notre bien-être en fonction de la disponibilité de nos figures d’attachement.Typiquement, lorsque les figures d’attachement sont présentes et bienveillantes, l’enfant tend à développer un style d’attachement plus sécurisé. Iel apprend que ressentir et communiquer ses besoins est une stratégie efficace pour obtenir l’attention désirée. L’enfant ressent un inconfort ou une insatisfaction, son système d’attachement est activé : l’enfant pleure, on vient s’occuper de lui.
Dans certains cas, les figures d’attachement sont distantes, mais finissent généralement par prodiguer des soins lorsque les demandes d’attention persistent ou s’intensifient. Ce type de stratégie est associé à un type d’attachement anxieux. Le système d’attachement de l’enfant apprend qu’il doit être hyperactivé pour recevoir l’attention dont il a besoin : l’enfant pleure, on ne vient pas à lui, il pleure de plus belle, on finit par venir s’occuper de lui.
Un style parental contrôlant, protecteur, ou usant plus que nécessaire de la culpabilité, n’encourage pas le développement de l’estime et de l’autonomie de l’enfant. En grandissant, celui-ci pourra développer une soif de validation et d’approbation ainsi qu’une peur de déplaire.Lorsque les figures d’attachement sont absentes ou négligentes, que les sollicitations sont réprimandées ou laissées-pour-compte, le système d’attachement apprend à être sous-activé. Ce genre de stratégie est liée à un type d’attachement évitant. Pour s’épargner la douleur du rejet et de la négligence, il doit refouler ses désirs : l’enfant pleure, on ne vient pas s’occuper de lui, iel ravale ses pleurs.
Enfin, lorsque la figure d’attachement est présente, mais alternativement perçue comme protectrice et menaçante, le système nerveux de l’enfant tend à être désorienté et à développer un attachement ambivalent : un pied sur l’accélérateur, l’autre sur la pédale de frein.
Discussion : Monogamie et essentialisme

artichaut
le dimanche 30 mars 2025 à 19h23
Alastor
Je me demande même si on ne s'accroche pas encore plus à certaines de ces normes quand on les remets en questions, un peu pour se rassurer ?
Par ex : être polyamoureux mais franchir certaines étapes qu'on trouve essentielles de l'escalator relationnel
Je ne sais pas si c'est plus (qu'on s'y accroche). Peut-être juste ça se voit plus dans un contexte moins normé. Car on s'attendrais à ce que certains script ne soient pas là.
Genre un truc binaire : t'es normé·e ou déconstruit·e. En réalité il y a mille manière de se situer là-dedans. Et chacun·e rejette certains scripts, et en conserve d'autres.
De même qu'il y a un attendu en milieu normé à ce que ces scripts soient respectés, de même il y a peut-être un attendu en milieu moins normé à ce que tous les scripts (ceux que l'on a soi-même identifiés) soient remis en cause.
Comme une espèce de pureté militante.
Et j'ai tendance à penser que cet attendu, est un script en lui-même : avoir des pseudos évidences communes non dites !
La déconstruction est un chemin exigeant, car il faut tout rendre explicite. Et c'est clairement chouette, mais aussi fatiguant.
Discussion : Monogamie et essentialisme

artichaut
le dimanche 30 mars 2025 à 19h12
Alastor
C'est un peu comme ça que je le vois oui, mais ce ne concerne pas que la monogamie
Oui bien sûr, c'est juste que sur ce forum (et sur ce fil en particulier) la Monogamie est en sujet.
Alastor
Moi je suis autiste et j'avoue que les normes sociétales je ne les comprends pas toujours ce qui fait que j'ai souvent ete mise sur "le banc de touche" on va dire.
En vrai, je me demande s'ils y en a qui les comprennent vraiment, ces normes, ces codes sociaux ?
Peut-être certain·e·s sont plus doués que d'autres pour les intégrer, les absorber. Les personnes plus tournées vers l'extérieur. Pour qui les interactions sociales sont aisées.
Les autistes, les introvertis, les solitaires galèrent plus c'est certains. Les traumatisés du contact social aussi.
C'est un mal pour un bien, car ça permet de déconstruire, ou explorer d'autres possibles, un peu plus facilement sans doute.
Alastor
Imaginez si on vous explique pendant des années : les filles c'est en rose et les garçons en bleu, vous ne comprenez pas pourquoi, mais pendant des années on vous le répète c'est comme ça que la société fonctionne et pas autrement, vous finissez par intégrer cette norme comme étant ce qu'il faut faire et un beau jour vous croissez quelqu'un en violet.... bah ça fait un drôle d'effet dans le cerveau 😅...
C'est le sentiment que j'ai la sensation de provoquer parfois chez les autres, en parlant de ma vie, ou même juste en étant qui je suis.
Le sentiment de les confronter véritablement, comme si je remettais en question tout leur parcours de vie.
Et ça doit être violent (violet) à ressentir, vu les réactions de rejet très fort qu'ils ont parfois.
Je ne leur demande pourtant pas de changer. Mais c'est comme si voir du violet était insupportable à leur yeux. Juste ça ne se fait pas.
Discussion : J'ai juste besoin de partager ce moment compliqué

