Polyamour.info


artichaut

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Rennes (France)

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J'habite vers Rennes.

Il y a un peu plus de 15 ans, je suis passé de "relations exclusives de fait" à la non-exclusivité puis le « polyamour », terme dans lequel je ne me reconnais plus aujoud'hui.

Mes débuts dans les "relations non-exclusives" ont été (comme pour beaucoup) a…

«  Poly yes ! », «  Polyamour 2.0 » : la question du consentement relationnel. 1/2

Rédigé le mercredi 24 juin 2020 à 23h03

Mis à jour il y a 2 mois

S'il n'y a pas de consentement éclairé, volontaire et enthousiaste d'une des parties à vivre le polyamour, peut-on vraiment parler de polyamour ? [Temps de lecture total : 2x20=40 min. environ] — 1ère Partie.

Plan (des 2 parties)


....I. De quoi parle t-on ?
........Manifeste « Poly yes ! ».
........D'où je pars ?
........Qui suis-je ?
........Au fait le consentement c'est quoi ?

II. Les contradictions du polyamour
........Vous avez dit "Polyacceptant·e" ?
........Le polyamour subit n'existe pas.
........Poly-Mono.
........C'est la relation qui est poly ou ne l'est pas.
........Et le "Poly hiérarchique" ?

III. La question du choix.
........Responsabilité affective.
........Vivre en société capitaliste avancée (la dimension structurelle des relations).
........Le polyamour n'est pas du marchandage.
........L'hypocrisie du « ça-ou-rien ».
........Être poly c'est poser des choix de vies.

IV. Et si on essayait vraiment ?
........Il est +facile d'être mono que d'être poly.
........Metamours et compersion.
........Questionner nos attirances.
........Les avantages et les inconvénients.
........« Poly yes !», on y va ?!

Conclusion
Pour aller +loin



[sommaire / I / II / III / IV / Liens]

I. De quoi parle t-on ?

___________________________________

Il y a un vaste marécage dans le domaine des rencontres amoureuses (…) et l’inconfort du marécage amène de nombreuses personnes à des conduites manipulatrices et des mélodrames inutiles.

Mark Manson, traduction française d'Audren le Rioual


Une proposition d'amours qui ne soient pas possessives, qui ne soient pas nécessairement exclusives, mais qui soient pensées comme prendre soin de l'autre et de soi-même en mettant le lien au centre de l'attention. (…) arrêter d'avoir peur de ce qui nous lie aux autres. Pouvoir le regarder et le construire d'une belle manière.

Brigitte Vasallo

En polyamour comme ailleurs il y a des marécages. Pas seulement sur le plan sexuel, mais aussi sur le plan relationnel. A tel point qu'il conviendrais d'écrire le manifeste du « Poly yes ! ». En voici une première ébauche.


Manifeste « Poly yes ! ».

Le Poly yes ! c'est vouloir sincèrement que son/sa/ses partenaires puissent avoir d'autres relations, des relations de leur choix, d'amitié, d'amour, de sexe, de tout ce qu'elles/ils voudrons, du nombre qu'elles/ils voudrons, de l'intensité et de la durée qu'elles/ils voudrons. C'est souhaiter le bonheur de l'autre, choisis par elle/lui.

Le Poly yes ! c'est ne pas me mettre en relation poly si je n'en ai pas vraiment-très-envie, c'est ne pas inciter l'autre à se mettre en relation poly s'il/elle n'en a pas vraiment-très-envie.

Le Poly yes ! c'est faire très attention à ne pas développer des stratégies, conscientes ou inconscientes, de contrôle dans ses relations. Prendre en compte les oppressions structurelles. Laisser les relations exister à leur rythme.

Le Poly yes ! c'est ne pas proposer des packs-relationnels pré-conçus, mais construire entièrement la relation avec l'autre. Être prêt·e à se remettre en question, à tout reconsidérer.

Le Poly yes ! c'est tenir compte non seulement de l'autre, mais aussi de ses relations, des relations de ses relations. Travailler aussi à inventer d'autres façon de relationner au delà de nos injonctions ou de nos schémas pré-établis. Donner avant de réclamer.

Le Poly yes ! c'est encourager sincèrement et joyeusement l'autre dans ses recherches relationnelles, sans pour autant chercher un plan à trois. Ne pas s'immiscer. Ni créer une injonction de plus.

