Doutes sur la polyacceptance
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Jayavarman (invité)
le mardi 14 mars 2023 à 11h11
Salut à toutes et à tous,
Je vous écris ici un long message pour vous faire partager ma relation et les doutes qu’elle suscite, pour voir si certaines personnes ont déjà traversé les mêmes problèmes.
Je suis en couple avec une polyamoureuse depuis deux ans.
A l’origine c’est elle qui est venue vers moi, à un moment où j’étais un peu dans le mal (rupture en douceur mais rupture tout de même après une longue relation, je savais pas trop où j’en étais…), et la relation a décollé assez vite, avec beaucoup d’intensité et de ma part, sans doute un peu trop d’engagement. Au bout d’un mois et demi, on a senti que ça n’allait pas, et on a fait un break parce qu’elle a souffert de mes incertitudes – je regrette d’ailleurs encore aujourd’hui profondément de lui avoir fait du mal. Pendant ce break, elle a rencontré un autre partenaire.
Quelques mois après, on a recommencé à se voir parce qu’on en avait envie tous les deux. Elle m’a fait comprendre qu’elle voulait garder son autre partenaire et construire une relation polyA mais en mettant ses deux partenaires à égalité.
Perso ça m’allait très bien, encore une fois parce que j’étais dans une période de reconstruction et que je ne voulais plus faire souffrir qui que ce soit de mes incertitudes. Une précision importante pour la suite : j’habite à 2h de TGV de chez elle, et son autre partenaire habite dans la même ville qu’elle.
Deux ans plus tard, les choses ont pas mal changé. Je suis très amoureux, et elle aussi est très amoureuse – visiblement de ses deux partenaires. Mon problème est que je vis de moins en moins bien la polyacceptance : je pense à eux quand ils sont ensemble, et je commence à avoir de plus en plus envie d’être son partenaire principal.
Elle m’a dit qu’elle n’avait absolument aucune intention de choisir entre nous, ou de vivre avec moi, et semble se diriger vers un profil de polyA solo : vivre chez elle, avoir sa vie en toute indépendance, tout en gardant ces deux relations qu’elle chérit énormément.
Dans le même temps, depuis quelques semaines, je la sens plus amoureuse de moi – et elle me l’a confirmé. On est sur une pente ascendante, dont semble souffrir l’autre partenaire et c’est pour cette raison qu’elle veut essayer de redéfinir sa double relation de manière à ce que personne ne se sente lésé. Mais elle ne veut pas entraver notre pente ascendante dans le même temps, et personnellement j’ai du mal à voir comment c’est possible de concilier ces deux envies. Mais ça, c’est à elle de le déterminer.
De manière générale, la situation telle qu’elle est pourrait me convenir dans les grandes lignes. Il y a cela dit un souci, c’est le rôle que moi et l’autre partenaire jouons dans sa vie sociale et quotidienne. Ses amis et sa famille proche savent qu’elle a deux partenaires qu’elle aime également, donc ça, ça va, mais de plus en plus, on lui dit « tu peux ramener qqn » à tel ou tel événement, et dans cette situation elle est en panique parce qu’elle doit choisir l’un d’entre nous en sachant que l’autre est triste ou frustré, ce qui est quasi inévitable.
Et c’est dans ce type de situation qu’en tant que partenaire « à distance », je me sens un peu lésé, parce que j’ai peur que l’autre partenaire devienne son partenaire-vitrine, celui qui donne l’impression d’être son partenaire officiel – même si elle ne le voit pas comme ça. Et dans le même temps, je déteste l’idée de lui mettre la pression pour qu’à chaque fois qu’elle invite son autre partenaire à un événement familial/amical, il faille qu’elle m’invite au suivant : c’est peu valorisant pour elle comme pour moi, et c’est juste nul.
Et on a récemment discuté de la possibilité qu’elle emmène un +1 à des événements plus ponctuels comme les mariages des cousins etc. où là elle serait obligée de prendre toujours le même parce qu’elle n’a pas envie d’avoir à expliquer et être jugée à cause du polyA par toute sa famille (ce que je comprends entièrement, mais alors comment choisir, puisque l’autre sera inévitablement affecté ?)
Sachant que bien qu’ « à distance », j’ai un emploi du temps flexible qui me permet d’être très présent, ce qui est bien et en même temps me piège, puisque si je ne pouvais pas être présent du tout, les choses seraient plus simples à décider.
C’est donc une relation compliquée, sur laquelle je me pose beaucoup de questions mais :
- renoncer à cette relation, ce serait me plonger dans un profond malheur et la plonger elle également dans un profond malheur, donc j’ai pas envie d’envisager cette possibilité.
- continuer c’est devoir accepter une part (croissante ?) de jalousie, de frustration, d’incertitude, et ça me fait un peu peur. J’aimerais savoir si qqn est parvenu à dépasser ces sentiments et à être pleinement épanoui dans une configuration similaire.
