Habitat et non-monogamies
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artichaut
le lundi 22 avril 2024 à 14h31
Je me suis fait une réflexion récemment : je me suis demandé si ma manière de me rapporter à l’habitat, si ce que je cherchais à explorer n’était pas… un habitat non monogame ?
— peut-être que ça pourrait devenir le sujet d'un article, pour l'instant, je balance un peu mes idées en vrac —
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artichaut
le lundi 22 avril 2024 à 14h31
Que serait un « habitat monogame » (c’est à dire une manière d’habiter qui soutien les fondements systémique de la monogamie) ?
- habiter en couple, et même, dormir dans le même lit
- habiter avec sa famille nucléaire (les enfants tant qu’ils sont mineurs, à leur majorité ils/elles sont censé·e·s elles/eux aussi fonder un couple et faire famille ; sauf exception et à condition de ne pas remettre en question la hiérarchie du couple sur les autres personnes habitantes, la famille élargie ne rentre dans ce shéma)
- habiter seul·e ou avec des non-partenaires, si et seulement si la situation est post-vie-de-couple-éternel (veuf/veuve, quoique qu’on soit alors incité à rejoindre un établissement dédié) ou clairement provisoire (étudiant·e, célibataire-frustré·e-cherchant-à-se-mettre-en-couple, divorcé en attente de remariage, etc)
- habiter en couple et avoir une garçonnière secrète pour ses aventures extra-conjugales.
La prééminence du couple, la hiérarchie, la bulle intime préservée (au sens du système monogame le privé n’est pas politique) autour de la famille (affirmant autorité, et même contrôle, des parents sur leur progéniture). Le bien est de préférence acheté pour, comme le mariage, ancrer les choses dans une durabilité. Il est possible de posséder un ou plusieurs autres logements (maison de vacances, investissement locatif…) à condition qu’une hiérarchie claire existe entre ces différents logements : il y a le logement principal, et les résidences secondaires.
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artichaut
le lundi 22 avril 2024 à 14h31
Que serait un « habitat non monogame » (c’est à dire une manière d’habiter qui remet en cause — au moins en partie — les fondements systémique de la monogamie) ?
- habiter seul·e (de manière volontaire et assumée)
- co-habiter (coloc, habitat groupé…) avec des ami·es ou des personnes choisi·e·s
- habiter en couple mais avec d’autres personnes en plus (ami·es, frangin·e·s, autres couples…) et sans chercher à installer une hiérarchie d’un couple sur les autres personnes habitantes.
- squatter (qui non content de remettre en cause le système monogame, remet en question la notion de propriété ; même si la dimension provisoire de la plupart des squats, peut être « acceptable » d’un point de vue du système monogame)
- être locataire éternel·le (alors qu’en soi la situation financière permettrait — quitte à quelques sacrifices — d’acheter)
- être en couple (même mono) et habiter dans des logements séparés.
- habiter à temps partiel, chez/avec différentes personnes (éventuellement plusieurs relations), de manière non-cachée.
- habiter dans plusieurs logements, sans hiérarichie particulière entre ces logements (par exemple habiter tantôt en camion, tantôt en dur)
- etc
et peut-être
- être (amoureusement) séparés et continuer à habiter ensemble (sauf à se sacrifier pour les enfants).
Un « habitat non monogame » c'est à la fois un habitat pas en couple (et donc plutôt solo, en coloc, etc), mais c'est aussi des modalités d'habitat qui ne totalise pas toutes les envies d'habitat que l'on peux avoir, qui ne met pas tous ses oeufs dans le même panier. Et donc ça peut-être un habitat pas-à-temps-plein, un habitat non-exclusif, etc.
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artichaut
le lundi 22 avril 2024 à 14h31
Je relisais récemment Mona Chollet, et malgré son indéniable capacité à vulgariser certains concepts féministes, je la trouve quand même un peu réac.
Elle se positionne clairement contre la non-exclusivité amoureuse dans « Réinventer l’amour », et dans « Chez soi », j'ai été déçu qu'après tous ces chapitres, elle arrive au bout du compte, à la fin du livre, à… « Imaginer la maison idéale »…
J’ai le sentiment que, de même qu'on peut avoir tendance à chercher LA relation affective (pour ne pas dire amoureuse et sexuelle) censée résoudre tous nos problèmes affectifs jusqu'à la fin de nos jours, de même on peut avoir tendance à chercher LA maison, censée résoudre tous nos problèmes d'habitat, réussissant à combler toutes nos velléités d'habitat (réunissant plein d'enjeux affectifs) jusqu'à la fin de nos jours.
Cette réflexion m’a apporté un éclairage neuf sur des choses sur lesquelles je bloque depuis pas mal d’années et dans lesquelles j’ai pu me fourvoyer. Un certain totalitarisme de l’habitat.