Le Poly yes ! c'est vouloir le bonheur de l'autre quel-qu'il-soit, même sans nous.

Le Poly yes ! c'est choisir le seul consentement éclairé, volontaire et enthousiaste dans la sexualité. Ne jamais forcer la sexualité. Toujours laisser une porte de sortie à l'autre.

Le Poly yes ! n'est rien d'autre qu'une forme d'amour, mais un amour conscient, éclairé et volontaire.


D'où je pars ?

Ça fait longtemps que je veux écrire ce texte.

Je n'ai pas inventé grand'chose, je couche juste sur le papier ce qui se dit, se qui se vit, au sein de la communauté poly ou dans certains endroits de l'internet.

Je suis lassé d'entendre dans des "cafés poly", ou ici sur le forum, parler de "poly-acceptance", lassé d'entendre toujours les même questions, les même affirmations : « Comment convaincre ma/mon partenaire de devenir poly ? », « Je suis poly mais ma/mon conjoint·e ne l'est pas, que faire ? », etc.

Aujourd'hui je me sens +proche des personnes que l'on nomme maladroitement "poly-acceptantes"(*) que d'autres se revendiquant du polyamour mais le pratiquant dans une version que j'estime un peu trop libérale.

J'avais beaucoup apprécié il y a quelques années les réflexions sur un "consentement sexuel 2.0" tendant à remplacer le mot consentement par le mot enthousiasme : la règle du « Fuck yes ! ». J'ai voulu pousser la réflexion et l'élargir au relationnel.

Qui suis-je ?

Je suis un mec-blanc-cis-hétero qui navigue dans la non-exclusivité et le polyamour depuis un peu+ de 10 ans.

La différence que j'ai vécue en passant de mono-de-fait (*) à non-exclusif (*), puis de non-exclusif à poly (*) c'est de gagner en éthique relationnelle. Mais pendant un bon moment j'ai été non-exclusif, sans autre "éthique" que la liberté individuelle de faire ce qu'on veut de son corps, sans aucune recherche de compromis, sans grande prise en compte de l'autre, sans grande empathie même.

J'ai eu le sentiment de progresser dans ce chemin tortueux grâce aux rencontres que j'ai pu faire, grâce à mes relations, grâce à mes copines féministes, grâce aux écrits et vidéos de Brigitte vasallo et tant d'autres. Je me sers aussi de mes erreurs et mes errements passés pour y voir +clair aujourd'hui.

Je ne regrette pas ce chemin. Vraiment pas. Chaque jour est une nouvelle remise en question. Rien n'est jamais acquis.


Au fait le consentement c'est quoi ?

Le Petit Robert nous dis : « Consentement : acquiesement donné à un projet ; décision de ne pas s'y opposer ».
Il ne laisse donc pas entendre la révocabilité, le changement d'avis à tout moment. C'est pourtant cela le vrai consentement.

Alors il faut se mettre d'accord : de quel consentement parle t-on ? Consentement-résignation (1.0) ou Consentement-éclairé-volontaire-et-enthousiaste (2.0) ?

Au mieux, dans ce monde là, on nous apprend à dire non. mais on ne nous apprend pas à dire oui (un vrai oui s'entend). On est tellement socialement peu préparé qu'il nous faut déjà savoir poser un non, pour commencer à se dire oui à soi-même, et pouvoir ensuite énoncer de vrais oui (« un Non à l'autre est un Oui à soi-même » dit un précepte désormais connu).

Mark Manson nous dit :


La règle du « fuck yes! » stipule que quand on veut se lancer dans une histoire avec quelqu’un, quel que soit le type d’histoire, il faut que la personne donne envie de répondre « fuck yes » pour que ça vaille la peine de continuer. (…) On regagne en estime de soi et on met fin soi-même aux histoires bancales, (…) La seule chose qui compte pour éviter de perdre son temps, c’est que les deux personnes ressentent de l’enthousiasme pour un projet commun.

Mark Manson, traduction française d'Audren le Rioual

Le consentement ce n'est pas "why not" ou "bon, ok", ce n'est pas pour faire plaisir à l'autre, ou parce que l'on ne peut pas faire autrement, parce qu'on a pas le choix.

Donc en matière de relationnel c'est pareil qu'en matière de sexe. Si vous proposez une relation poly à une personne, celle-ci consent, si-et-seulement-si, elle est emballée par votre proposition. Sinon vous lui extorquez son oui.