Donc voilà, c’est la question que je me pose, plus généralement : comment être épanoui dans une relation avec qqn avec qui on se verrait bien relation principale, mais qui le refuse catégoriquement
+ comment vivre mieux la jalousie vis-à-vis du fait que l’autre partenaire est plus souvent présent dans sa vie quotidienne, sa vie sociale et familiale. La réponse je la connais c’est « pour elle tu restes aussi important que l’autre », mais ça reste difficile à vivre.
Ah, et pour info : je ne souhaite pas être moi-même polyA. J’ai déjà essayé de rencontrer d’autres personnes, et la seule fois où ça aurait pu être un peu sérieux, je me suis rendu compte que je n’avais envie de m’investir émotionnellement qu’avec une seule personne. Et je ne veux pas avoir à gérer les mêmes difficultés que celles que ma partenaire doit gérer, qui sont quand même une source de stress pour elle.
Merci à vous pour votre lecture, je vous souhaite d’être heureuses et heureux dans vos relations.
J.
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bonheur
le mardi 14 mars 2023 à 13h17
Bonjour @Jayavarman,
Je ne peux guère réagir, parce que chaque situation est unique.
Je peux toutefois indiquer que la légitimité d'une relation voulue égalitaire, sauf que seul la personne géographiquement proche est reconnue, complique l'existence. Surtout si la personne métamour est mono et qu'elle devient l'officielle. Officiel pour la famille, les amis, les collègues de boulot et une acceptance dans la souffrance et le rejet (métamour). J'ai tendu la perche pour un choix, une rupture. Le polyamour a pour principe, justement, le non choix.
Lorsqu'une personne poly est au centre et que le déséquilibre est grand sur la volonté affichée et la réalité possible, la rupture est évidemment une solution. Elle permet de retrouver une autre vie, avec d'autres possibles.
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artichaut
le mardi 14 mars 2023 à 13h49
Selon moi la « polyacceptance » n'existe pas. Ça me semble être une invention de personnes poly voulant imposer une relation poly à des partenaires monogames.
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Caoline
le mardi 14 mars 2023 à 15h59
Pour moi aussi si on accepte et vit plutôt bien que sa.on amoureu.se.x e ai plusieurs relations, on est plus polyamoureux que si on a plusieurs partenaires mais que ses partenaires n'ont que soi.
Si elle ne veut pas hiérarchiser de mon point de vue, il faut qu'elle assume et explique à tout le monde et soit qu'elle vous emmène chacun votre tour, pas forcément pile un puis l'autre aussi en fonction des dispos et des goûts ou qu'elle vous emmène tous les deux.
J'ai 2 compagnons entre lesquels il n'y a pas de hiérarchie. Si on m'imposait de ne venir qu'avec un des deux seulement pour quoi que ce soit, je préférerai décliner l'invitation. Ça ne signifie pas du tout que je vais partout avec les deux, c'est même plutôt rare, mais si ils ont envie tous les deux c'est important pour moi qu'ils puissent venir et si ce n'est pas accepté c'est que je ne suis pas acceptée telle que je suis.
Petit parallèle, j'ai fait comme ça dans le passé quand les enfants n'étaient pas bienvenus. Pas que j'avais toujours envie de les emmener ou qu'ils avaient toujours envie de venir mais quand c'était le cas je n'y allais pas si ils n'étaient pas bienvenus.
Ça peut faire du tri dans les relations familiales ou amicales, mais comme ça il ne reste que celles où on peut être soit-même.
Bon courage, ta situation ne me semble pas évidente si tu aspires à la priorité, pas sûre même qu'elle puisse être viable ou en tout cas épanouissante.
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Topper
le mardi 14 mars 2023 à 20h05
Bonjour Jayavarman, je n'ai pas été dans une configuration similaire mais j'ai dû apprendre à vaincre la jalousie, à gérer de la frustration, de l'incertitude.
Jayavarman
continuer c’est devoir accepter une part (croissante ?) de jalousie, de frustration, d’incertitude, et ça me fait un peu peur. J’aimerais savoir si qqn est parvenu à dépasser ces sentiments et à être pleinement épanoui dans une configuration similaire.
Si tu ressens de la jalousie, cela ne veut pas dire qu'elle va sans cesse progresser. Cela dépend de la situation, et de comment tu vis cette situation.
Jayavarman
Donc voilà, c’est la question que je me pose, plus généralement : comment être épanoui dans une relation avec qqn avec qui on se verrait bien relation principale, mais qui le refuse catégoriquement
+ comment vivre mieux la jalousie vis-à-vis du fait que l’autre partenaire est plus souvent présent dans sa vie quotidienne, sa vie sociale et familiale. La réponse je la connais c’est « pour elle tu restes aussi important que l’autre », mais ça reste difficile à vivre.
Pour mieux vivre la jalousie, il faut la gérer. Pour la gérer, tu peux agir sur plusieurs angles en même temps.