Là où au niveau affectif, je me suis créé au fil des ans, un genre de patchwork relationnel (j’ai cessé d'attendre une relation idéale unique, pour me créer une constellation personnalisée, multiple et toujours en mouvement) j'ai le sentiment d'avoir eu plus de mal à lâcher ce mythe au niveau habitat.
J'ai le sentiment que me dire qu'en matière d'habitat, comme en matière relationnelle, rien n'a à être normé et rien n'est éternel, me ré-ouvre des possibles, me redonne du pouvoir.
Il ne sagit pas tant d'accepter (me résoudre à) une précarité habitationnelle — comme j'ai pu avoir le sentiment qu'on me renvoyait à une précarité, quand à mon mode de vie affectif — que de (ré)ouvrir une porte sur un monde des possibles,
Au demeurant ce sont surtout les autres qui nomment ma vie précaire. Car je refuse certains normes, que le système considère comme la manière sécuritaire de vivre.
Au même titre que la notion de célibataire appartient au système du couple et de la monogamie, la notion de "précarité" appartient au système capitaliste et monogame. C'est une manière de se positionner ou d’être positionné·e à l’intérieur de la grille de lecture du capitalisme.
Je ne sais, au final, si je veux revendiquer la précarité (affective, émotionnelle, relationnelle, habitationnelle, financière…) ou si je veux me détacher de ce mot, pour me détacher des concepts péjoratifs et stigmatisants qu'il récèle.
Ça dépend des contextes, peut-être.
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artichaut
le lundi 22 avril 2024 à 14h31
Si on reprend ce que Brigitte Vasallo dit de l'amour monogame, qu'il possède 3 caractérisques : il est censé être unique, exclusif et éternel.
alors un habitat non-monogame serait
- ni unique (j'ai eu d'autres habitats avant, j'aurais d'autres habitats après)
- ni exclusif (on peut avoir plusieurs habitats simultanément)
- ni éternel (aucun habitat n'a la garantie d'être "pour la vie")
ou relationellement
- ni unique (j'ai habité avec d'autres avant, j'habiterais avec d'autres après)
- ni exclusif (on peut habiter à plus qu'en couple, à plus que la seule famille nucléaire)
- ni éternel (nous n'habiterons pas toujours ensemble)
Habiter ensembe, comme dormir ensemble, partager du sexe ensemble, ou se projeter toute la vie ensemble, fait partie de ce symbolique censé asseoir, valider et garantir ton existence, ta sécurité, mais qui en réalité valide le système dans lequel il s'inscrit.
Renoncer à l'un (habiter ensemble, dormir ensemble, partager du sexe, se projeter toute la vie, etc) semble remettre en cause toute la relation. Pourtant aucune relation n'est figée, et elle ne devient à chaque instant, que ce qu'on en fait.
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artichaut
le lundi 22 avril 2024 à 14h50
En ce moment je me pose aussi la question de l'habitat à très courte durée : peut-on habiter ensemble, un week-end, une semaine, un mois… ?
Je ne parle pas de passer des vacances ensemble, mais bien d'habiter ensemble.
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Sinon quelques fil de discussion sur le forum à propos d'habiter :
- Vivre en groupe, janv 2010
- Comment organiser la maison ?, juin 2012
- Recevoir d'autres poly-voyageurs, juillet 2013
- Quelles bases pour une vie de groupe réussie ?, janv 2014
- Vivre à plusieurs, juillet 2016
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Lili-Lutine
le lundi 22 avril 2024 à 15h59
Tes réflexions, @artichaut, sur l'habitat non-monogame résonnent vraiment avec mon expérience personnelle et m’ouvrent surtout de nouvelles perspectives de réflexions !
