[Lexique] Du polyamour et des termes du débat (ou le polyamour moins l'amour)
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LittleJohn
le jeudi 07 juillet 2011 à 12h11
Au fil des débats autour du polyamour, j'ai pu remarquer à plusieurs reprises que, confrontés à nos contempteurs, nous nous retrouvons souvent à utiliser leurs termes du débat ; que nous nous les laissons imposer.
On nous rapproche des libertins et, en réponse, nous nous démarquons des libertins. On nous dit qu'il s'agit de désir, nous répondons qu'il s'agit d'amour. On nous dit que ce n'est pas du vrai amour et nous nous retrouvons à donner des gages de réalité amoureuse, de sérieux, bref, de sainteté.
Alors que, finalement, l'enjeu du polyamour, c'est l'ouverture - la non-exclusivité relationnelle -, la liberté, l'honnêteté et la (possible) réciprocité, nous voilà à parler d'amour à tout bout de champ. Alors que d'amour il n'y a pas toujours, même si sa possibilité est là. En rentrant dans ce discours, nous disqualifions une partie des polyamoureux et semblons fermés, voire, dans certains cas, menteurs.
Nous ne devrions pas nous opposer au libertinage. Que le public voit celui-ci d'un mauvais œil ne devrait pas nous pousser, afin d'être acceptés, à nous ranger du coté du public contre le libertinage. Car, après tout, s'agissant de pratiques consensuelles entre adultes, nous devrions nous même œuvrer pour que ça ne soit plus regardée de travers.
Chaque argument contre le polyamour devrait nous amener à déconstruire son contexte, ses pré-supposés - moraux, sociaux et autres - plutôt qu'à essayer de nous justifier sur son terrain.
(et là, j'aimerais avoir plus de tallent d'écriture pour argumenter mieux mais j'espère au moins lancer un débat)
Message modifié par son auteur il y a 12 ans.
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LuLutine
le jeudi 07 juillet 2011 à 13h01
LittleJohn
Nous ne devrions pas nous opposer au libertinage.
Je n'ai pas le sentiment que les polyamoureux (du moins ceux que je connais) s'opposent systématiquement et farouchement au libertinage.
Moi-même, quand on me pose la question, je réponds que tous les polyamoureux ne sont pas libertins et que tous les libertins ne sont pas polyamoureux.
En gros, qu'il y a des polyamoureux libertins, des polyamoureux non libertins, des libertins polyamoureux et des libertins non polyamoureux (et aussi des non libertins non polyamoureux !). En résumé, que ce sont deux ensembles indépendants mais non disjoints !
Quand on m'en parle, je dis que je ne suis pas libertine, parce que c'est le cas, mais je précise bien que certains polyamoureux sont libertins et je n'ai jamais eu de jugement de valeur par rapport au libertinage.
Je n'ai pas l'impression que les poly que je connais réagissent très différemment de moi.
Des gens comme moi qui ne sont pas libertins ont juste envie d'être sûrs qu'on ne les confond pas avec des libertins, car polyamour et libertinage sont deux choses différentes. Tout comme je ne voudrais pas induire les gens en erreur en les laissant me confondre avec une star de cinéma (on peut remplacer "star de cinéma" par "femme de ménage", "sportive", "chanteuse", "boulangère", ou n'importe quoi d'autre que je ne suis pas), et ce alors que je n'ai absolument rien contre les stars de cinéma (ou femmes de ménage, sportives, chanteuses, boulangères...).
En conclusion, se démarquer du libertinage, ça ne me semble pas un problème, du moins pas de la façon dont je le fais (c'est-à-dire à titre purement individuel, en insistant sur la variété infinie des relations polyamoureuses).
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tattoo
le jeudi 07 juillet 2011 à 14h21
Que l'on dise que l'on est libertin ou polyamoureuse on est obligé de préciser...
Quand on est poly, il sufit d'expliquer ce qu'est le polyamour.
Que quand on est les libertins, il y a tellement de modèles entre les exib. les voyeuristes, les côteàcôtelismes, les mélangistes, les candaulistes, les échangistes, les bis, les triolismes....
autant de terme qui permet de faire comprendre ce que l'on cherche.
Personnellement je suis plus lutine que libertine, parceque je n'éprouve de l'attirance que quand j'ai des sentiments, mais j'aime aussi fréquenter les clubs libertins car j'aime beaucoup le regard des hommes, je ne suis que exibe dans le monde libertin et je ne fais que ça.
