Polyamour rime-t-il avec autonomie et indépendance ou avec communauté et solidarité ?
#

lam
le vendredi 21 septembre 2012 à 16h35
Katouchka
Et je trouve ça étrange de ne pas pouvoir décrire ici ce que je ressens sans que l'on prenne cela pour des injonctions.
je rejoins complètement ce que dit Janis.
En fait malgré le conditionnel on se retrouve souvent à faire des phrases qui énoncent des vérités (moi aussi hein, même si j'essaye de ne pas...), et qui du coup englobent les autres, qui peuvent donc se sentir pris en otage, agressé-e-s car illes ont l'impression que ce qu'illes pensent est assimilé, contenu dans une vérité générale même conditionnelle qui se met alors à ressembler à une horrible injonction, houh ;-)
La phrase que je cite est vraiment en contradiction avec ce que je pense profondément (en résumé voir les choses de manière naturalisante, essentialisante vs. matérialiste), voilà pourquoi je réagis fort. Ca veut pas dire que je t'accuse personnellement, plutôt que je me sens dérangée par certains propos donc c'est contradictoire, intéressant et je cherche à comprendre ce qui me titille.
Et je viens ici avec le même genre d'envie de partage, donc bien sur je relevais une de tes phrases et l'idée associée avec laquelle je ne suis pas d'accord, mais je ne critique pas le fait que tu exprimes ton avis. Au contraire c'est plutôt parce que la question du fil m'interpelle et que les termes du débat me paraissent constructifs que j'interviens, et ça c'est entre autres grâce au fait que tu exprimes ici ton avis et tes questions.
#

Leolu
le mercredi 09 décembre 2015 à 12h39
Je remonte ce fil parce que je viens de lire la dernière note de Maïa Mazorette sur ce sujet (autonomie, dépendance) :
MYTHE DE L'HERMAPHRODITE : LE COUPLE COMME COMPLÉTUDE
Elle ne parle là du problème de la fusion que pour le couple traditionnel, mais les arguments mis en avant me semblent être le credo de base du polyamour.
Il est d'ailleurs troublant de s'apercevoir que les "recettes du bonheur du couple" sont celles-là même qui mènent au constat polyamoureux :) !
Les phrases-clefs :
- Et donc, cette idée qu'en amour (et en sexe), on fusionne.
- A mon avis, on est prêt pour le couple quand justement on peut parfaitement se passer du couple.
- Parce que quand vous n'avez rien à « prendre » vous avez tout à donner.
- Parce qu'être un enfant pousse l'autre à se comporter comme vos parents.
- Pour intéresser les autres, il vaut mieux avoir une vie à soi.
- On peut évoluer vers la dépendance, mais j'ai de sérieux doutes sur le fait qu'on puisse commencer sur une situation de dépendance.
Message modifié par son auteur il y a 10 ans.
#

Apsophos
le mercredi 09 décembre 2015 à 13h18
Leolu
Elle ne parle là du problème de la fusion que pour le couple traditionnel, mais les arguments mis en avant me semblent être le credo de base du polyamour.
Il faudrait peut-être lui signaler, vue sa position sur le sujet.
#

Siestacorta
le mercredi 09 décembre 2015 à 13h21
Ca recoupe souvent nos réflexions ici, oui.
Malheureusement, Mazaurette a aussi eu plusieurs fois des réflexions explicitement anti-polyamour...
#

Siestacorta
le mercredi 09 décembre 2015 à 13h32
J'en ai retrouvé là , mais il y a eu d'autres fois...
Message modifié par son auteur il y a 10 ans.
#

Leolu
le mercredi 09 décembre 2015 à 15h31
Siestacorta
Malheureusement, Mazaurette a aussi eu plusieurs fois des réflexions explicitement anti-polyamour...
Oui oui, je connaissais sa position, et ça m'a amusé aussi. :-)
En essayant de la comprendre, on pourrait se dire que l'idée d'autonomie et d'indépendance est tellement forte, chez elle, qu'elle préfère la successivité plutôt que l'inclusion. On oublie les amants précédent, comme ça, on reste libre et sans attaches.
Et dans le lien de couple lui-même, la dépendance affective n'empêche pas l'autonomie sociale (et même la favorise). Là aussi successivité des tranches de vies sociales.
Elle est plus anti-fusion que pro-parallélisme-sentimental, en fait.
Donc, pour en revenir au débat ci-dessus (indépendance ou communauté ?), son raisonnement m'a fait penser que, si le polyamour tire sa source du besoin d'autonomie et d'indépendance (de féminisme si l'on se réfère à l'évolution des moeurs), il n'en oublie pas pour autant l'affectivité et l'amour au long cours, dans un esprit communautaire (un féminisme apaisé non extrémiste).
Un esprit tribal d'équilibres qui n'est plus la famille ou le couple contractuel.
#