Le consentement éclairé, volontaire et enthousiaste implique :
- qu'on ai la capacité de choisir (car tout le monde n'a pas les même facilités en la matière)
- qu'on en a réellement envie (c'est nous qui prenons la décision et personne d'autre)
- que cette envie soit clairement exprimée (il n'y a pas ambiguïté)

Une autre façon de le dire, c'est « la roue des trois oui », qui nous viens du Canada. Pour qu'il y ai consentement il faut qu'il y ai 3 oui à la fois : un oui libre, un oui authentique, et un oui informé.

- Le « oui libre » : Ai-je donné le choix à la personne ? Est-ce qu'elle a la capacité de dire "oui" ou "non" ? Est-ce qu'elle peut dire "non" sans aucune crainte ni pression ?
- Le « oui authenthique » : Ai-je entendu "OUI" ? Est-ce un "oui" vraiment authentique ? Ai-je vérifié que la personne voulait la même chose que moi ? Ai-je observé : son expression faciale, langage corporel, ton de voix, regard.
- Le « oui informé » : Ai-je exprimé mes attentes et mes intentions ? Est-ce que je crois vraiment que la personne comprend son choix ? Lui ai-je donné toute l'information dont-elle avait besoin ? Ai-je la certitude qu'elle a la pleine capacité de comprendre ce que je lui dit ?

(Source : Roue des trois oui)

En matière de relationnel ça veut dire s'assurer que
- la personne a réellement la possibilité de dire non (qu'elle n'est ni sous l'emprise d'un chantage, ni mise au pied du mur…)
- la personne a vraiment dit oui (les oui-tacite n'existent pas, les peut-être ne sont pas des oui, la résignation n'est pas un oui / ici on retrouve la règle du « fuck yes ! »)
- la personne a vraiment été pleinement informée de ce qu'implique le polyamour (à nous de donner des informations non-tronquées et qui ne soient pas à notre seul avantage)

Continuons avec Manson :

Le grand mérite de la règle du « fuck yes! », c’est qu’elle simplifie tout le contexte des rencontres amoureuses. Quand on se tient à la règle, il ne reste éventuellement que deux problèmes.
Le premier problème, c’est quand on n’est emballé par personne. (…) Il faut apprendre à savoir apprécier les personnes qu’on rencontre, et ça s’apprend. Alors allez-y. (…)
Le second problème, c’est quand on ne rencontre jamais personne à qui on inspire le moindre enthousiasme. (…) alors il faut commencer à s’améliorer soi-même.
Et s’il ne doit rester qu’un seul conseil de séduction, c’est bien celui-là : qu’on soit homme femme, hétéro, homo, trans, furry ou que sais-je encore, la seule vraie recette de séduction, c’est de travailler sur soi-même. Tout le reste ne sert qu’à perdre son temps et à se débattre inutilement dans le marécage pour satisfaire son ego.

Mark Manson, traduction française d'Audren le Rioual

Car oui, comme nous allons le voir, le consentement relationnel, c'est +compliqué qu'on ne le crois souvent, ça demande du travail, un surplus de charge relationnelle, et ça peut impliquer, au moins au début, d'avoir moins de relations qu'on ne le voudrais.

Ce à quoi nous a habitué la monogamie, tant en matière de relations que de sexe, c'est de sauter la tête la première dans le vide. Car "il ne faudrais pas" rater une occasion (c'est peut-être l'homme/la femme de ta vie, et on pourrais te le/la piquer, +injonction mono à l'urgence de se mettre en couple). Car les prises de risques sont valorisées et encouragées (ça profite au modèle capitalo-patriarcal). Car "il ne faudrais pas" trop se poser de questions (on pourrait dire non, l'autre pourrait changer d'avis et nous dire non).

Ici c'est tout le contraire dont il est question. On se pose et on discute. De nos vies, de nos relations, de nos envies et non-envies. Ça implique d'apprendre à ralentir, d'apprendre à s'écouter et écouter l'autre. Ne plu se précipiter. Refuser l'impératif de l'urgence.




[sommaire / I / II / III / IV / Liens]

II. Les contradictions du polyamour

Depuis que le polyamour existe, et même avant lui, plein de formes s'essayent, s'expérimentent, se revendiquent du polyamour. De nouveaux mots ou concepts apparaissent. Faisons un peu le tri.


Vous avez dit "Polyacceptant·e" ?