En tant que personne non-monogame depuis des années, j'ai également exploré différentes formes d'habitat et j'ai constaté à quel point cela peut être lié à mes choix relationnels et à mes besoins individuels
Personnellement, en tant qu'autiste, j'ai une relation particulière avec mon lieu de vie :-D
Pour moi, mon habitat est comme une grotte ressourçante, un refuge essentiel
En vieillissant, ce besoin personnel semble même s'accentuer de manière exponentielle chaque année qui passe
J’ai un besoin profond d'ordre, de calme et de stabilité dans mon environnement matériel :-D
Chaque objet et chaque meuble a sa place attitrée, aménagée de façon pratique et confortable, et j'ai bien du mal avec les changements de disposition :-/ :-D
Les changements dans l'organisation de mon logement peuvent perturber mon équilibre mental
C'est pourquoi je trouve difficile, voire impossible, de cohabiter longtemps avec des personnes dont le mode de fonctionnement est différent du mien
Cependant, la rencontre avec mon partenaire de nid @Fred-Lutin a été une découverte inspirante
Bien que je n'aie jamais vraiment souhaité partager mon espace de vie, sa nature solitaire et indépendante a su me convaincre d'explorer cette expérience de cohabitation
Avec lui, je me sens respectée dans ma liberté d'action et mes espaces privés sont préservés sans avoir de compte à rendre
@Fred-Lutin partageant son temps entre deux foyers depuis quelques années, cela me laisse encore plus d'espace et de temps précieux pour moi-même
Chez moi en solo, je peux choisir entre des journées de tranquillité totale, des moments passés en compagnie de proches que j'affectionne, ou encore de me plonger dans divers projets et loisirs
Ce qui fait que l'ennui chez moi ne se manifeste jamais, même lors de longues périodes seule passées à la maison sans voir personne
En somme, j'ai l'impression d'avoir un logement à mi-temps rien que pour moi, ou un partenaire de nid en garde alternée :-D avec ma copartenaire ou métamour, ce qui me convient parfaitement à ce jour
Je comprends l'importance et l'urgence de réfléchir à des formes d'habitat qui soutiennent nos choix de vie non-conventionnels, surtout il me semble en vieillissant, et en envisageant le besoin de soutien et de solidarité autour de nous
Peut-être que dans le futur, je serai prête à cohabiter à plein temps avec plus d'une personne, mais pour le moment, l'idée me stresse un peu :-(
De plus, il est crucial de reconnaître que trouver un logement dans lequel on se sent bien est souvent peu accessible financièrement...
Ajouter d'autres personnes avec d’autres fonctionnements à cette équation, pour moi cela peut complexifier davantage les choses
Si un jour je me trouve dans une situation matérielle précaire (et j'y ai déjà réfléchi), je choisirai toujours je pense un petit studio plutôt qu'une belle chambre dans un grand appartement à partager
Sur le plan politique, il me semble essentiel de remettre en question les normes et les structures sociales qui dictent notre façon de vivre et d'habiter
Les modèles d'habitat monogames perpétuent souvent des hiérarchies oppressives et des privilèges inégaux
En optant pour des formes d'habitat non-monogames tels que tu le proposes par exemple @artichaut, nous défions ces normes et nous nous engageons dans des pratiques plus inclusives et égalitaires, ce en quoi je suis totalement convaincue
En conclusion, je pense qu'il est important de rester à l'écoute de nos besoins individuels et de tenter, quand cela est possible, de ne pas nous conformer à des modèles d'habitat qui ne nous correspondent pas
Le plus important, pour moi en tout cas, c’est de tenter de trouver son propre havre de paix, peu importe sa durée, la forme qu'il prend ou avec qui, n'est-ce pas?
Message modifié par son auteur il y a un an.
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artichaut
le lundi 22 avril 2024 à 17h31
Lili-Lutine
Je comprends l'importance et l'urgence de réfléchir à des formes d'habitat qui soutiennent nos choix de vie non-conventionnels, surtout il me semble en vieillissant, et en envisageant le besoin de soutien et de solidarité autour de nous
Oui, c'est tout à fait ça.
C'est aussi dans mes réflexions : comment on aborde la vieillesse avec ces questions-là ?
Lili-Lutine
De plus, il est crucial de reconnaître que trouver un logement dans lequel on se sent bien est souvent peu accessible financièrement...
Oui et non. On a beaucoup de faux a priori sur le sujet, je trouve.
Ou bien on tend à inverser des logiques. Un peu dans le même esprit que pour les relations.
À force de chercher quelque chose de pré-pensé, pré-construit (et souvent d'hyper normé) on finit par se convaincre qu'il n'y a pas d'autres possibles.
J'ai, par exemple, plusieurs fois habité dans des logements gratuits, et ce n'était pas, de loin, les moins confortables…
Après si tu veux LE truc à fond dans la norme (donc que tout le monde veut), oui ça demande des sous.
Idem que pour les relations : vu que tout le monde cherche la même chose, ça donne le sentiment d'une pénurie (cf les plaintes à répétition, ici sur le forum, ou partout ailleurs).
Lili-Lutine
Si un jour je me trouve dans une situation matérielle précaire (et j'y ai déjà réfléchi), je choisirai toujours je pense un petit studio plutôt qu'une belle chambre dans un grand appartement à partager
Habiter seul·e fait complétement partie, selon moi, des solutions "non-monogames".
Lili-Lutine
Sur le plan politique, il me semble essentiel de remettre en question les normes et les structures sociales qui dictent notre façon de vivre et d'habiter
Les modèles d'habitat monogames perpétuent souvent des hiérarchies oppressives et des privilèges inégaux
Oui, c'est ce dont je me rend compte de plus en plus.
Lili-Lutine
Le plus important, pour moi en tout cas, c’est de trouver son propre havre de paix, peu importe la forme qu'il prend ou avec qui, n'est-ce pas?
