C'est quoi, l'honnêteté?
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(compte clôturé)
le samedi 01 octobre 2011 à 06h03
Fil ouvert pour sortir de l'abstrait, parler de situations vécues, etc.
(Pour la théorie, ça se passe plutôt ici.. /discussion/-sG-/Du-mensonge-dans-les-relations/#u... )
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Popol (invité)
le samedi 08 octobre 2011 à 18h16
Peut-être que partir de l'opposé, c'est-à-dire de ce qu'est la malhonnêteté, serait intéressant.
Je pense ces jours-ci à la malhonnêteté intellectuelle.
Jean-Luc Gouin et Gille Guérin, tous deux philosophes, nous livrent de bonnes pistes:
Pour le premier, la malhonnêteté intellectuelle, c'est
« Viser sous le couvert de notions réputées nobles (le vrai, le bien, la liberté, l’amour, le beau, le digne, à titre d’exemples) à affaiblir, invalider ou discréditer, sinon terrasser, un adversaire - au plan discursif - par des manières et des méthodes qui relèvent en apparence de l'outillage probe de la pensée et de la réflexion (faits avérés, connaissance réelle de l’ensemble des éléments du dossier, logicité, démonstration, écoute effective du vis-à-vis [audi alteram partem…], volonté de vérité par distinction de la volonté de domination, voire d’assujettissement...). C’est au nom de la raison chercher sciemment – par opposition à l’erreur, commise de bonne foi, ou à l’ignorance, intransitive par définition – à imposer une opinion dont on ne méconnaît pas soi-même, à part soi, les insuffisances sinon l’inanité. »
Jean-Luc Gouin
Sous la plume de Gilles Guérin, je trouve ceci:
"Il faut s'attacher aux idées, les comprendre, les analyser, les critiquer, au lieu d'essayer de diaboliser et de décrédibiliser des individus, pour en fait atteindre leurs idées. Parce que cela (diaboliser/décrédibiliser) ne peut que maintenir l'absence de pensée, d'esprit critique et de raison, inhérent à l'autoritarisme et à l'arbitraire. Et lorsque cela domine, ce ne sont pas les idées les plus justes qui sont adoptées, mais celles de ceux qui crient le plus fort, et des plus charismatiques; et ce bien sûr quelque soit le degré de justesse de ces idées…"
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LuLutine
le mardi 11 octobre 2011 à 00h51
Hmmm...une situation vécue ?
Mais il faudrait peut-être préciser un peu dans quel contexte ?
juste-pour-ecrire-ce-fil
Fil ouvert pour sortir de l'abstrait, parler de situations vécues, etc.
(Pour la théorie, ça se passe plutôt ici.. /discussion/-sG-/Du-mensonge-dans-les-relations/#u... )
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juste-pour-ecrire-cefil (invité)
le mardi 11 octobre 2011 à 03h12
Oh, c'est égal, ça. L'honnêteté en amour, mais aussi l'honnêteté en général, dans tous types de relations.
Mais ta question en amène une autre: est-ce qu'on peut être honnête différemment selon qu'on s'adresse à un amour, à sa famille, à des collègues?
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patrice-86
le mardi 11 octobre 2011 à 11h54
Comme déjà évoqué dans le fil "théorique" il y a 2 définitions de l'honnêteté, soit en terme de conformité par rapport à une morale sociale, soit en terme de cohérence entre la pensée, la parole et l'action.
Pour ma part, avec la première définition je suis hors-jeu d'office :-)
Pour la seconde, compte-tenu de l'écart entre ce que je pense et ce que la société me "permet" de faire, j'ai forcement un hiatus entre mes pensées et mes actes ! :-/
Quant à être indifféremment honnête avec tout son entourage... je ne vois qu'une seule solution : vivre en ermite :-)
Sinon, je trouve la juxtaposition des 2 textes que tu nous proposes, Popol, très percutante. Le second, est pour moi l'archétype du vœux pieux. Il faut être moine bouddhiste "5ème dan" pour ne pas s'identifier à ses propres pensées. Dans le cas contraire, toute critique d'une idée est forcement perçue comme une critique de soi quelle que soit l'intention du contradicteur. Lorsque cette manière "dépersonnalisée" de fonctionner est adoptée dans un groupe, c'est souvent sous l'influence d'une personne charismatique et/ou autoritaire. Joli paradoxe, non ? Quant à chercher à imposer cette vision "détachée" tout en sachant que ça ne marche pas comme ça, je trouve que ça nous renvoie au premier texte sur la malhonnêteté intellectuelle... à méditer !