artichaut
le dimanche 30 mars 2025 à 17h19
Alastor
Pourquoi la monogamie de B. est un problème parce que chaque "étape de l'escalator relationnel" est comme une acquisition qui ne pourra plus être remise en cause.
Oui c'est le problème de la norme dominante, qui s'impose sans même s'en rendre compte. Qui considère pour acquis tout ce qui est mis en place une fois. Etc.
Pour un peu, si W devenait A, alors tu deviendrais… une C.
Salut : je suis une C.
- Je ne peux pas définir la relation.
- Je n’ai pas de voix.
- Je n’ai pas d’opinions, ni de souhaits, ni de besoins ou de volonté.
- Ma relation n’est pas reconnue.
- Je ne peux pas participer aux processus de prise de décision sur les aspects qui me concernent.
- Je suis invisibilisée.Natàlia Wuwei, traduction Elisende Coladan.
Discussion : Monogamie et essentialisme

artichaut
le dimanche 30 mars 2025 à 17h08
Alastor
Je crois que c'est la société dans laquelle on baigne qui façonne notre être social.
Je suis comme tout le monde ici j'ai grandi dans un monde fait pour les hommes cis-hetero blanc patriarcal et monogame. (…)
Et il est vraiment plus facile pour tous de rentrer dans la normes que de les remettre en question.
C'est comme si nous avions un genre "d'essence sociale" (qui s'acquière après la naissance et qui nous est transmis par nos référents parentaux, par la culture audio et visuelle, et par toute la société), une sorte de culture commune partiellement inconsciente.
Une culture commune pourtant acquise, mais de façon tellement lointaine qu'on en a oublié le commencement.
Comme si le système monogame, et pas que lui, circulait en nous tel un ensemble de mécanismes réflexes et rassurants, générant des comportements et des émotions spécifiques.
Discussion : Retour vers la solitude

artichaut
le dimanche 30 mars 2025 à 16h53
Je me suis demandé si ce besoin — différent selon les personnes — que l'on peut avoir (ou pas) de partager de la quotidienneté, donc de se lancer dans des projets d'habitats partagés (de la coloc au couple, en passant par toutes sortes d'habitats collectifs), de rechercher de la compagnie (animal, enfant…) n'était pas lié à comment on a vécu des moments de bonheur enfant, et donc à retrouver une part d'enfance révolue.
Je constate ça déjà sur le son ou le silence. Je connaît des persones qui ne peuvent vivre qu'avec un bruit de fond permamanent (télé, radio, etc.) d'autres pour qui le silence s'impose.
Je pense que c'est fondamentalement lié à ce qui était notre univers rassurant dans notre toute petite enfance.
Et du coup, ça me fait élargir cette question de la solitude vs la quotidienneté partagée (la présence des autres autour de soi), à la question de l'habitat d'une part, et à la question des styles d'attachement d'autre part.
Est-ce qu'on habite comme on vit l'attachement ? Est-ce que nos besoins de solitude/quotidienneté racontent notre style d'attachement ? Etc.
Si je suis plutôt évitant·e, j'habite seul·e. Si j'habite seul·e, je suis plutôt évitant·e.
Si je suis plutôt anxieux, je cherche la compagnie en lien avec mon habitat.
Si je suis ambivalent (ou désorganisé, ou « préoccupé/fuyant») j'ai du mal à trouver un équilibre en matière d'habitat.
etc.
Discussion : Habitat et non-monogamies