Le terme "polyacceptant"/"polyacceptante" (*), qui n'a pas d'équivalent en anglais, est assez répandu dans le milieu poly français.
Il désignerai une personne vivant une unique relation (sous entendu amoureuse, sexuelle et de couple) avec une personne se définissant comme "polyamoureuse". La personne "polyacceptante" serait donc celle qui accepte les relations multiples (sous-entendu "poly") de son ou sa partenaire.

Le terme est souvent employé pour désigner des personnes résigné·e·s ou en tout cas, installé·e·s dans leur choix de n'avoir qu'une seule relation —sous entendu amoureuse et sexuelle— alors que leur partenaire en a plusieurs (avec tout un curseur du négatif au positif, dans la manière de le vivre).

Je trouve ce terme bien péjoratif, bien condescendant, bien négatif (aussi négatif que semble l'être la situation des dit·e·s "polyacceptant·e·s").
Et je me demande comment valoriser (et non pas stigmatiser) et prendre en compte (et non pas invisibiliser) pleinement ces personnes :
- qui, de fait, quittent la mononorme tout en restant "mono" (les personnes pouvant se définir monoamoureuses et monoamoureux, par exemple) ;
- qui font le choix assumé de n'avoir qu'un·e partenaire (ou s'y résigne par défaut) mais acceptent (voire sont content·e) que leur partenaire en ai plusieurs ;
- qui le +souvent galèrent mais travaillent sur leur jalousie ;
- qui souvent font fi de leur statut social, et ne s'en servent pas comme arguments, même s'il est moins privilégié que celui de leur partenaire ;
- qui font le travail de découvrir la non-monogamie et de se poser plein de questions ;
- etc.
(j'en oublie probablement)

C'est tout un éventail que l'on aurait sans doute un peu trop tendance à enfermer dans une seule et même case de "polyacceptance".
On y trouve 2 formes de résignations :
- je me résigne à ce que mon/ma partenaire ai plusieurs relations (alors que ça me fait du mal, que je galère avec la jalousie, que je me sens peu soutenu·e, que je n'ai pas vraiment "le choix", etc)
- je me résigne à n'avoir moi-même qu'un·e partenaire (alors que mon/ma partenaire en a, et/ou en trouve facilement, plusieurs)
Les deux résignations pouvant même s'additionner !
Ces personnes ont tout autant, sinon+, besoin de soutien. Car elles peuvent se sentir exclues des 2 mondes, le monde poly et le monde mono, se sentir stigmatisées ou incomprises de l'un comme de l'autre.

Dans Le Petit Robert, toujours, "accepter" signifie autant "Donner son accord à" que "Se soumettre à une épreuve ; ne pas refuser". Le mot même de (poly)acceptance est glissant.

D'autres mots ont été proposé mais "poly-acceptance" semble l'avoir emporté (du moins sur ce forum). Poly-compatible n'était pas mal non plus, car ça ne dit rien sur la personne en soi-même, juste sur la compatibilité (d'ailleurs on pourrait dire que c'est la relation qui est poly-compatible, plutôt que de parler des personnes). Et anecdotiquement car il est +pratique en écriture inclusive. Mais il n'a pas pris.
Pour ma part je persiste à trouver ce concept de "polyacceptance" peu enthousiasmant, un peu trop poly-centré (il me donne l'impression d'avoir été inventé par des polys, non par des monos), peu valorisant (idem) et donc au final peu pertinent.

Je trouve que qualifier ces personnes ainsi est bien peu leur rendre hommage pour tout le travail qu'elles font sur elles-même et la charge relationnelle que souvent elles engagent. J'ai envie de les voir non comme des obstacles au polyamour, mais au contraire comme des alter-ego.

Libre à chacun·e, bien sûr, de s'auto-désigner comme tel·le. Mais personellement je n'aime pas ce terme et ce qu'il me semble porter en lui. Et je m'en méfie toujours quand il est utilisé non pas par la personne concernée mais par son/sa conjoint·e.

En définitive je trouve que ces personnes, qui souvent donnent au lieu (ou avant) de réclamer, qui souvent cherchent à être compersives (*), sont au moins autant légitimes que leur partenaire, et même parfois+, à se définir comme polyamoureuses à part entière.

Pour toutes ces raisons le terme "polyacceptant"/"polyacceptante" me semble donc à proscrire.


Le polyamour subit n'existe pas.