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Popol (invité)
le mardi 11 octobre 2011 à 12h25
Sinon, je trouve la juxtaposition des 2 textes que tu nous proposes, Popol, très percutante. Le second, est pour moi l'archétype du vœux pieux. Il faut être moine bouddhiste "5ème dan" pour ne pas s'identifier à ses propres pensées.
On peut du moins y travailler. Et à mon avis, il suffit de se poser 5' pour réfléchir à quelque chose qui nous met dans l'inconfort... et y revenir le temps d'identifier ce qui est vraiment en train de se passer.
Exemple: je peux être en apparence d'une mauvaise foi crasse pour contrer un adversaire... et très souvent, assez vite, je récupère des arguments épars pour expliquer mon premier mouvement. Dans le cas contraire, je m'autorise aussi de me trouver "à chier" pendant 5', puis à m'engager envers moi-même à reconnaître mon défaut d'écoute, pour réengager tranquillement les débats. On a ici quelqu'un qui fait ça très bien, et ça décoince régulièrement des débats crispés: d'mand'z'y voir, à Siesta, comment qu'y fait...
J'ai remarqué également que ça s'aiguise, ce genre de mouvement de balancier: il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer.
Dans le cas contraire, toute critique d'une idée est forcement perçue comme une critique de soi quelle que soit l'intention du contradicteur. Lorsque cette manière "dépersonnalisée" de fonctionner est adoptée dans un groupe, c'est souvent sous l'influence d'une personne charismatique et/ou autoritaire. Joli paradoxe, non ?
Je n'en vois pas!
Quant à chercher à imposer cette vision "détachée" tout en sachant que ça ne marche pas comme ça, je trouve que ça nous renvoie au premier texte sur la malhonnêteté intellectuelle... à méditer !
En effet, mais au cas de figure qui prétendrait que c'est impossible... or c'est ce dont tu viens de parler: les personnes charismatiques.
Qui ont, en plus d'un talent démontré, un modèle à proposer, et à imiter. Mais évidement, si ce n'est pas une solution, soit il y en a d'autres... soit c'est pas un problème. Je maintiens qu'on peut changer: c'est pas facile, ça prend du temps, mais il faut se lancer.
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patrice-86
le mardi 11 octobre 2011 à 13h51
Guérin nous dit que "cela (diaboliser/décrédibiliser) ne peut que maintenir l'absence de pensée, d'esprit critique et de raison, inhérent à l'autoritarisme et à l'arbitraire. Et lorsque cela domine, ce ne sont pas les idées les plus justes qui sont adoptées, mais celles de ceux qui crient le plus fort, et des plus charismatiques"... Pris au pied de la lettre, il décrédibilise a priori la seule voie qui permettrait de sortir de la "diabolisation" : suivre l'exemple de celui qui, par son charisme, peut faire évoluer la situation ! D'où le paradoxe que je soulignais.
Il va de soi, pour ma part que j'aurais formuler cela autrement, en positivant le rôle de "garant" du personnage charismatique...
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juste-pour-ecrire-cefil (invité)
le mardi 11 octobre 2011 à 16h42
Vazy, te gêne pas :-)
Tout ce qui est reformulé en objectifs positifs, c'est du bon, vu le titre du fil!
Sinon, j'aurai .écrit: " C'est quoi le mensonge"...
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Siestacorta
le mardi 11 octobre 2011 à 20h36
Popol
Exemple : je peux être en apparence d'une mauvaise foi crasse pour contrer un adversaire... et très souvent, assez vite, je récupère des arguments épars pour expliquer mon premier mouvement. Dans le cas contraire, je m'autorise aussi de me trouver "à chier" pendant 5', puis à m'engager envers moi-même à reconnaître mon défaut d'écoute, pour réengager tranquillement les débats. On a ici quelqu'un qui fait ça très bien, et ça décoince régulièrement des débats crispés : d'mand'z'y voir, à Siesta, comment qu'y fait...
1) Arrêtez avec la flatterie, c'est trop facile avec moi, ça marche à tous les coups :-)
(très peu d'ironie ici, juste ce qu'il faut pour que je me sente pas complètement con)
2) en vrai, l'honnêteté que j'ai, en débat, et dans la vraie vie autant que possible, c'est de savoir que j'ai des jours sans.