Je ne suis pas sûr de croire au concept de havre de paix (et pourtant, je suis comme toi, j'ai besoin de mon lot de calme et de solitude), ou alors avec la conscience de quelque chose de temporaire. Car dans havre de paix, je vois quelque chose d'idéalisé et censé durer éternellement.
C'est peut-être cette notion de temporaire, de non-permanent — d'impermanence pourrait-on même dire —, qui me semble significative.
J'ai le sentiment qu'on cherche sans cesse à fuir ou nier cet aspect non-permanent et toujours en mouvement de la vie.
Et qu'à force de fuir, on finir par s'enfermer dans des relations toxiques ou des modalités d'habitat qui ne nous correspondent pas.
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Lili-Lutine
le lundi 22 avril 2024 à 17h44
artichaut
Je ne suis pas sûr de croire au concept de havre de paix (et pourtant, je suis comme toi, j'ai besoin de mon lot de calme et de solitude), ou alors avec la conscience de quelque chose de temporaire. Car dans havre de paix, je vois quelque chose d'idéalisé et censé durer éternellement.
C'est peut-être cette notion de temporaire, de non-permanent — d'impermanence pourrait-on même dire —, qui me semble significative.
J'ai le sentiment qu'on cherche sans cesse à fuir ou nier cet aspect non-permanent et toujours en mouvement de la vie.
Et qu'à force de fuir, on finir par s'enfermer dans des relations toxiques ou des modalités d'habitat qui ne nous correspondent pas.
@artichaut, en fait, ce que tu dis sur le havre de paix, tel que je l'ai décrit, je partage ton point de vue et ton ressenti
J'aurais dû ajouter la durée en plus du reste pour cette dimension très juste d'impermanence !
Pour moi mon havre de paix il est parfois aussi à l'intérieure de moi quand justement je me sens bien dans ma grotte, bien loin du monde extérieur ahaha :-D :-D et cela ne m'arrive pas tous les jours :-D
Je l'écrirais ainsi (je vais modifier dans ma conversation plus haut) :
"Le plus important, pour moi en tout cas, c’est de tenter de trouver son propre havre de paix, peu importe sa durée, la forme qu'il prend ou avec qui, n'est-ce pas?"
Du coup ce n'est toujours pas parfait ma formulation de mon point de vue, je vais cogiter tout cela ;-)
Message modifié par son auteur il y a un an.
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April
le mardi 23 avril 2024 à 21h41
Je trouve ces réflexions très inspirantes...
mon conjoint et moi vivons séparément depuis quelques mois; j'ai expérimenté plein de solutions de logement temporaires, location de chambre chez propriétaire, alterner une semaine sur deux dans un loft et l'autre semaine dans ce qui est encore ma maison, pour que ma fille ne change pas de lieu de vie, puis location de plusieurs semaines dans une maison où la proprio était partie en vacances prolongées, et depuis peu...location classique.
je crois que j'avais besoin de ces changements de lieux de vie pour réouvrir le champ des possibles, pour réfléchir à ce qui me conviendrait le mieux aussi...
j'avoue que j'espérais probablement inconsciemment que mon conjoint ait un déclic et qu'il accepte qu'on consulte ensemble pour "réinventer quelque chose ensemble"...c'est pourquoi je choisissais des solutions provisoires - d'ailleurs, là j'ai pris un appart et signé un bail d'un an, mais les proprios me laissent la possibilité de quitter avant, si je le souhaite...
Perso j'ai une brique dans le ventre, je suis architecte d'intérieur de formation, et toute ma carrière s'est construite autour de ces questions du logement...le logement qu'on imagine et conçoit, l'urbanisme, l'immobilier, et maintenant l'accès aux logement pour les plus précaires - j'aide les SDF et personnes en situation de grande fragilité à trouver un logement pérenne...
je rejoins lili-lutine dans sa vision de lieu à soi - cocon- où chaque chose est à sa place...c'est probablement ce qui me rassure dans cette séparation, et me plait aussi, pouvoir me réapproprier mon espace sans devoir subir la présence de l'autre...C'est un peu violent comme je le formule, mais j'ai l'impression que j'ai besoin de ces moments de vie seule...
pour ma part, le divorce, amorcé par cette séparation, s'accompagnera de renoncement à la maison que j'ai imaginée et conçue personnellement. C'est une vraie déchirure et je me suis jurée de devenir seule propriétaire sans tarder. c'est dans ces moments de séparation que les écarts de niveau de vie se creusent entre ex époux. et c'est souvent les femmes qui sont perdantes...
je trouve que ce qui a été déposé ici par rapport à ces réflexions autour des habitats non monogames, l'enjeu de la vieillesse, la notion d'habitat qui devrait pouvoir évoluer avec les changements de vie relationnelles et personnelles offre une belle matière à réflexion...je crois que ça va nourrir la mienne, moi qui essaie de me projeter dans une nouvelle habitation à " investir "...