artichaut
le dimanche 30 mars 2025 à 16h29
artichaut
Que serait un « habitat non monogame » (c’est à dire une manière d’habiter qui remet en cause — au moins en partie — les fondements systémique de la monogamie) ?
Une nouvelle idée vient de m'apparaître.
Et si on partagait une maison, non pas dans l'espace, mais dans le temps ?
Considérant que je suis quelqu'un qui a besoin de beaucoup de solitude, et plutôt ne veut pas vivre en collectif, en tout cas pas à temps plein.
Je me suis dis :
- et si j'habitais 6 mois dans cette maison que j'habite actuellement, et 6 mois ailleurs (ou 3 mois, 3 mois, etc) et que quelqu'un d'autre venait habiter ici ?
- et si ma maison devenait aussi la maison de quelqu'un d'autre, mais à tour de rôle ?!
- et si on partageais une maison, mais sans s'imposer une co-habitation ?
Un peu comme les échanges de maison, le temps de courts séjours (vacances…) mais pensé à l'année.
Ça peut aider à régulièrement tenir sa maison rangée, et surtout à la penser fonctionnelle (pour d'autres).
Ça permet (même en location) de contrer le futile sentiment de propriété.
Ça prépare à la mort et donc à la destination de toute chose que d'être réutilisée par d'autres, mais sans attendre que la mort ou un déménagement advienne pour ça.
Ça invente d'autres façon d'être, de vivre, de partager, d'habiter, y compris pour les personnes ayant beaucoup besoin de solitude.
Ça optimise les logements, car de fait, on ne vit pas h24 chez soi.
Évidemment j'ai conscience que c'est impliquant, que tout le monde ne peut pas faire ça, que ça demande une mobilité (d'esprit et de vie), etc.
Mais exactement comme la non-monogamie, en somme.
On est tellement tellement tellement toujours dans des schémas de pensée normée. On manque tellement d'imagination…
Discussion : Habitat et non-monogamies

artichaut
le dimanche 30 mars 2025 à 16h17
Anecdote :
À une personne qui hier me parlait d'un projet d'habitat partagé, qui me disait devoir se projeter pour dans 10 ans, et hésitait un peu de ce fait à s'engager, j'ai sans réfléchir répondu :
- et tu ne peux pas être poly-habitat ? (sous entendu participer à ce projet de loin, et être en même temps dans d'autre projets)
Ça m'a fait repenser à ce fil de discussion.
Discussion : Relations amoureuses et comparaisons

artichaut
le dimanche 30 mars 2025 à 15h16
crest
on n'a pas le choix de se comparer ou pas, c'est induit dans la façon dont est codée la relation amoureuse
Je dirais même que la relation amoureuse en soi, par son caratère hiérachisant de fait induit la comparaison.
Dire qu'une relation est amoureuse, c'est lui donner un statut, non pas seulement différent, mais généralement supérieur à une autre forme relationnelle.
Donc dès qu'il y en a plusieurs elles tendent à se comparer entre elles.
La hiérarchie fabrique la comparaison (ou la comparaison fabrique la hiérarchie).
Discussion : Relations amoureuses et comparaisons

artichaut
le dimanche 30 mars 2025 à 15h15
Alinea7
C'est amusant je comprenais la métaphore à l'envers : tant qu'il y aura des podiums et des trophées, il y aura une mise en compétition.
Je pense que les deux sont vrais. Et s'encouragent mutuellement.
Discussion : Monogamie et essentialisme

artichaut
le dimanche 30 mars 2025 à 14h46
Si je prend comme exemple le cas du genre.
L'essentialisme c'est considérer que parce qu'on est homme ou femme on aurait telle ou telle façon d'être (on serait plus fort, plus intelligent, plus beau, plus intellectuel, plus ceci ou moins celà…) et que si c'est le cas c'est parce que c'est par nature et non par construction sociale. On ne peut donc pas le changer, et il nous faut l'accepter.
La sociologie en revanche étudie les spécificités (et pourquoi pas les privilèges) associés à telle ou telle catégorie sociale. Et avec la sociologie (qui s'appuit beaucoup sur la statistique) on peut par exemple constater que les mec cis ont tendance à plus couper la parole ou plus commettre d'agressions sexuelles.
Affirmer que parce qu'on est un mec cis on à très probablement déjà commis des agressions sexuelles — même sans l'avoir conscientisé — n'est pas de l'essentialisation, c'est de la statistique.
En revanche dire d'une personne qu'elle est un agresseur ou une victime, c'est potentiellement réduire la personne à sa catégorie sociale ou à certains de ses actes (qui peuvent être caractéristique de ladite catégorie). Et a minima c'est un abus de langage (qu'il soit utile ou non).
Dire que tous les mec cis sont des agresseurs, serait une généralisation, et une réduction de la personne à un trait caractéristique d'une de ses catégorie sociale.
Pourtant je pense sincèrement que la quasi totalité des mecs cis ont commis des agressions (et pour la plupart, sans en avoir encore pris conscience). Suis-je essentialiste pour autant ?
J'ai envie de penser que non, même si bien sûr, je peux me tromper (je n'ai pas de preuve de ce que j'avance), et je peux parfois sur-généraliser.
Discussion : Monogamie et essentialisme

