Polyamour.info

Bonjour,

Je viens ici jeter une bouteille à la mer sans réellement savoir si je souhaite vraiment le faire. Au final, je pense qu'au fond de moi j'ai déjà plus ou moins les réponses à mes questions et en même temps, je pense que j'ai besoin de vider mon sac et lire des témoignages de personnes qui sont passées par là.

Je suis en couple depuis 13 ans et marié avec l'homme le plus merveilleux et le plus extraordinaire que j'ai jamais rencontré. Nous avons un petit garçon de 2 ans et demi. Il y a maintenant 6 ans, j'ai rencontré un autre homme et j'ai très vite développé des sentiments pour lui. Une vive alchimie et une connexion mentale très forte. À l'époque, je n'avais jamais entendu parler du polyamour... J'étais également sous traitement pour mon TDAH + arrêt de pilule contraceptive, donc hormones qui font des montagnes russes.

J'ai géré cette situation n'importe comment. J'ai totalement paniqué, j'ai essayé d'entretenir une relation amicale avec cet homme de qui je me sentais très proche, mais j'ai plusieurs fois "dérapé" avec un énorme sentiment de culpabilité derrière. J'ai toujours été absolument folle de mon mari, je l'aime vraiment + que tout, et pour moi il était inconcevable que j'ai des sentiments pour un autre. J'étais dans le déni total.

Mon mari a très vite découvert le pot aux roses mais a mis beaucoup de temps pour me confronter. Lorsque ça a finit par nous éclater au visage, j'ai promis à mon mari de mettre fin à cette relation, mais cela n'a pas été aussi simple : j'ai tenté de couper les ponts des dizaines de fois, j'ai vu des psy, tenté les antidépresseurs, etc etc.
Outre le fait que je n'ai jamais "voulu" de cette autre relation, il s'agissait en + d'une personne vraiment toxique (type pervers narcissique) et j'avais développé une position de soumission de laquelle je n'arrivais pas à me défaire.

Au bout de pratiquement 5 ans à me débattre pour tenter de sortir de là, j'ai capitulé et essayé de parler à mon mari de couple ouvert en désespoir de cause. Je dis bien "désespoir de cause", car je n'ai en réalité jamais souhaité ce schéma relationnel. Ce que je voulais en réalité, c'était revenir en arrière pour ne jamais rencontrer cette personne. Mon mari n'était pas ouvert à cette idée et m'a dit qu'il avait besoin de temps pour y réfléchir.

Presque un an plus tard, toujours incapable de me défaire de mon "autre relation" (qui restait ceci dit platonique depuis des années), je finis par commencer à tomber dans la dépression. Mon mari, désemparé et impuissant, me propose alors l'inimaginable : tenter d'ouvrir notre couple.
Je me sens infiniment soulagée... Pas tellement parce que je vais "enfin pouvoir vivre mon autre relation", mais plutôt libérée du poids de la culpabilité.

Mais là, c'est la descente aux enfers qui recommence sous une forme que je n'aurais jamais imaginée... Je comprends que mon mari commence à développer des sentiments pour une autre femme et qu'il s'apprête à vivre ce que j'ai vécu de mon côté. Je crois l'accepter les premières semaines, même si la jalousie est là, mais plus le temps passe et plus je réalise à quel point la simple idée qu'il puisse désirer voire aimer une autre me consume. À tel point que je trouve enfin la force de me libérer de la relation toxique que j'avais pourtant tout le loisir d'explorer après plus de 5 ans à la refuser.

Cela fait maintenant près de 3 mois que nous avons décidé de changer les codes de notre couple et je vis un véritable enfer. Je suis dévorée de toutes parts par des émotions contradictoires : la jalousie, la peur, l'angoisse mais aussi la honte et la culpabilité. Je ne comprends pas mes comportements : comment ai-je pu expérimenter moi-même ce genre de sentiments et ne pas réussir à supporter l'idée que mon mari en fasse de même ?

Je vois ces sentiments (son amour, même, son désir également) grandir chaque jour un peu plus et je sens que je meurs à petit feu. Je dors très mal, je dois me forcer pour m'alimenter (j'ai perdu 4kg), il m'arrive même de vomir dès que je mange quelque chose. Tout mon corps est douloureux.

Pourtant, il n'y a rien que je veuille + au monde que le bonheur de mon mari et son épanouissement. Je ne connais personne au monde qui le mérite + que lui. C'est une personne généreuse, altruiste, qui s'est toujours fait passer en second plan dans sa vie. J'estime qu'il a largement gagné le droit de vivre sa vie comme il l'entend, de jouir de sa liberté, d'autant + qu'il a fait preuve d'une magnifique abnégation quand j'ai vécu ma propre expérience. Je me détesterais de lui refuser ça.