Si votre partenaire n'est pas enthousiaste et volontaire à être/devenir poly et à ce que vous le soyez, vous n'êtes pas polyamoureux/polyamoureuse, juste vous forcez votre partenaire. Et c'est de l'abus relationnel.

Il faut être très clair avec ça : le polyamour imposé n'est pas du polyamour.

Je vois au moins 3 sortes de polyamour imposé :
- ouverture forcé du couple
- mise devant le fait accompli (adultère)
- le « ça-ou-rien » (voir paragraphe III.4)

Ce n'est pas à votre partenaire de partir, si ça ne lui convient pas "que vous soyez poly". C'est à vous d'assumer vos choix. Si vous êtes actuellement en couple mono et voulez devenir poly ? Vous n'avez que deux solutions :
- ouvrir ensemble votre couple, par décision commune et réfléchie
ou
- partir et vivre le polyamour
Ne faites pas porter aux autres les conséquences de vos choix. Par exemple s'il doit y avoir rupture suite à votre volonté d'ouvrir le couple, c'est à vous d'assumer la responsabilité de cette rupture.

Vous ne pouvez être lâche et obliger l'autre a faire ces choix à votre place. Ce sont vos choix. Si l'autre se contente de "consentir" (faute de mieux) ce n'est pas du consentement. Oui les termes sont ambigus. Il serait sans doute intéressant de creuser l'étymologie du mot consentement, de savoir qui l'a inventé et pourquoi. Il est bancal, mais c'est le mot actuellement en usage. Alors en attendant d'en trouver un meilleur et qu'il devienne à son tour en usage, on est bien obligé de dire que le consentement ce n'est pas "consentir à…". Tant pis si cela paraît paradoxal à certains.

Le polyamour n'est pas le concours du pire entre la résignation et la frustration. C'est construire ensemble —par choix éclairé, enthousiaste et volontaire— de nouvelles modalités affectives.


Poly-Mono.

On appelle généralement poly/mono (*) une relation entre une personne poly et une personne mono. Mais il y a une grande confusion comme expliqué précédemment à propos de la "poly-acceptance".

La seule relation poly/mono possible c'est lorsqu'une personne résolumment-poly rencontre une personne résolumment-mono, et qu'il/elle décident en connaissance de cause de faire un bout de chemin ensemble. Ne rêvons pas, c'est très très difficile à vivre, et ça se finit le +souvent, et rapidement en échec. Mais en soi c'est possible.

Si en revanche vous êtes déjà en couple mono, et que l'un veut "devenir poly", vous n'avez pas d'autres solutions que le couple deviennent poly ou ne le deviennent pas. Ça ne veut pas dire que chaque personne du couple doit impérativement vouloir/avoir plusieurs autres relations (il n'y a pas d'injonction en nombre de relations) mais ça veut dire que les deux personnes du couple doivent impérativement, de manière éclairé, enthousiaste et volontaire, vouloir aller vers le polyamour, c'est à dire vers la possibilité que l'autre puisse avoir plusieurs relations consenties par toutes les personnes impliquées. Le polyamour c'est pas que quand ça nous arrange.

Un couple mono-poly ça n'existe pas. Être poly c'est ne pas être mono. Un couple ne peut pas être une chose et son contraire. J'aurais même tendance à dire que si vous êtes en couple, vous êtes mono. Mais ça c'est une autre histoire…


C'est la relation qui est poly ou ne l'est pas.

Ce n'est pas parce qu'une personne se définit comme "polyamoureuse" et a plusieurs relations que toutes ses relations sont poly. S'il n'y a pas consentement d'une des parties dans une relation, c'est que la relation n'est pas vraiment polyamoureuse. S'il n'y a pas de consentement éclairé, volontaire et enthousiaste d'une des parties, peut-on vraiment appeler ça une relation polyamoureuse ?

La notion même d'être poly, de se définir comme poly, est rarement discuté car elle est considérée comme un choix personnel et inaliénable. Pourtant dans bien des cas il peut être +pertinent de se dire que personne n'est poly en-soi, mais que ce sont les relations qui sont poly (ou ne le sont pas). Autrement-dit pouvez-vous vraiment vous dire poly, si vous êtes en couple mono et que vous êtes seul·e à vouloir vivre "le polyamour" ? Je pense que non.

De même qu'il n'y a pas à se forcer (forcer l'autre) à être mono, il n'y a pas non plu a se forcer (forcer l'autre) à être poly.