Des moments où je vais pas assurer, parce que j'ai un peu moins l'esprit clair.
Et puis, ya les autres, ou j'ai pris mon café, mangé mes céréales, tiré ma nouille / eu mon quota de bizous, et où, là, approximativement mais assez fortement pour que j'en tienne compte, je comprend un peu mieux pourquoi ma réaction affective a joué dans ma réponse, pourquoi l'autre est pas forcément aussi dans cet état d'écoute où on arriverait à avancer.
Je sais que c'est pas au top tout le temps. Que je peux essayer de faire au mieux, mais que j'arriverai pas toujours à le faire.
Alors, j'en tiens compte... Pas facile de pas transformer cette autocritique en autoflagellation (quoi que, parfois, ce soit une façon d'amener des choses plus justes), mais quand même, quand l'autre me dit "t'es pas clair sur pourquoi ta semaine prochaine est si peu ouverte à mes propositions", et que je sais que oui, effectivement, pour plein de raisons, je suis pas clair... alors je le dis. Avec un gros "JE", à la fois ferme (assertivité) et à la fois conscient d'être SEULEMENT un "je" (relativisme).
Admettre, en direct, qu'on est pas certain de ce qu'on dit, que, oui, peut-être, on se goure, qu'on est très pris dans sa subjectivité, qu'on on se ment un peu à soi-même sur ces motivations, c'est très souvent moins convaincant, sur le court terme.
Mais ça peut être très solide pour construire un truc à partir de l'échange, de mettre toutes les infos dont on dispose ;dont celles qu'on a sur soi et qu'on voudrait éviter de déballer. Pour que le choix soit possible, et libre, il faut donner clairement le contexte du choix, à soi, et à l'autre.
Si je ne donne pas ces infos, que je n'arrive même pas à les sortir de mes tripes parce que je crains d'avouer que j'ai tort et que je sais pas mieux que l'autre où on en est, alors je m'obstrue des choix, je me rend moins libre et je rend l'autre moins libre.
Avec cette idée, en plus, que la liberté est pas forcément ce qui est "bon". Plein de gens, dont moi, sont incapables de faire quelque chose de bien avec leur liberté. On se prend plein d'échecs, revers, qui nous contraignent sur le moment plus que si on avait pas essayé d'être libre. Mais, comme disait l'autre, ce qui n'est pas une réussite devient de l'expérience. Alors, si, à faire que mon honnêteté soit constructible, j'échoue une fois, ça veut pas dire que la fois d'après ça va être plus simple. La fois suivante, je peux encore échouer, mais j'échouerai mieux (là non plus je sais pas à qui je la pique).
Ce qui me sécurise dans mon honnêteté, le moment où je suis près à dire ce qui n'est pas le mieux à dire à ce moment là , c'est que si je la maintiens, on me donnera de nouveau l'occasion de la pratiquer, même si j'ai fait une erreur.
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Popol (invité)
le mardi 11 octobre 2011 à 23h54
Merci pour ça :-).
C'est pas la première fois que tu le dis, je trouve toujours aussi agréable de le relire, j'espère avoir encore l'occasion de profiter de ta lucidité...ça me fait me mettre au pageot avec le sentiment que ma journée a eu un cadeau Bonux.
Cool, tu m'épargnes de prendre ma valériane, je sens que je vais bien dormir.
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patrice-86
le vendredi 14 octobre 2011 à 12h01
Sur l'idée que chacun se fait de l'honnêteté et de la morale dans des situations concrètes, ce petit test est particulièrement éclairant :
unephedremoderne.blogs.marieclaire.fr/archive/2006...
A vous de jouer :-)
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Mysterhill
le vendredi 14 octobre 2011 à 18h28
j aime bien cette idée :
Vous êtes moral selon vos propres critères car vous estimez que la morale varie en fonction des circonstances.
Meme si je pourrais remplacer "circonstances" par "interets".
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Popol (invité)
le samedi 15 octobre 2011 à 07h17
Une morale qui varie selon les intérêts de la personne, c'est plus de la morale, c'est de l'éthique personnelle!
Et c'est pas une question de chinoiser sur des détails sémantiques: l'éthique est un système individuel, la morale le reflet des tendances qu'une société tolère et applique jusque dans ses lois à un moment de son évolution.