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Hestia
le dimanche 05 mai 2024 à 09h20
A la base, dans mon esprit, mon habitat idéal c'eût été forcément une maison pour un couple (genre moi et mon conjoint) et nos enfants. Puis finalement, après évolution, nous sommes parti.e.s sur un projet d'habitat collectif avec une amie (2 maisons séparées mais extérieurs communs, et l'idée de rajouter une troisième famille).
Et puis séparation, donc j'ai déménagé en "semi-coloc" chez notre co habitante (j'ai l'étage, elle le rez de chaussée, donc pas de pièces partagés a part l'entrée mais vu l'absence d'isolation phonique on partage beaucoup (trop) de choses ;).
Une troisième famille est venue s'installer a temps partiel sur le lieu (itinérance en camping car, ils sont là 2 fois 3 mois par ans).
Je tatonne depuis 2 ans dans mes expériences de polyamour.
Et si j'oeuvre a rénover une troisième partie de bâtiment pour avoir une maison à moi, parce que la coloc c'est pas mon truc (surtout avec 2 enfants), je me pose la question de re-vivre un jour avec un.e amoureux.se....
Donc ce poste m'a bien fait cogiter. Je crois que actuellement l'idéal "pour moi", ce serait :
- Un logement individuel dans un habitat collectif (histoire d'avoir des gens que j'apprécie autour de moi)
- Dans le même lieu de vie que le père de mes enfants. Ça fait bosser sur la communication, surtout après la separation, mais pour les enfants, c'est vraiment pratique. Et puis même. Je ne suis plus amoureuse de lui, mais comme co-habitant, je suis ravie de partager ce quotidien avec lui.
- idéalement avec mon/mes relations amoureuses qui logent aussi sur le collectif, mais pas chez moi. Pour l'instant ce n'est pas le cas, mais je crois que je me suis habituée à vivre "seule" et ça me semblerait compliqué de devoir partager un lieu de vie avec quelqu'un tout en ayant d'autres relations amoureuses... Ou alors une vie commune quand les enfants seront partis du nid, parce que là, on est quand même 2 enfants, 1 adulte, 1 chat et 2 a 3 chiens dans la maison, et ça fait déjà beaucoup de rythmes différents et de relations a nourrir. Donc vivre a 2 pourquoi pas ... Mais pas tout de suite 😂
Sinon je me verrais bien tenter le nomadisme a pied ou en velo avec un point de chute (genre pour l'hiver). Mais la aussi ça m'interroge sur la continuité des liens humains (amicaux, amoureux, parentaux ...). Ou l'habitat léger en gardant l'idée d'un collectif mais avec chacun son logement propre...
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(compte clôturé)
le dimanche 05 mai 2024 à 09h59
De mon côté je suis née dans une famille où on départ on avait pas les moyens d'avoir des espaces privés...notamment pas de chambre "à soi" ....mes parents ayant eux mêmes eu les mêmes difficultés (ou forces) ...l'espace vitale chez moi c'est avant tout mettre le nez au dehors....je sais donc me contenter d'espaces pas forcément confortables mais il faut quand même qu'il y fasse chaud 😊...
J'ai habité de différentes façons mes lieux de vie et mes relations...j'ai tenté la vie de couple en chambre séparée avec la charge mentale du quotidien de l'entretien du lieu puis j'ai longtemps vécu seule et aussi en colocation...tjs en louant les lieux car je n'ai jamais rêvé d'avoir une maison à moi...surtout pas en étant seule..c'est une telle charge mentale pour moi ! Je crois sincèrement que la maison individuelle est un luxe qui va tendre à disparaitre ne serait ce que parce que l'urgence climatique et le marché du foncier nous y pousse..je lis pas mal de choses à ce sujet et par ici en Bretagne les politiques se sont bien appropriés le sujet et les habitats légers collectifs fleurissent ... actuellement j'habite une maison dont je paie le crédit chaque mois en engraissant ces foutus banquiers...je vis seule mais je partage de tps en tps une colocation d'appoint (en priorité pour des femmes voyageuses) mais clairement oui j'ai bien pour objectif de repartir en habitat partagé et je pense que mes amoureux.ses me soutiennent dans ce projet.Ce n'est pas forcément le cas de tous.tes mes ami.e.s mais de tte façon pour moi c'est non négociable...je n'aime pas habiter seule.
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artichaut
le dimanche 05 mai 2024 à 13h52
En vous lisant plusieurs réflexions me sont venues.
Je me suis demandé si socialement il n'y avait pas un changement de paradigme en train de s'opérer dans nos processus d'habitats (en Bretagne bien sûr, et partout ailleurs).