PolyEric
le mercredi 09 décembre 2015 à 21h03
Puisque l'on déterre des discussions anciennes qui m'interessent, j'en profite pour redonner mon avis sur la question.
D'après moi, l'indépendance n'existe pas, je lui préfère nettement la notion de dépendances multiples, qui collent tout aussi bien au polyamour que l'indépendance.
Pas suite, je ne pense pas que le polyamour tire sa source d'un besoin d'indépendance, mais d'un besoin d'amour.
Et où peut-on trouver le plus d'amour ? A mon sens, dans une communauté, mais attention. Tout d'abord, les incapacités des gens à vivre ensemble sont telles dans le monde individualisé, qu'il y a un temps d'adaptation nécessaire quand on passe de l'un à l'autre et vice versa. Souvent, on fait l'erreur d'interpréter la vie en groupe à partir de sa vie individualisée, et en faisant cela, on fait beaucoup de suppositions fausses qui nuisent à la conclusion, tout aussi fausse que "moi je pourrais pas".
Concrètement, si on veut vire en groupe, par exemple, il faut prendre l'habitude de ne pas se gêner au milieu de la communauté pour pouvoir être soi-même, tout en apprenant à respecter les autres pour ne pas trop gêner les autres. Au final, le plaisir est plus important que la gêne sauf si certains déraillent de trop dans le groupe. Et il faut aussi que le groupe soit permissif, pour pouvoir vivre sa vie et accepter quelques égarements, d'ou l'intérêt d'allier polyamour et vie en groupe.
Par contre, il n'est pas question que toutes les personnes du groupe s'aiment entre elles, il s'agit seulement de se respecter. En effet, l'amour ne peut pas s'imposer. On n'est pas en faute quand on n'aime pas quelqu'un. La question est surtout de savoir si on peut vivre avec une personne qu'on n'aime pas, il faut faire la distinction entre "ne pas aimer" et "ne pas supporter", ce qui n'est pas du tout la même notion.
Par suite, une fusion poly ne peut pas être une fusion amoureuse, puisque toutes les personnes du groupe ne s'aiment pas forcément. Elles apprécient d'être ensemble, sinon elles se sépareraient. Et on vient au problème du lieu.
En cas de séparation, qui s'en va ? Le lieu ne doit donc pas être une propriété, sinon chacun reste chez lui, portes fermées pour ne pas avoir à "supporter" l'autre. Même si le lieu est composé de plusieurs micro appartements avec parties communes et possibilité de s'isoler et d'inviter quelqu'un chez soi, il reste le problème de la séparation des personnes qui ne peuvent plus s'encaisser, donc ne peuvent plus vivre ensemble. Par suite, les micros appartements doivent pouvoir êtres quittés, et repris comme une location, ce qui n'empêche pas d'être propriétaire de part dans une SCI qui regroupe tout l'immeuble. On peut quitter le lieu rapidement, et revendre ses aprts plus lentement. On peut aussi louer, et donner congé.
En résumé, la liberté est nécessaire à une bonne fusion, et la fusion n'est pas forcément amoureuse, mais elle est forcément respectueuse et plaisante sinon elle n'est plus.
C'est pour cela que j'avais créé le mot Polyfusion, qui contrairement à ce que tellement de monde croit, ne représente pas une prison, mais au contraire une liberté qui s'étend jusqu'aux limites du respect.
Le respect n'implique pas d'être responsable des autres, de se soucier trop d'eux. C'est juste accepter que les autres puissent vivre ce qu'ils veulent vivre tranquillement.
Les expériences faites à la grange pendant plusieurs semaines montrent très nettement que les gens arrivent la première fois assez tendus en prévenant qu'ils ne sont pas sociables, pour finalement s'apercevoir que l'on peut être soi-même, libre et à l'aise au milieu d'une communauté de gens si différents les uns des autres, pourvu de se respecter, une expérience polyamoureuse que l'on ne peut pas vivre chacun dans son coin, en célibataire endurcit, enchaîné à sa propre liberté...
Voilà, j'étais déchaîné ce soir. Au plaisir de déterrer les vieilles discussions de fond.
Message modifié par son auteur il y a 10 ans.
#

(compte clôturé)
le jeudi 10 décembre 2015 à 07h30
PolyEric
C'est pour cela que j'avais créé le mot Polyfusion, qui contrairement à ce que tellement de monde croit, ne représente pas une prison, mais au contraire une liberté qui s'étend jusqu'aux limites du respect.
Si mes souvenirs sont bons, lors d'une discussion que nous avions eu tous les deux en mai 2014, il me semble que ta notion de polyfusion ne concernait pas seulement le fait de vivre en communauté. Et c'est justement sur ces autres paramètres que nous avions été en désaccord. Et notamment sur le fait que tu étais partisan du "tout se dire et tout doit se dire"...
Maintenant, ta vision a peut être changé... en tout cas, pour moi, le polyamour nécessite une remise en question perpétuelle... et c'est un travail de chaque jour. Mais quel travail !!!
#