Et effectivement, les libertins qui pronnent beaucoup le liberté sexuelle, ne sont pas si libre que ça en comparaison de nous. Un couple libertin va se mettre des limites à ne pas dépasser.
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LittleJohn
le jeudi 07 juillet 2011 à 14h26
tattoo
Et effectivement, les libertins qui pronnent beaucoup le liberté sexuelle, ne sont pas si libre que ça en comparaison de nous. Un couple libertin va se mettre des limites à ne pas dépasser.
A la limite, on s'en fout !
Le truc, quand on nous rapproche des libertins, c'est que le sous-entendu est "c'est mal". À ça, plutôt que de répondre "oui mais non, nous c'est mieux, toussa" il faudrait demander "en quoi est-ce mal ?"... et démonter cet à-priori là.
Enfin, c'est mon point de vue perso.
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LittleJohn
le jeudi 07 juillet 2011 à 14h51
zina
Du coup, la seule solution que je vois, face aux boites qu'on nous propose en face...
...ne serait-ce pas d'essayer de s'affranchir des boites, toutes les boites ? ^^
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(compte clôturé)
le jeudi 07 juillet 2011 à 15h12
à Little John: tu dis Le truc, quand on nous rapproche des libertins, c'est que le sous-entendu est "c'est mal".
Ce n'est pas toujours vrai, je connais pas mal de gens qui pratiquent ou approuvent le libertinage mais s'interdisent d'être amoureux parce qu'ils y voient du danger pour "leur" couple. ( ce besoin d'adjectif possessif dès qu'on parle du couple...) Idem pour les couples échangistes: sexe, oui, mais pas de sentiment.
En revanche, je plussoie mille fois avec toi sur l'idée qu'effacer les étiquettes et les petites boîtes parce que chaque histoire est différente serait un bien... et éviterait pas mal de sodomies de coléoptères, dits aussi enculages de mouches :)
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(compte clôturé)
le jeudi 07 juillet 2011 à 20h46
Cette discussion me plait parce que :
- je fais partie des gens qui aimeraient rayer le mot amour du vocabulaire ; trop ambigu, trop connoté, trop rigide, trop imprécis en même temps ; crée des effets d'attente insupportables et place les partenaires en situation de chantage affectif. Pour un je t'aime spontané et libre, combien arrachés sous la contrainte... J'aime pas qu'on me le fasse, et j'aime pas me surprendre le faire aux autres, le coup du je t'aime
- le polyamour pour moi c'est effectivement un état d'esprit et pas une situation. C'est ne pas avoir de culpabilité quand on a un jardin secret, besoin de solitude, envie de rencontrer des gens sans envie de forcément être en démarche de séduction, ne pas hiérarchiser les relations simplement par critères sexuels, parfois préférer voir un ami qu'un amant, parfois inviter son mari à diner comme si c'était un ami...
- le sexe avec amour c'est bien, l'amour sans sexe aussi, le sexe sans amour aussi. Tout est possible si on sait l'apprecier pour ce que c'est.
Et si tout simplement on disait qu'on est des gens libres ?
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(compte clôturé)
le jeudi 07 juillet 2011 à 21h29
Janis: le sexe avec amour c'est bien, l'amour sans sexe aussi, le sexe sans amour aussi. Tout est possible si on sait l'apprecier pour ce que c'est. Et si tout simplement on disait qu'on est des gens libres ?
Eh oui, tout simplement. Merci Janis!
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pierre
le jeudi 07 juillet 2011 à 22h18
Je suis d'accord avec Littlejohn !
Tout cela vient surtout avec le mot français, en anglais ils disent polyamory et pas polylove, donc je pense que la nuance est plus claire.
L'aspect amour est cela dit présent, en tant que éventualité au moins, et en cela le sens diffère de celui du mot libertinage aujourd'hui, et je ne trouve pas qu'on se corrompe en le précisant le cas échéant.
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tattoo
le jeudi 07 juillet 2011 à 23h16
moi j'aime bien faire la différence entre les deux, libertinage et lutinage.
Je fréquente bien le monde libertin et j'en connais pas mal et je me sens aussi différent d'eux que je le suis des mono.
Les libertins sont aussi possessif que les mono quand il s'agit de sentiment, c'est juste qu'ils ont désacralisé le sexe et en on fait une sorte de jeux qu'il ne pratique qu'ensemble avec des invités et avec des rêgles.
Pour moi les libertins sont beaucoup plus proche des mono qu'ils le sont de nous.