Le rêve de la maison idéale (pas seulement celui de l'habitat monogame et de la vie nucléaire) mais aussi tout simplement celui de se projeter dans un habitat idéal, est-il révolu ? Comme si une certaine précarité habitationnelle était aujourd'hui de mise, inévitable, et que plutôt que la fuir, ne vaut-il mieux pas s'en emparer. Nous n'habiterons jamais dans notre habitat idéal (notre paradis habitationnel), alors vivons simplement, et valorisons ce que nous avons déjà.
Je me suis aussi demandé quel rôle joue l'urgence climatique dans nos modifications habitationnelles et relationnelles ?
Enfin je me suis demandé si l'on pouvait rénover nos relations, de même que l'on peut rénover une maison ? Autrement dit, comment le champ lexical de l'un peut ouvrir de nouvelle façon de penser en l'autre ?
"Rénover nos relations", ce serait partir de l'existant, (re)valoriser ce qui existe déjà. Au lieu de toujours aller chercher ailleurs, l'herbe soit disant plus verte.
Plein de questions.
Merci pour vos messages qui viennent nourrir mes réflexions autant que mes rêveries sur le sujet (rêveries plutôt que RÊVE).
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artichaut
le dimanche 05 mai 2024 à 14h01
Il y a-t-il une polyhabitation (habiter à plusieurs, et/ou avoir plusieurs types d'habitats en même temps) ?
Mais n'y a-t-il pas un risque dans cette idée de polyhabitation, de se faire avoir au jeu de l'habitat idéal (au jeu de l'idéalisation), qui deviendrait non pas un seul et unique habitat rêvé, mais plusieurs habitats rêvés, avec autant de confort que l'habitat unique précédemment rêvé. Démultipliant, comme en polyamour, les problèmes, les fantasmes, les frustrations et les déceptions.
Comment penser la non-monogamie (relationnelle, habitationelle) sans se faire avoir au jeu du capitalisme, du toujours plus plus plus, de l'herbe plus verte ailleurs, des relations jetables, …et ainsi de suite… ?
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(compte clôturé)
le dimanche 05 mai 2024 à 17h35
artichaut
En vous lisant plusieurs réflexions me sont venues.
Je me suis demandé si socialement il n'y avait pas un changement de paradigme en train de s'opérer dans nos processus d'habitats (en Bretagne bien sûr, et partout ailleurs).Le rêve de la maison idéale (pas seulement celui de l'habitat monogame et de la vie nucléaire) mais aussi tout simplement celui de se projeter dans un habitat idéal, est-il révolu ? Comme si une certaine précarité habitationnelle était aujourd'hui de mise, inévitable, et que plutôt que la fuir, ne vaut-il mieux pas s'en emparer. Nous n'habiterons jamais dans notre habitat idéal (notre paradis habitationnel), alors vivons simplement, et valorisons ce que nous avons déjà.
Je me suis aussi demandé quel rôle joue l'urgence climatique dans nos modifications habitationnelles et relationnelles ?
Enfin je me suis demandé si l'on pouvait rénover nos relations, de même que l'on peut rénover une maison ? Autrement dit, comment le champ lexical de l'un peut ouvrir de nouvelle façon de penser en l'autre ?
"Rénover nos relations", ce serait partir de l'existant, (re)valoriser ce qui existe déjà. Au lieu de toujours aller chercher ailleurs, l'herbe soit disant plus verte.
Plein de questions.
Merci pour vos messages qui viennent nourrir mes réflexions autant que mes rêveries sur le sujet (rêveries plutôt que RÊVE).
Si il y a clairement un changement de paradigme imposé par le monde que personnellement je subis, et vivre en campagne ne me met pas plus à l'abri que les autres (climat, inflation,guerres...), cela est fortement anxiogéne chez moi et la seule réponse que j'ai à mon niveau c'est de me rapprocher de collectifs...je suis largement prête à faire des concessions sur ma vie quotidienne et à renégocier certaines de mes aspirations passées, déjà parce que j'ai déjà testé pas mal de choses...ça peut paraître étonnant mais je pense que certaines villes sont certainement plus à même de répondre à mes attentes plutôt que la campagne idéalisée ...pour faire état rapide des lieux par ici en campagne beaucoup de femmes de mon âge et plus agées subisssent une énorme précarité et vivent dans des maisons insalubres, mal isolées, etc etc....et ce n'est pas la solidarité entre voisinage qui répondra à cela mais vraiment une politique locale de prise en compte de toutes nos difficultés cumulées....associées bien évidemment à nos réflexions personnelles sur le sujet....
mais oui je crois sincérement que si nous de travaillons pas là dessus nous allons clairement en souffrir
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Alabama
le dimanche 05 mai 2024 à 22h52
Ça me parle, cette réflexion sur l'habitat non-monogame.