PolyEric
le jeudi 10 décembre 2015 à 21h13
Salut ! Tes souvenirs sont surement déformés car j'avais déjà dit à cette époque que je n'entendais pas confondre polyfusion et "tout se dire".
En ce qui me concerne, je suis partisan de tout se dire (je n'ai pas changé sur cette question) et je suis aussi partisan de la polyfusion (je n'ai pas changé non plus sur cette question) mais rien empêche de construire une polyfusion sans "tout se dire". Pas avec moi, certes, mais c'est possible. D'ailleurs, il me semble que ça existe.
La polyfusion se définit comme un groupe composé de personnes qui se retrouvent souvent ou vivent à plusieurs, par plaisir, tout en restant libre. Ce n'est absolument pas nécessaire de tout se dire pour vivre ça.
Je ne sais pas comment te dire qu'on peut faire l'un sans l'autre (vivre ensemble et ne pas se raconter grand chose de nos frasques) et qu'on peut aussi faire l'autre sans l'un (tout se dire sans quasiment se voir). Ces deux notions sont clairement séparées, il me semble, non ?
Ce n'est pas parce que j'aime faire l'un et l'autre (vivre ensemble et tout se dire) que le mot polyfusion change de sens, je ne suis pas le centre du monde que je sache.
Ce n'est pas non plus parce que j'ai proposé ce mot (et que j'y suis accro), qu'il représente la totalité de ce que j'aime. En fait, il représente seulement la moitié des modes de vie que j'aiment, si tu préfères.
Peut-être te faudrait-il un mot pour l'aspect "tout se dire".
Par exemple "transparent" ou "direct" ou "cache", sont utilisés pour dire ça.
On pourrait alors dire une "polyfusion transparente", ou "une "polyfusion cache" pour représenter tout ce que j'aime. Mais la vérité c'est qu'il n'y a pas besoin qu'un mot existe pour le vivre.
La remise en question perpétuelle pourquoi pas, mais en même temps, vivre ce qu'on veut vivre c'est bien aussi, il n'est pas nécessaire de se remettre en question quand tout va bien. Par contre, moi, ce que je fais sans savoir pourquoi je le fais, c'est d'analyser tout le temps la logique des fonctionnements pour essayer de les comprendre et de choisir le fonctionnement que je préfère.
Il semble clair que tu préférais avoir un jardin secret à l'époque, mais ta perpétuelle remise en question t'a peut-être fait adopter une autre préférence aujourd'hui...
Bises
Message modifié par son auteur il y a 10 ans.
#

PolyEric
le jeudi 10 décembre 2015 à 21h20
Polyamour rime-t-il avec autonomie et indépendance ou avec communauté et solidarité ?
Ma conclusion serait donc (pour faire court):
Polyamour rime avec communauté, liberté et dépendances multiples.
mais je comprend que Polyamour puisse également rimer avec "célibat, liberté et individualisme" (ce n'est pas mon truc mais ça a l'air de fonctionner aussi).
Message modifié par son auteur il y a 10 ans.
#

Leolu
le vendredi 11 décembre 2015 à 11h46
PolyEric
Polyamour rime-t-il avec autonomie et indépendance ou avec communauté et solidarité ?
C'est amusant, lorsque j'ai trouvé cette discussion, je pensais que le titre évoquait une comparaison avec le couple traditionnel, en deux points :
- dépendance contractuelle VS indépendance et choix de dépendances
ou
- communauté familiale stable VS communautés informelles à géométrie variable
Le mot "communauté", pour moi, représentait : une même famille de pensée, une philosophie commune, voire un maillage de connaissances.
Et pas un éventuel "village polyamoureux".
PolyEric
Polyamour rime avec communauté, liberté et dépendances multiples.
Je suis tout à fait d'accord sur notre besoin foncier de dépendances choisies, la particularité polyamoureuse visant surtout à préserver la notion de "choix" (on ne peut avoir de choix qui si on n'est pas exclusivement attaché à une seule personne), et choix = liberté.
D'ailleurs, j'ai défendu l'idée que la jalousie était moins un désir de possession qu'une peur de perdre sa propre dépendance envers le conjoint.
Message modifié par son auteur il y a 10 ans.
#

PolyEric
le vendredi 11 décembre 2015 à 14h33
Il me semble qu'il y a de l'idée oui.
Par contre la communauté au sens famille de pensée, là je doute. Les polyamoureux se rejoignent sur le rejet de la pensée mono mais se regroupent très peu autour d'une idée commune. Leur point commun, comme je le dis souvent, c'est qu'ils sont tous différents. Donc dur dur de se réunir sur des visions positives communes.
L'exemple typique est la création d'un site de rencontres poly ou l'informaticien demande ce qu'on met dans la fiche. Par exemple le sexe H/F ? Ben là tu ed partit pour 15 jours de débats houleux. Et suand tu demandes, bon mais vous le voulez ce site de rencontres poly ? Et là, tu es répartit pour 15 jours de débat.
Par contre pour rejeter la culture monogame alors là, pour déconstruire, tout le monde est d'accord !
Donc su tu veux déconstruire la vie en communauté tu vas trouver du monde mais pour en construire une alternative là plus personne. Du coup l'individualisme reprend ses droits.
Autrement dit pas de communauté de pensée et pas de vie en communauté non plus.