artichaut
le dimanche 30 mars 2025 à 13h43
Déjà, je me rends compte qu'il y a une nuance à faire entre Mono en tant qu'identité et mono en tant qu'adjectif.
"Tout le monde est mono" (pour moi), mais certain·e·s plus que d'autres. On est plus ou moins imbibé·e de la norme, plus ou moins sujet à la monogamie réflexe.
On ne devrait donc pas qualifier quelqu'un de Mono, encore moins à sa place, mais parler de sa construction mono (plus ou moins consciente, plus ou moins assumée, plus ou moins normative).
Et je devrais donc dire : Tout le monde a une construction mono. Tout le monde a des réflexes mono. Au lieu de "Tout le monde est Mono".
(Sachant que ce "Tout le monde" est déjà une généralisation à celles et ceux qui vivent dans ce monde où le système monogame s'impose.)
Discussion : J'ai juste besoin de partager ce moment compliqué

artichaut
le dimanche 30 mars 2025 à 13h27
crest
Concernant le récit fait ici je m'étonne qu'on s'en tienne au fait que quelqu'un "soit" "mono" comme l'explication ultime (…) hypothèse essentialisante (des gens seraient "mono" et d'autres pas)
Avant d'éventuellement répondre contextuellement ici, j'ai déjà envie de creuser le sujet sur un plan théorique, alors je le fait sur un nouveau fil, pour ne pas surcharger celui-ci.
Discussion : Monogamie et essentialisme

artichaut
le dimanche 30 mars 2025 à 13h27
Je reprend ici une réflexion en forme de question posée par @crest sur un autre fil.
crest
je m'étonne qu'on s'en tienne au fait que quelqu'un "soit" "mono" comme l'explication ultime (…) hypothèse essentialisante (des gens "seraient" "mono" et d'autres pas)
Je m'interroge sur l'emploi du mot essentialisant ici.
La monogamie est-elle investie comme une essense (comme peuvent l'être par exemple les mots femme, homme… dans l'essentialisme de genre) ?
Je fais partie des gens qui pensais ou a pu dire que tout le monde est poly à la base (au même titre que tout le monde est bi, etc.) et donc notre "essence" serait plutôt pas mono selon moi.
Aujourd'hui d'ailleurs je dirais plutôt : personne n'est mono à la naissance. Tant il est vrai qu'on le devient par défaut… on est socialement construit par cette norme… avant d'éventuellement déconstruire ce shéma.
Du coup la notion d'essence me semble possiblement incorrecte ici. Ou alors comme une sorte d'essence du capitalisme en nous.
Mais je comprends ce que tu veux dire sous forme de catégorisation : est-ce qu'on n'identifie pas la personne à sa catégorie pour simplifier le discours et la pensée (au lieu de regarder ses actes et ses comportements) ?
Et en même temps, sauf à vivre en dehors de ce monde, j'ai tendance à penser que tout le monde est mono (y compris d'ailleurs celles et ceux qui prétendent ne pas ou ne plus l'être, car on vit dans ce bain-là).
Mais il s'agit là d'une donnée historico-sociologique et non d'une pensée essentialisante. Et j'ai bien peur que parler d'essentialisme à propos de catégories sociologiques, puisse être une inversion systémique d'oppression (comme parler de racisme blanc, ou de sexisme anti-hommes).
En tout cas, j'y voit un fort risque de glissement de pensée. Même si j'entends aussi la limite de la pensée sociologique, qui peut devenir totalisante si l'on perd de vue d'autres grilles de lectures possibles et surtout si l'on indentifie la personne à l'une de ses catégories sociales.
Pourquoi j'y vois un risque de glissement de pensée ?
C'est la pensée normée monogame qui me semble essentialisante en prétendant que la monogamie va de soi, que tout le monde est ou devrait être monogame, que si non est poly c'est "qu'on a pas trouvé le bon", etc.
C'est ôter la complexité sociale de la chose. Le fait qu'on a été construit monogame et qu'on peut le déconstruire. Que la monogamie est une norme parmi d'autres (dans l'espace géographique et le temps historique).
Avec la mainstrimisation du polyamour, je rencontre aussi des personnes qui débutent leur vie affective, sentimentale, amoureuse et sexuelle avec la non exclusivité, y compris parfois de manière très assumée (et non pas seulement comme une errance initiale, ou un non-choix imposé). J'ai appris à mes dépends que même ces personnes sont en réalité imbibés de réflexes monogames, et peuvent 'retourner leur veste poly' du jour au lendemain.
Du coup j'ai vraiment tendance à penser que la Monogamie, en tant que norme dominante, est essentialisante de fait. Et que traiter quelqu'un·e de mono ne l'est pas ('tout le monde est mono').
Après, que l'on simplifie à l'extrême, et que l'on puisse avoir tendance à confondre la personne avec l'une de ses catégories sociales, me semble autre chose.
Et considérer que parce que telle personne "est mono" elle va obligatoirement se comporter de telle manière, c'est oublier la complexité inhérente à chaque individu.
(Je poste déjà ça, même si je n'ai pas fini mon raisonnement, et que je sens que certaines choses ne vont pas ou qu'il manque certaines nuances importantes. Bienvenue à la contradiction.)
——
Voir aussi :
- Monogamie(s) — définition(s) —
- Les outils pour relations non-normées.
Discussion : J'ai juste besoin de partager ce moment compliqué