J'ai réalisé ces derniers mois, que toutes mes amies, à l'exception d'une seule, vivent en couple hétéro. Je ne m'en étais pas clairement rendu compte avant.
Cela m'a foutu une grosse claque. J'ai eu le sentiment que l'entité couple me renvoyait à la marge, comme quelque chose d'un peu inéluctable. Je ne m'en étais pas rendu compte car mes amies donnent par ailleurs beaucoup de place à leurs amitiés, leurs couples ne sont pas des entraves aux liens que nous tissons. Mais malgré tout, la norme monogame et hétéro est bien là (elles sont toutes bi, en plus...). Cela m'a découragée, et à la fois j'ai mieux compris pourquoi je galère tant à trouver des personnes intéressées par un habitat collectif autour de moi.
Je me pose aussi de plus en plus la question de l'habitat de quand je serai vieille et moins alerte. J'aimerais y trouver une solution avant d'être au pied du mur.
Pour l'instant je n'ai pas vraiment de réponses.
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Cactusenbleu
le mercredi 08 mai 2024 à 10h03
Bonjour,
Premier post et pour l’anecdote, vrai premier post internet de toute ma vie, et je vais fêter mes 40 ans dans quelques jours.
Je suis cis, pan ou bi comme on dit, J’ai eu des relations Hétéros, fidèles et infidèle, je suis en crise de couple avec une femme, relation libre poly deux ans, puis mono a sa demande, puis mono asexuelle. Explorons la sensualité ma chérie, à sa demande. Et actuellement ça ne me va plus, ça a évolué vers du rien du tout physiquement, notamment parce que nous rénovons une maison et que cela provoque beaucoup beaucoup de charges intellectuelles et nous en laisse peu pour nous. Peut-être que cela évoluera en rupture. Peut-être cela évoluera tout court, car il y a beaucoup d’amour entre nous. Des mots sont posées et nous allons démarrer une thérapie familiale pour nous aider à élargir la réflexion fin mai.
Pour le sujet du fil, nous habitons actuellement séparément, elle dans la maison déjà partiellement rénovée et moi dans ma maison initiale. Notre crise vient du fait que je dois l’y rejoindre, puisque les travaux s’achève cet été, Théoriquement en couple exclusif.
Nous avons imaginé cette maison avec des chambres, pour l’instant pour nos enfants, mais suffisamment grandes et indépendantes pour la faire évoluer en maison partagée à l’avenir.
Maison écolo, potentiellement autonome, et potentiellement superficie permettant un grand potentiel de variations d’habitats légers dans le jardin, partie restant à aménager pouvant être un habitat indépendant…
Mes peurs, frustrations et angoisses de me sentir « coincé », malgré tous ces possibles, font que ces questions de comment habiter ensemble sont prioritaires actuellement.
Il me semble que les éléments apportant sécurité affective à chacun, partant du principe qu’il faut d’abord être bien pour soi, afin d’ être disponible pour d’autres, nécessite un lieu où l’on se sente bien.
La propriété étant un concept patriarcal et capitaliste, certes, mais permettant de s’affranchir de l’avis d’un autre propriétaire. Dans tous les cas, hors squatt, avoir un lieu fixe, implique donner de l’argent à quelqu’un d’autre, individu ou banquier tant que nous fonctionnerons dans un système monétaire.
J’arrive donc à la conclusion que le bonheur, l’amour et l’habitat pourrait idéalement, être basé sur la communication, la souplesse d’évolution et le respect de chacun
Mais en pratique c’est bien compliqué, dans notre société aujourd’hui, Et je suis du genre pragmatique, à avoir besoin de réponses concrètes pour me projeter.
quels espaces partagés ? Des espace individuel, chambre ou pièce de vie ? Quel contrat ou accord pour le partage des frais ? Pour le partage des tâches communes?
À titre d’exemple : mon frère, ayant été en habitat collectif, nous avons bien rigolé (lui jaune) lorsque son colocataire lui a dit, vas-y, fais le ménage si tu en ressens le besoin, ça ne me pose pas de problème,..
Ça fait beaucoup de choses à réinventer, je n’ai rien trouvé comme support de livres, sur l’habitat, communication ou politique, ou… pour organiser ma pensée, et savoir par où commencer!
Je vous livre donc plutôt mes réflexions que des questions précises, mais j’ai vu que les échanges s’y prêtent.
Merci à vous
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artichaut
le mercredi 08 mai 2024 à 15h56
Cactusenbleu
Bonjour,
Premier post et pour l’anecdote, vrai premier post internet de toute ma vie
Et bien tu m'en vois flatté, d'avoir proposé une discussion qui te donne envie de contibuer !
Bienvenue ici @Cactusenbleu.