Considérer que c'est la relation dont on parle et non des êtres, permet de prendre du recul sur la situation et de ne pas présenter les choses comme allant de soi ou comme un état de fait.

Un·e poly (au sens de l'orientation relationnelle) peut avoir une relation mono. Un·e mono (au sens de l'orientation relationnelle) peut décider d'avoir une relation poly. Mais dans tous les cas, c'est à deux —au moins— qu'on décide de ce qu'est la relation. Et encore une fois, par défaut, elle est mono.


Et le "Poly hiérarchique" ?

Je me dis, de +en +souvent, que ce qu'on appelle le "polyamour hiérarchique"(*) n'est pas vraiment du polyamour, que la "poly-exclusivité"(*) (ou "poly-fidélité"(*) comme certain·e·s l'apellent, injustement) n'est pas vraiment du polyamour.

Je suis gêné de dire « ceci est du polyamour », « ceci n'en est pas ». Qui suis-je pour dire ça ? pour trancher ainsi ?
Sans doute est-ce cela qui m'a si longtemps retenu d'écrire et publier ce texte. J'ai peur d'être dogmatique, d'imposer mon point de vue. Mais j'en ai marre d'entendre sans cesse de telles confusions. Non, par exemple, le polyamour ce n'est pas "avoir plusieurs partenaires". Il manque un truc essentiel : le consentement.

Et non le consentement ce n'est pas "accepter de…", "bien vouloir se résoudre à…", "prendre sur soi", etc.

Grâce à tout le travail mené par les féministes, on (…) commence à bien comprendre que le consentement est central à la question des relations sexuelles, (…) Étrangement, le couple s’appuie sur l’idée (inverse, archaïque) d’un engagement solennel unique qui vaut consentement irrévocable et permanent.

(Source : les fesses de la crémière)

Les couples ont perdu l'habitude du consentement. Non seulement sexuel, mais relationnel. Donc quand dans un couple historique vient la question d'ouvrir le couple, l'un se croit trop souvent autorisé à faire fi du consentement de l'autre.

Et concernant les personnes extérieures au "couple historique", les personnes pratiquant le "poly-hiérarchique" ont généralement tendance à pratiquer l'hypocrisie du « ça-ou-rien » (voir +loin), donc a ne pas proposer un consentement plein et entier..

On pourra lire à ce sujet les textes de Natàlia Wuwei, Pensée monogame au-delà des couples « ou Mémoires d’une C » (ou pourquoi je déteste vraiment la monogamie). Elle évoque ce que signifie être une "C", c'est à dire être assignée à une relation secondaire (les tenants du couple étant "A" et "B"). Malgré toute la violence qu’il peut y avoir dans une relation de couple, elle bénéficiera toujours d’un privilège social, sur les personnes satellites.

Salut : je suis une C.
- Je ne peux pas définir la relation.
- Je n’ai pas de voix.
- Je n’ai pas d’opinions, ni de souhaits, ni de besoins ou de volonté.
- Ma relation n’est pas reconnue.
- Je ne peux pas participer aux processus de prise de décision sur les aspects qui me concernent.
- Je suis invisibilisée.

Natàlia Wuwei, traduction Elisende Coladan.

Donc que ce soit vis-à-vis du conjoint que l'on rassure en qualifiant la relation historique de prioritaire, ou vis-à-vis de la nouvelle relation que l'on cantonne au rang de secondaire, j'ai le sentiment qu'il y a quelque chose de foncièrement et profondément monogame. Si le polyamour c'est prendre soin de toutes les personnes impliquées, comment pourrais t-on prendre soin d'une personne au détriment d'une autre ?
Il me semble y avoir à la racine même du dit "polyamour hiérarchique" une contradiction qui sabote l'idée même de polyamour. Qualifier une relation de secondaire, quant ce n'est pas carrément l'assigner à ça, c'est asseoir son contrôle, son pouvoir, ses privilèges en tant qu'individu ET en tant que couple. Le contraire de ce que devrait être, à mon sens, le polyamour.

(…)

Lire la 2ème Partie : « Poly yes ! », « Polyamour 2.0 » : la question du consentement relationnel. 2/2.


Plan de la 2ème Partie :
III. La question du choix.
IV. Et si on essayait vraiment ?
Conclusion
Pour aller +loin




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1 réaction à cet article (la dernière il y a 3 ans)

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