Texte frais, enthousiaste, et engagé, qui fait le tour du premier round polyamour, monoamour. Le genre de credo qui fait claper de la langue : c’est goûtu, ça a du retour !
Ca me remet une année en arrière, comme un petit album-photo. Je me refais passer le film, en ralentissant sur les images fortes…
Polyamour est plus qu’une philosophie, qui pourrait rester juste très théorique. L’exercice en est plus rigoureux, c’est pourquoi il faut s’attendre à des hauts et des bas, des retours en arrière, des petits bouts de deuil à refaire ici et là.
Une liberté oui, liberté aussi de ressentir très profondément des choses qui resteraient en filigrane sinon. Quand on évoque le monde dont on rêve, il ne faut pas oublier que quelques cauchemars restent accrochés, et qu’il va falloir dealer avec ça.
Le polyamoureux est obligé de se poser bien plus de questions que le monoamoureux, d’ordre pratique et quotidien (faut faire avec le partage...) : est-ce que je respecte mes partenaires, Loyse, Dany, Nat ? Et entre elles, entre eux, c’est comment ? Ca doit être comment ? Je dois m’en mêler, ou pas ? J’ai le droit, même ? Est-ce que je suis correct, et honnête avec moi-même ? Le courage du polyamour n’est pas tant d’oser – ça ne se fait qu’une fois, de franchir le pas… que d’oser rester dans ce mode amoureux, même s’il fait souffrir parfois. Et aussi d’accepter d’avoir besoin ici et là de se replier sur une relation, le temps de reprendre des forces.
C’est une chose à apprivoiser, à tenter par petites bouchées, pour éviter l’indigestion… et le rejet, qui survient parfois. On n’aime pas mieux parce qu’on aime plus de gens, si la qualité relationnelle ne suit pas. Ce n’est pas plus facile de dire pourquoi on aime, et la morale et la religion dans lesquelles on a baigné tenteront de repointer le bout de leur nez, alors qu’on est en train de lutter pour réinventer ses propres morale, religion et symbolique. Veillez au grain…
L’Homo Polyamorous n’est pas pour moi un produit de l’évolution du Monoamorous, mais une branche différente de l’arborescence. Un peu comme Sapiens et Neandertal qui ont cohabité sur terre. Le hasard a voulu que Sapiens soit mieux adapté, ou autre chose, va savoir. Sapiens n’est pas plus sage malgré son nom, c’est juste comme ça qu’on l’a appelé… Neandertal a eu une très riche culture, des préoccupations esthétiques et spirituelles. Il était plus robuste que Sapiens, et son cerveau était légèrement plus volumineux. Bref, Sapiens aurait pu disparaître, Neandertal survivre. Le hasard. D’autant plus que, par le plus grand des hasards aussi, le lieu de découverte des ossements en question, Neandertal, signifie
« vallée de l’homme nouveau »… et que rien ne nous dit qu’il n’a pas contribué génétiquement à Sapiens.
Homo Polyamorous n’est pas plus naturel que Monoamorous, ni moins, il est; juste ça. Bien sûr que les sociétés dans lesquelles nous vivons continuent à nous influencer, qu’on s’en inspire ou qu’on s’en distance, même en allant vivre sur une île déserte. Tout comme le mono, qui tente comme le poly de vivre en paix, et à sa manière. L’égoïsme est un ressenti très personnel, je crois. Si je pense honnêtement faire des efforts et porter mon attention vers mon partenaire, et qu’après des années il m’accuse d’égoïsme, la blessure est forte de part et d’autre. Cette expérience-là, je crois qu’elle est très répandue… Etre mono ou poly, à ce moment-là, ça ne protège personne.
Perdre un amour ne fait pas moins mal quand on est poly, et comme cela se répercute souvent sur l’autre relation, ce n’est pas plus confortable ; c’est juste différent, parce que c’est su. Un tas de choses et d’événements nous rapprochent et nous éloignent les uns des autres, souffrir d’un amour perdu en fait partie… si je suis consciente qu’il est dans un moment plus fragile, savoir que mon homme est triste d’avoir été quitté me suffit, mais je sais que je vais prendre un peu de distance, salutaire, quelque part en moi.
L’égoïsme, la possessivité sont des sentiments à considérer - ne serait-ce que par ce qu'ils sont ressentis, et rien ne sert de les nier. Ils n’ont rien à voir avec l’intelligence, mais plutôt avec la vanité – car quoi de plus vain au premier abord. Mais ça doit bien servir ou avoir servi à quelque chose à un moment donné de nos histoires, pour nous construire, individus, ethnies, sociétés et cultures confondues… et rien ne nous dit que nous en sommes débarrassés. Quelques heureux ne sentent pas la jalousie – ou le prétendent. Mais tout le monde fait de son mieux, et comme il le peut.
Message modifié par son auteur il y a 16 ans.