Ton message, et des réflexions en cours, me donne envie de noter ceci : parmi mes plus beaux souvenirs (et j'ai le sentiment de voir ça chez les autres aussi) il y a ces moments où nous étions dans la dèche, où nous vivions soit avec très peu d'argent, soit dans un tout petit appartement, soit sans aucune stabilité en terme de durabilité… et ça m'invite à en remettre une couche sur cette notion de "précarité".
Je constate que les populations précaires sont parfois +heureuses que des populations parvenues et/ou embourgeoisées. Je dis pas que c'est pas difficile d'être précaire (affectif, financier, habitationnel…), mais je me demande ce que deviennent, une fois atteint, ces fantasmes/injonctions/projections/mirages/buts/intuitions/convictions/désirs* d'atteindre une stabilité (relationnelle avec la relation monogame et/ou socle et/ou amoureuse et/ou sur la durée ; et habitationelle avec "un lieu où l’on se sente bien" etc). Et je constate plutôt que c'est pas si simple, jamais si simple.
Paradoxalement, les personnes "parvenues" (à un début de quelque chose ressemblant à leur idéal) que je vois, ne me semblent pas plus heureuses pour autant. Avoir enfin une maison avec plein de place peut exacerber le sentiment de solitude, une situation professionnelle stable manquer cruellement de piment, une relation socle devenir triste à mourir etc, etc.
Sans dire qu'on est mieux dans la précarité que dans le confort bourgeois, j'ai juste l'impression que la vérité est ailleurs.
Et j'ai le sentiment qu'on perds beaucoup de temps et d'énergie, à bloquer sur ce qui ne sont peut-être que des formes de… vanités.
*barrer les mentions inutiles
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Alabama
le mercredi 08 mai 2024 à 18h49
artichaut
Je constate que les populations précaires sont parfois +heureuses que des populations parvenues et/ou embourgeoisées. Je dis pas que c'est pas difficile d'être précaire (affectif, financier, habitationnel…), mais je me demande ce que deviennent, une fois atteint, ces fantasmes/injonctions/projections/mirages/buts/intuitions/convictions/désirs* d'atteindre une stabilité (relationnelle avec la relation monogame et/ou socle et/ou amoureuse et/ou sur la durée ; et habitationelle avec "un lieu où l’on se sente bien" etc).
Bon, je me demande sur quoi tu te bases pour dire ça.
J'habite un village où il y a pas mal de gens précaires, voire extrêmement précaires, et honnêtement, ça respire pas du tout, du tout le bonheur. Plutôt l'inverse même. Donc je suis un peu mal à l'aise avec ce type de cliché (oui c'est un cliché). Je ne dis pas que être pauvre c'est forcément être malheureux. Certainement pas. Mais que je ne vois pas plus de bonheur parmi les pauvres que parmi les gens embourgoisés, pour ceux que je connais.
Moi-même, parmi les moments difficiles de ma vie, je peux citer les moments où je n'avais pas de logement et où j'étais hébergée, dans de la famille où je ne me sentais pas du tout chez moi.
Je kiffe encore plus ma vie depuis que je gagne plus d'argent. Je ne pensais pas kiffer comme ça les sous, mais franchement, on m'avait menti, l'argent c'est grave bien.
J'ai l'exemple de ma tante et mon oncle, de familles d'ouvriers tous les deux, qui petit à petit ont réussi à se payer la maison de leurs rêves, avec le confort matériel et tout, c'est pas mon trip, mais ils ont l'air super contents de leur vie, franchement ils ont l'air heureux.
Peut-être que ce qui me paraît plus vrai, dans ce que tu dis, c'est qu'on est plus heureux bien entouré. Et que la précarité peut forcer à habiter plus proches les uns des autres, et donc créer une forme de joie à se soutenir, à faire des repas ensemble etc... Ce qui m'intéresse moi, c'est comment construire ce type de vie communautaire sans pour autant devoir vivre précairement donc mal.
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artichaut
le mercredi 08 mai 2024 à 20h45
Alabama
Et que la précarité peut forcer à habiter plus proches les uns des autres, et donc créer une forme de joie à se soutenir, à faire des repas ensemble etc...
Oui, il y a de ça, mais pas que.
Dans mon parcours, ce à quoi ça me renvoie, c'est aussi un truc où il y a plus d'urgence, donc on vit de fait beaucoup plus l'instant présent.
Il y aussi des questions qui ne se posent pas (moins de "problèmes de riches", si l'on veut), donc on vit plus facilement avec ce qui est là. Moins de choses accesibles à quoi il nous faudrait prétendre, moins d'acquis à défendre.
Et oui la proximité peut créer de la solidarité dans le fait d'affronter l'adversité ensemble.
Mais mon propos est plus vaste et plus existentiel, je dirais.…