D'ailleurs l'homme d'un couple que je connais et qui pratique le libertinage depuis 15 ans avec sa femme, se sent dépasser par ce que je vis. Il m'a dit que si j'avais deux amoureux c'est parceque je n'étais pas "fixée" sur mon choix. Comme si je devais choisir.... pfff
Par contre pour certains mono, il ont du mal a imaginer que je puisse aimer un autre et pense que c'est pour le sexe que j'ai un deuxième....pffff
Moi je divise les gens en deux catégoris:
Les chimpanzés: ceux qui veule posséder, les monos et les libertins en font parti.
Et les rares bonobos: ceux qui veule aimer qui ils veulent, nous.
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demeter
le lundi 11 juillet 2011 à 10h18
tattoo
Moi je divise les gens en deux catégoris :
Les chimpanzés : ceux qui veule posséder, les monos et les libertins en font parti.
Et les rares bonobos : ceux qui veule aimer qui ils veulent, nous.
Tu dis ça parce que tu es énervé là, ou tu le penses vraiment ? :)
Les mots n'englobent que partiellement une réalité. Peut-être la solution est de ne pas s'y accrocher, et de ne les utiliser qu'en fonction du contexte et des gens avec qui l'on parle. Personnellement, je ne me reconnais dans aucune communauté de pensée ou bien dans toutes, selon le degré d'appartenance à cette communauté. Ranger les gens dans une catégorie n'est pas un exercice qui me parait souhaitable, hormis pour des facilités de compréhension.
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kadah
le lundi 11 juillet 2011 à 15h01
la question me gonfle un peu... n'y voyez aucune offense!
tout ce qui est question de genres, de pratiques tout cela n'est que de l'intimité au final, et chacun peut trouver son bonheur en étant poly, mono, amoureux, consommateur de sexe, hédoniste, amoureux courtois... la liste est infinie!
alors pourquoi essayer me mettre des mots là où il y a autant de "pratiques" que d'êtres humains?
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(compte clôturé)
le lundi 11 juillet 2011 à 15h05
Moi je divise les gens en deux catégoris : Les chimpanzés : ceux qui veule posséder, les monos et les libertins en font parti. Et les rares bonobos : ceux qui veule aimer qui ils veulent, nous.
Au secours!!!, moi je divise les gens en deux categories:
-les idéologues qui divisent les gens en catégories.
- les pragmatiques qui vivent ce qui les rend heureux quand ça les rend heureux avec les personnes qui les rendent heureux.
Tigrideologue
Message modifié par son auteur il y a 12 ans.
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(compte clôturé)
le lundi 11 juillet 2011 à 15h57
Cette discussion me plait parce que :
- je fais partie des gens qui aimeraient rayer le mot amour du vocabulaire
@Janis,
rayer le mot amour du vocabulaire, tu y vas fort quand meme; je vois ce que tu veux dire parce qu'il y a eu un fil sur ce sujet précisément mais bon: si tu ne dis pas les mots d'amour "spontanés", tu exerces une pression sur toi pour ne pas les dire, tu fais de la "constipation amoureuse":ça fait pas un peu mal des fois?:-)
- le polyamour pour moi c'est effectivement un état d'esprit et pas une situation. C'est ne pas avoir de culpabilité quand on a un jardin secret, besoin de solitude, envie de rencontrer des gens sans envie de forcément être en démarche de séduction, ne pas hiérarchiser les relations simplement par critères sexuels, parfois préférer voir un ami qu'un amant, parfois inviter son mari à diner comme si c'était un ami...
ça c chouette, je suis un mono-poly
Tigre
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tattoo
le lundi 11 juillet 2011 à 21h08
c'est vrai que je suis un peu en colère en ce moment...
Il faut bien que je me rende compte que ceux qui me font du mal sont bien les gens qui ont un état d'esprit de "possession". "pas touche, il est a moi?" ou "je peux peu plus te voir, parcequ'elle ne le supporterait pas", ...etc....que ce soit en libertinage ou mono (d'ailleurs les libertins sont mono).
Je souffre beaucoup de la perte de mon ami... et cataloguer les gens me permet de me protéger justement de ceux qui me font souffrir en les évitant.
Personne n'appartient a personne et comment peut-on exiger a quelqu'un que l'on aime de ne plus fréquenter les gens qu'il aime? Pour moi c'est ça l'esprit de possession... c'est eux que je calalogue parceque je ne les comprend pas.