Tu peux modifier ta façon de penser. Cela permet de lacher du lest sur ce qui te pose problème. Par exemple, le fait de ne pas être l'officiel aux yeux des autres, pourquoi est-ce que c'est important pour toi ? Est-ce vraiment important ? Si dans son coeur tu as la place favorite ou une place équivalente, qu'est-ce que ça change concrètement dans votre relation ? Réfléchir à ce genre de questions pour rationaliser. Cette rationnalisation permet de te composer une liste d'affirmation que tu peux invoquer lorsque la jalousie survient. Ainsi, tu peux réduire l'impact du ressenti qui va devenir de moins en moins fort avec le temps. Il faut trouver des pensées tranquilisantes pour chaque problématique.
Tu peux demander de la réassurance à ta partenaire. Cela a ses limites parce que ça peut devenir oppressant pour l'autre, néanmoins ça peut répondre efficacement à des insécurités.
Tu peux changer la situation problématique. Le problème est d'être loin d'elle. Pourquoi ne pas envisager de te rapprocher ?
Tu peux trouver des fonctionnements compensatoires. Si la situation ne peut pas être changée, qu'est-ce qui pourrait faire que tu te sentirais important dans sa vie ? Augmenter les moment privilégiés ? Partir en voyage peut-être ? Avoir des projets ?
Voir avec elle comment équilibrer les relations. Si dans sa tête, les relations n'ont pas le même niveau d'importance, comment dans la pratique cela peut être en corrélation avec vos sentiments. Peut-être que tu sois l'officiel avec certaines personnes, et l'autre avec d'autres personnes ? Travailler ensemble sur sa capacité à assumer son polyamour et le fait qu'elle ait plusieurs partenaires.
Se sécuriser avec d'autres personnes. Ressentir de la jalousie et d'autres émotions négatives, ça fait perdre de la confiance en soi. Avoir d'autres relations (pas forcément amoureuses) peut te permettre d'avoir de la réassurance quant à tes qualités. Que cela ne vienne pas de ta partenaire qui te dit ça parce qu'il y a un enjeu relationnel a son importance. Cela réduit aussi la dépendance affective. Enfin, cela permet d'avoir une oreille attentive quand ça ne va pas, ou te changer les idées.
Jayavarman
Ah, et pour info : je ne souhaite pas être moi-même polyA. J’ai déjà essayé de rencontrer d’autres personnes, et la seule fois où ça aurait pu être un peu sérieux, je me suis rendu compte que je n’avais envie de m’investir émotionnellement qu’avec une seule personne.
Si tu es en NRE ou si tu es dans une relation dans laquelle tu ne te sens pas en sécurité, c'est pas surprenant que tu n'arrives pas à t'investir émotionnellement avec une autre personne. Je trouve ça tout à fait normal. Il n'y a pas de place disponible pour quelqu'un d'autre si tu es complètement focalisé sur une relation compliquée. C'est probablement pas du tout le moment pour toi, mais ne ferme peut-être pas cette porte définitivement.
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bonheur
le mercredi 15 mars 2023 à 17h20
Une belle émission diffusée hier soir sur TV5 avec Michel Cymes : Prenez soin de vous : Se libérer des émotions toxiques.
Dans l'une des histoires, un homme qui a subit l'injustice d'un accident de vélo très grave (coma...), et qui était déjà de tempérament impulsif avant, se voit quasi en permanence dans une colère vive. Au final, il comprend qu'il n'accepte pas sa situation. J'invite à découvrir le chemin vers cette acceptation. J'ai beaucoup retrouvé mon chéri de vie, dans ce parcours d'apaiser sa colère, de comprendre la réalité, etc. Bon ok, sa colère de cette injustice (faire l'impasse sur ses rêves, ses illusions, ses projections du "couple parfait") a été modérée par rapport à cet exemple extrême. Les bases sont là.
Mais oui, on peut dire que la personne poly, dans sa transition, impose. Le fait est que, ensemble, nous avons su prendre soin de nous, de nos émotions respectives et des émotions de l'autre.
Sans doute, est-ce de la supercherie, puisque c'est faux, les polyacceptants sont des miséreux, malheureux qui se plient, en courbant l'échine, à la volonté suprême de la monarchie absolue. :-/
Message modifié par son auteur il y a 15 jours.
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Jayavarman (invité)
le jeudi 16 mars 2023 à 11h56
Merci pour vos réponses, en particulier @Topper : tu as bien résumé les différentes stratégies que j'avais repérées pour déterminer si je pouvais, ou non, m'épanouir dans cette relation. J'arrive à être rassuré sur beaucoup de choses : les sentiments de ma partenaire, son projet de vie qui m'inclut au moins au même niveau que son autre partenaire, nous avons des projets de voyage et nous voyons quand même régulièrement... Je me dis que ça ne va pas si mal.
Je ne me sens pas vraiment pas en insécurité car je suis sûr de ses sentiments, ce qui est le principal. Je me demande juste si j'ai envie d'avoir plus et d'être plus. Ce qui est certain c'est que je ne suis pas "moins" que l'autre. Après quelques jours de cogitage, je me dis qu'il faut encore que je laisse du temps à cette relation avant de déterminer si elle me fait plus de mal que de bien - ce dont je ne suis pas du tout sûr.