artichaut
le dimanche 30 mars 2025 à 11h51
crest
J'ai finalement déplacé mon message ici :
/discussion/-cZx-/Relations-amoureuses-et-comparai...
Comme convenu, j'y ai recopié mes messages…
Discussion : Relations amoureuses et comparaisons

artichaut
le dimanche 30 mars 2025 à 11h50
Que peut-on faire face à ça : la monogamie qui revient nous frapper par la porte de derrière, alors même que nous avions le sentiment de créer à plusieurs autre chose ?
Je pense que les réponses sont à la fois individuelles et collectives.
individuelles
Chacun·e est responsable de soi, de s'engager ou pas, de s'impliquer ou pas, d'accueillir ses émotions, d'assumer ses choix et les conséquences de ses choix. etc.
Choisir d'être non-monogame — quand c'est un choix — n'est pas la solution de facilité.
Aimer, c'est pour moi vouloir le bonheur de l'autre. Y compris si le bonheur de l'autre veut dire qu'il/elle cesse de relationner avec nous. Et donc ça peut aussi être accepter que l'autre (que l'on aime) se fasse pervertir par un·e mono. Avec les conséquences que ça va avoir pour nous.
Et c'est là qu'on va avoir besoin de beaucoup d'amour de soi, pour non seulement accepter ça, mais le désirer.
Comme avec nos enfants, l'amour c'est accepter de laisser partir l'autre, c'est désirer ardemment le bonheur de l'autre, tout en le laissant maître à bord du chemin de son bonheur.
collectives
D'une part on n'est pas toujours non-monogame par choix. Et l'être quand ce n'est pas un choix est encore plus difficile.
D'autre part, quelque soient nos choix, nos privilèges, nos compétences, nos traumas, etc… toujours, quand on dévie de la norme (ici la monogamie), celle-ci viendra nous mettre des bâtons dans les roues.
Sans aller jusqu'à considérer la Monogamie comme une secte, et ses missionnaires comme de dangereux manipulateurs, de fait la monogamie et ses adeptes nous font du mal.
Et face à quelque chose de systémique, les réponses individuelles ne suffisent pas.
(Et comme pour chaque sytème d'opression, je ne dit pas que chaque monogame est un·e monstre, mais qu'à travers chaque monogame se déploie la monstruosité de la Norme).
C'est pourquoi il y a besoin de tels forums, d'entraide, de solidarité, etc.
C'est pourquoi il y a besoin de réléchir/théoriser/échanger ensemble et d'inventer des parades.