Je pense que cesser de prendre un terme à la place de l'autre peut clarifier pas mal de questions, outre le fait que "morale" est un mot lourd de sens, sur la question de l’acceptation et du rejet d'autrui.
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Mysterhill
le samedi 15 octobre 2011 à 09h59
Je ne faisais pas de distinction.( societe, declinaison individu)
J'ai même l'impression que c'est un lieu commun de dire que la morale fluctue en fonction des intérêts de la société, l'esclavage existe toujours. Dans morale, il y a moeurs, convenances ...Et le petit texte que nous propose patrice me semble plus dans ces termes.
Enfin sur la question de l'acceptation ou du rejet d'autrui, et bien on est en plein dedans ... Robin rejette marianne , petitbjean l'accepte ...
Et pour en revenir à l'honneteté, je dirais que c'est tant qu'on n'est pas pris. :-)
Un peu comme la realité, la verité, il n'y a rien d'absolu.
Mon honneteté pesonnelle serait de ne pas faire de mal aux autres.et c'est déjà un gros travail.
surtout quand la verité s'en mêle.
Si je sens que je vais blesser quelqu'un je prefere souvent temporiser et chercher une autre voie..
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Popol (invité)
le samedi 15 octobre 2011 à 11h43
La morale est directement issue des mœurs, c'est clair. Dans les bases de l'histoire du droit et de la loi, c'est même un basique: les mœurs déterminent ce qui est acceptable et punissable, la loi n'est que la mise sur papier - par des gens désignés comme gardiens -, de ces lignes directrices. Et ça change régulièrement, ce qui est écrit, pour des raisons diverses: la morale évolue, et aussi... il faut parfois réviser le droit constitutionnel pour pouvoir adhérer à une communauté de plus grande envergure que la nation (exemple: l'entrée de la Turquie dans l'UE).
Dans le même ordre d'idée, pour moi Petit Jean se situe juste avant Robin, mais pas avant les autres, parce qu'il profite de la situation inespérée qui se présente: je me méfie des super-malins qui comprennent immédiatement quel profit ils peuvent tirer de la situation... leur éthique est de celle qui va être la moins loyale à elle-même, comme si les éthiques régissant les situations précédentes se détachaient froidement les unes des autres, sans continuité.
Marianne est loyale à ses trois acolytes, et à son couple sur la durée, tout en étant déloyale sur une nuit à un aspect particulier de son couple, mais à contre-coeur. Là, c'est de la noblesse.
Le Sheriff est loyal à lui-même sur toute la ligne, c'est-à-dire déloyal envers tout le monde (encore heureux qu'il tienne parole pour la libération des prisonniers).
Robin est le roi des couillons, je trouve, dans l'histoire...
Et pour en revenir à l'honneteté, je dirais que c'est tant qu'on n'est pas pris. :-) Un peu comme la realité, la verité, il n'y a rien d'absolu.
Ouais! C'est pour ça que je m'intéresse aux situations vécues, plus qu'à la théorie.
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patrice-86
le samedi 15 octobre 2011 à 14h53
Il semblerait, Popol, que l'on est fait le même classement... mais pas avec les mêmes arguments ! A ce titre, peux-tu expliquer comment tu passes du concept d'honnêteté à celui de loyauté ?
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Popol (invité)
le samedi 15 octobre 2011 à 16h27
Ah oui, tiens, bonne question.
Alors... l'honnêteté est pour moi un concept général... et la loyauté son ressort et son outil quand on est en situation réelle.
Si tu veux, l'honnêteté c'est la physique théorique, et la loyauté, la physique appliquée.
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patrice-86
le samedi 15 octobre 2011 à 16h43
En effet, on passe de la "conformité à la morale" (ce qui peut sembler théorique) à la "conformité à la loi" (ce qui est concret) !
Et quand on est un anarchiste amoral, on est forcément déloyal et malhonnête ? Où quand un dictionnaire ne fait que refléter la pensée dominante :-)
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Popol (invité)
le samedi 15 octobre 2011 à 16h54
Oups, je pense qu'il y a confusion entre d'une part la loi, qui désigne une règle juridique suprême, générale et impersonnelle.
Et d'autre part la loyauté, qui est une qualité, servant largement de base philosophique; c'est-à-dire le dévouement envers une cause ou une personne.
Ne pas confondre... C'est la même racine, mais pas la même branche de l'arbre.