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(compte clôturé)
le mercredi 13 juillet 2011 à 12h51
@tattoo
je comprends mieux. La souffrance liée aux mecanismes de possession, j'ai connu, je compatis donc sincerement mais je crois que tu peux te proteger sans cataloguer.
Car les gens qui te disent "il est à moi" cataloguent et mettent une etiquette sur leur amoureux, marquent le territoire, possèdent.
Les categories hommes femmes, riches pauvres mon poly libertins ne sont que des commodités de langage, absolument pas des réalités homogènes, des communautés aux frontières parfaitement nettes sans sas, transgressions, transferts, glissements de terrain.
j'etais hetero exclusif blanc habitant un quartier rupin bon pere de famille et malheureux:
maintenant j'ai pas changé de couleur ou de sexe, juste d'adresse, je suis un peu sdf sur les bords, je vois mes enfants par intermittence dans des conditions un peu rock and roll, mes fantasmes sont bi et libertins et par chance, je peux les partager avec mon amoureuse: je suis heureux et vivant.
Completement "hors categorie", "mon" amoureuse ne me possede pas; je ne la possede pas; je deteste qu'on me dise que j'appartiens à tel ou tel groupe, drapeau, communauté, genre.
j'ai un penis, qu'est-ce que je partage avec DSK dans mon rapport aux femmes: rien.
j'ai une spiritualité, qu'est ce que je partage avec les religieux de tout poil dans mon rapport aux interdits: rien.
j'adore et je défends souvent la langue française devant le franglais branchouillement con, qu'est ce que je partage avec les nationalistes: rien.
Je suis de gauche, qu'est-ce que je partage avec les materialistes marxisants et autres revolutionnaires de salon: rien de chez rien.
Ou suis-je? nulle part, mais j'y suis drôlement bien.
Minou compatissant.
Message modifié par son auteur il y a 12 ans.
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artichaut
le mardi 12 novembre 2019 à 14h44
Janis
- je fais partie des gens qui aimeraient rayer le mot amour du vocabulaire ; trop ambigu, trop connoté, trop rigide, trop imprécis en même temps ; crée des effets d'attente insupportables et place les partenaires en situation de chantage affectif. Pour un je t'aime spontané et libre, combien arrachés sous la contrainte... J'aime pas qu'on me le fasse, et j'aime pas me surprendre le faire aux autres, le coup du je t'aime
J'ai longtemps tenu ce discours là.
Aujourd'hui je voudrais inverser la tendance, car je me rends compte que j'ai confondu « amour » et « amour passion, monogame, bourgeois, capitaliste, etc ».
On nous vole nos mots, les réduisant à une peau de chagrin, leur donnant un sens unique et ridicule à force d'être sucé et resucé jusqu'à la moëlle, absente depuis longtemps (et comme il n'y a plus de moëlle, on est frustés, aigris et en-manque).
LittleJohn
Au fil des débats autour du polyamour, j'ai pu remarquer à plusieurs reprises que, confrontés à nos contempteurs, nous nous retrouvons souvent à utiliser leurs termes du débat ; que nous nous les laissons imposer.
(…)
Alors que, finalement, l'enjeu du polyamour, c'est l'ouverture - la non-exclusivité relationnelle -, la liberté, l'honnêteté et la (possible) réciprocité, nous voilà à parler d'amour à tout bout de champ. Alors que d'amour il n'y a pas toujours, même si sa possibilité est là. En rentrant dans ce discours, nous disqualifions une partie des polyamoureux et semblons fermés, voire, dans certains cas, menteurs.
(…)
Chaque argument contre le polyamour devrait nous amener à déconstruire son contexte, ses pré-supposés - moraux, sociaux et autres - plutôt qu'à essayer de nous justifier sur son terrain.
J'ai l'impression qu'il y a deux débats en un :
- La question de l'amour, du mot « amour » (cf la parenthèse du titre) : et plutôt j'ai envie de me réapproprier les mots qu'on nous a volé, plutôt que de penser que "nous nous retrouvons souvent à utiliser leurs termes du débat".
- La question de comment on fait face aux critiques, aux sous-entendus, etc et comment on ne tape pas sur le voisin d'a-côté pour se défendre de la baffe que l'on reçoit (ça aussi c'est foncièrement capistaliste : exacerber la frustration et ensuite la violence sur "+faible" que soi, ou juste sur "autre que soi") : et là plutôt, oui, il semble plus préférable et judicieux de faire preuve de solidarité entre personne hors-norme, …et stigmatisées comme telles.