Besoin de vos conseils
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Mary Oblique (invité)
le samedi 24 juillet 2021 à 13h42
POLY
Aussi loin que remonte ma mémoire quant à mes sentiments amoureux, j’ai été attirée par les garçons. Et aussi loin que remonte mon expérience amoureuse, j’ai eu des sentiments pour plusieurs d’entre eux. Pas nécessairement exactement les mêmes sentiments, souvent des colorations différentes, des émotions différentes, mais toujours avec ce truc dans le bide qui fait que tu ressens un élan fort et beau pour l’autre – les autres.
Quand ma vie amoureuse commence, au milieu des années 90, être amoureux signifie l’exclusivité sexuelle et sentimentale : l’amour devient alors synonyme de privation – indépendamment de la force de l’attachement pour la personne avec qui j’entretenais une relation monogame. Si j’éprouvais du désir et de l’attachement pour un autre, je le cachais : je « trompais ». Et il se trouve que c’est presque systématiquement arrivé. J’en nourrissais une énorme culpabilité : je faisais souffrir, je souffrais. Il fallait choisir, quitter l’un ou l’autre. Renoncer.
J’ai vécu cependant, entre mes 21 et mes 27 ans, une phase où j’ai renoncé au couple et à la fidélité, mais dans une forme tacite, un épanouissement secret : j’avais plusieurs amants, avec chacun une relation profonde, privilégiée. Certains savaient que je voyais d’autres gens, certains feignaient de l’ignorer – ou l’ignoraient vraiment (demeure à ce sujet une véritable incertitude). Ceux qui savaient se divisaient en deux catégories : la première regroupait ceux qui souffraient de la situation, plus ou moins en silence, avec des phases de crise où s’exprimait leur souffrance. La deuxième catégorie était celle des « tombeurs », qui avaient eux-mêmes d’autres conquêtes et les considéraient comme telles : ceux-là m’en parlaient abondamment, se plaisant à des comparaisons entre les autres et moi. Ni l’une ni l’autre de ces attitudes ne respectait réellement ni ma liberté et ni la sincérité de mes sentiments.
Quant à ceux qui ignoraient, ou feignaient d’ignorer, mon « profil amoureux » (est-ce seulement le bon terme ?), certains étaient jaloux, d’autres indifférents, mais en aucun cas je ne me sentais légitime à être engagée dans plusieurs relations sentimentales.
Il y a un an, alors à l’approche de la quarantaine et en couple monogame depuis 10 ans, je suis tombée amoureuse d’un autre homme. Cet état de fait a conduit à une séparation, dont le véritable motif n’était pourtant pas cette relation « extra-conjugale » : je me suis séparée parce que, après dix ans de bonheur, je n’étais plus – NOUS n’étions plus – heureux ensemble. La routine nous avait dévorés, nous vivions l’un à côté de l’autre, dans une solitude à deux, sans doute la pire qui soit.
Après cette douloureuse séparation – douloureuse parce que mes sentiments pour lui n’avaient pas changé, mais ne pouvaient plus trouver leur forme ni leur place dans la configuration d’une vie commune – j’ai décidé que je ne m’engagerais plus dans une relation monogame et j’ai choisi de l’expliciter. L’homme dont j’étais tombée amoureuse l’a compris, quoiqu’il ne l’ait pas totalement intégré : aujourd’hui encore, il considère que « je couche avec qui je veux », alors que la question n’est pas de coucher, mais d’aimer.
Depuis, j’ai repris une relation avec celui qui a partagé ma vie pendant 10 ans. Là aussi, j’ai explicité ma vision de l’amour et il l’a acceptée. Mais j’ai malgré tout peur, compte tenu de notre longue histoire commune, que les anciens schémas, devenus « réflexes », ne reviennent polluer la beauté de ce que l’on a. Je l’aime profondément, j’aime profondément l’autre, et je ne veux faire souffrir aucun des deux. J’ai l’impression qu’ils acceptent la situation par amour pour moi, et non par adhésion à ma vision de l’amour. Je suis très discrète sur mes relations en dehors de celle que j’entretiens avec chacun, car j’ai peur de blesser. Ni l’un ni l’autre ne pose de question là-dessus, pas plus que je n’en pose sur leurs autres relations (j’ignore s’il en ont, mais je leur ai clairement dit que je partais du principe que c’était le cas, leur bonheur et leur épanouissement étant la seule chose qui m’importe).
J’ai envie que ces deux histoires durent, et je ne sais pas ce qu’il faut faire dans ces cas-là : rappeler les « règles du jeu », de temps en temps ? Les considérer comme acquises ? Parler, ponctuellement et sobrement, de l’ « autre » ?
Si vous vivez une situation semblable, à savoir d’entretenir une relation polyamoureuse avec quelqu’un avec qui vous avez été dans une relation monogame, j’aimerais vos avis, conseils, témoignages, pour faire en sorte que tout cela n’apporte que bonheur, joie, et amour sincère, sans souffrance et sans frustration.
Merci d’avance pour vos retours.
Mary