Alors pourquoi est-ce que je me sens aussi mal ? Pourquoi est-ce que mes pensées me torturent autant, pourquoi mon quotidien est un tel supplice alors que j'ai toutes les raisons du monde de lui offrir ce qu'il mérite tant, que cela me paraît même d'une logique implacable ?

Est-ce qu'on souffre ainsi éternellement ? Est-ce que ça finit par passer un jour ?

Merci à vous de m'avoir lue. Je pense qu'il manque beaucoup d'éléments dans mon message pour comprendre toutes les subtilités de la situation mais je voulais éviter de faire trop long...

Bonjour

Dans un sens, vous arrivez à vous mettre désormais à la place de l'autre. Intellectuellement parlant.

Pour ce qui est de ce décalage, l'intellect ne peut rien. Ce qui vient de l'intérieur ne se transforme pas.

Tu dis que tu sors d'un relationnel toxique. As-tu peur qu'il en soit de même pour ton conjoint ?

Bonjour bonheur et merci pour votre réponse.

Je ne sais pas trop répondre à cette question. Je pense que j'évite de me la poser pour ne pas m'exposer à une sorte de "faux-espoir" (je m'en veux tellement de dire ça !) car si il s'agit d'une relation toxique, alors il y a un prétexte pour qu'ils y mettent fin.

J'ai l'impression que c'est très différent pour mon mari que ça ne l'a été pour moi. Je n'ai pas l'impression qu'il rejette cette relation comme j'ai pu le faire, j'ai l'impression qu'au contraire il a très envie de l'expérimenter malgré toute la culpabilité qu'il peut ressentir à mon égard, mais cela s'explique aussi probablement parce que lui a su faire les choses correctement contrairement à moi, à savoir être honnête avec moi avant de sauter le pas. Par ailleurs, il ne s'est toujours rien passé entre cette personne et lui, car il a trop de respect pour moi et sent que je ne suis pas prête.

Je lui en suis reconnaissante mais je me sens d'autant plus coupable d'avoir ce pouvoir de lui donner l'absolution et de ne pas pouvoir m'y résoudre. Dans les faits, il l'a, c'est juste que tout mon corps rejette ma décision et mon mari n'est pas aveugle. Il voit ce que cette décision me coûte et vit lui-même très mal cette situation.

Je suppose qu'il y a beaucoup de noeuds à patiemment défaire. Beaucoup à découvrir. Si tout le monde prend le temps, d'une façon posée, apaisée et franche, vous serez ensemble (j'intègre sa nouvelle relation) en bonne situation.

Dire que votre curseur se rapproche d'un équilibre, comme la bulle du niveau, serait osé. Vous avez vous, tous les trois, et munissez vous du niveau, des matériaux et de tout ce qu'il faut pour bâtir. Quoi ? Limite on s'en fout. Un truc qui tient debout, avec une sécurité universelle, pour intégrer tout à chaque personne qui vient enrichir la construction.

Déjà, ton expérience est une boussole, si ce n'est qu'elle indique le chemin à ne pas suivre. C'est déjà énorme de savoir ce qui ne va pas.

Parfois, on cherche ceci ou cela, et on s'aperçoit au final que se laisser porter est suffisant. Je ne pense pas que tu entres en résistance, comme une personne mono (catapulté dans le poly, je reprend l'expression :-) ). Le polyamour tu sais, tu connais et tu es d'avis que ça offre tellement. Le bien vivre, vous pouvez désormais y gouter. Alors, offre toi le luxe de déceler d'où peut venir la résistance. Ici, chacun proposera sans doute des idées, des suggestions. Une façon de mûrir ta réflexion. L'idéal, est d'offrir ces réflexions à ton chéri, car il se peut que sa connaissance de toi puisse apporter énormément.

Ah oui. Ne pas s'offenser, je tutoie naturellement. Si je tutoie, ce n'est pas par manque de respect ou autres. Si vraiment c'est dérangeant, merci de me l'indiquer gentiment.

Aucun problème avec le tutoiement.
En revanche, j'apporterais quelques nuances : oui, il y a une possibilité pour que je sois poly également, pour autant je n'ai jamais souhaité en faire un schéma relationnel. Cela m'a peut-être traversé l'esprit par instant, quand j'étais aux abois, totalement dépassée par la situation que je vivais et que je cherchais des solutions pour me sortir de ce guêpier. Donc non, je n'ai pas l'impression de "comprendre ce que le polyamour a de beau à offrir" (pardon, je ne me souviens plus de la formulation exacte). J'ai toujours eu davantage la sensation de le subir plutôt que de le vivre.

Ensuite, et ça ce n'est pas vraiment une manière de te contredire, mais + un aveu : je suis pour le moment incapable de nous penser "à trois" sans que cela soit un supplice pour moi. Et cela rejoint d'ailleurs la première partie de ce message : même dans ma propre expérience, il n'a jamais été question d'être trois. À mes yeux, il n'y a que mon mari et moi. Je vois le reste comme une excroissance dont je me passerais volontiers, pour lui comme pour moi...