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Mono et DA : les réponses que le polyamour m'a apporté!

Témoignage
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Profil

Sif

le lundi 17 décembre 2018 à 23h38

Bonsoir à tous! :)

Si j'ouvre ce sujet ce soir, c'est parce que beaucoup de vos témoignages et de vos interventions m'ont aidé à évoluer vers qui je suis aujourd'hui. Un meilleur moi qu'hier, j'en suis persuadé. Je ne sais pas si cette maigre contribution pourra un jour aider quelqu'un(e) dans son propre cheminement. Mais si je peux donner un peu d'espoir dans au moins un cœur en transition par ma courte expérience aujourd'hui, je me dois de participer.

Je n'ai jamais posté sous ce pseudo, aussi je vais commencer par me présenter brièvement. Je suis Sif, je suis un homme (hétéro-cis), j'ai 25 ans et j'habite sur Nantes.
J'ai déjà posté sur ce forum il y a une année de cela, sous un autre pseudo. A l'époque je découvrais avec grande difficultés le polyamour et j'étais dans une grande période de crise, de bouleversements intenses en moi tant au niveau amoureux que dans les autres aspects de ma vie (crise de sens dans mon travail, dans mes relations amicales et amoureuses, dans mes hobbies...). Aussi je ne lierai pas le fil de cette ancienne discussion dont j'ai supprimé les messages, à la demande de mon ex amoureuse (ici le mon n'a pas valeur de possession sur l'autre mais sur mon amour, que je revendique encore aujourd'hui!) car ne m'étant pas relu j'avais oublié de masquer un prénom et ayant publié en anonyme, ne pouvais pas le modifier.

J'ai vécu depuis un peu plus d'un an deux relations avec des polyamoureuses, a des niveaux d'engagements différents. Les deux se sont soldées sur des ruptures, pour des raisons très différentes. Dans le premier cas je n'entretiens plus aucun contact, mes réactions post-rupture l'ont fait fuir et je ne la comprends que trop. Dans le second nous sommes dans une phase de lâcher prise nécessaire pour l'un et pour l'autre, nous réfléchissons à une manière de continuer de se voir de manière occasionnelle, de se donner des nouvelles et de pourquoi pas de continuer à partager sur le plan sexuel (puisqu'un partage affectif, bien que fortement inscrit dans mes besoins encore aujourd'hui, n'est plus possible pour elle) tout en préservant (ou devrais-je dire, recréant, puisque la communication est encore et toujours la vilaine fautive) un espace d'écoute nous permettant d'avancer sans se blesser, au mieux.

J'ai un parcours que je ne considérerait pas de particulièrement original, mais c'est le mien. J'ai eu ma première relation à 14 ans, j'ai eu plusieurs petites amies et relations à différents niveaux d'engagements, toujours dans une monogamie en série. J'ai trompé pour la première fois à l'age de mes 15 (ou 16?) ans ma petite amie de l'époque pour une autre, acte que je n'ai jamais plus reproduit. J'avais alors réalisé la double expérience de tromperie, puisque cette nouvelle relation se terminait de la même façon qu'elle avait commencé : j'ai été trompé. Ça a été mon éveil à la tromperie. Et bien que jeune, bien que sans engagement sur du long terme, sans projets et en plein pieds dans la NRE (que je ne distinguais pas de l'amour à l'époque) j'ai su dès lors que ce mode de fonctionnement ne me conviendrait jamais. Ce fut un premier éveil au moins au désir simultané de deux personnes. Ne connaissant alors pas d'alternative à l'époque, je n'ai pas pu dire à ma chérie de l'époque avec qui j'étais depuis 8 mois que si je l'avais trompée, ce n'est pas que je préférais l'autre, qu'il n'y avait pas de confrontation dans mon cœur. Que ce désir était présent mais n'éteignait pas l'autre. J'ai alors préféré trahir la confiance dans l'immédiat de mes envies, "on a qu'une vie, Rock'n'Roll" comme dirait le Sif aux cheveux longs de l'époque (et qui y reviens doucement après des années d'instabilité capillaire). Affronter le regard de l'être trahi pendant toutes mes années de lycée (nous fréquentions le même) n'a pas été une expérience facile à vivre de mon côté comme du sien.
S'en sont suivi d'autres relations, certaines qui n'avaient pas ce sens de partage et d'épanouissement que je recherche et ressens quand je suis réellement en amour aujourd'hui et qui répondaient uniquement à un besoin, affectif ou physique. Une autre, l'année de mes 17 ans a été une relation intense de partage mais la distance (Nantes-Marseille), d'autant plus dans cette condition sans finances de lycéen a rendu cette relation trop complexe a gérer pour nous deux, ayant des besoins non comblés. Si j'avais su (et elle aussi) à l'époque qu'il n'était pas nécessaire d'arrêter ce partage occasionnel pour s'épanouir ensemble et partager du bonheur d'être ensemble, la barque aurait peut-être été menée différemment. Mais je ne regrette plus jamais le passé aujourd'hui : toutes nos expériences sont un apprentissage en soi et pour soi, qu'il faut savoir entendre afin de grandir. C'est pour ça que j'ai parlé brièvement de ces relations car même si elles n'ont pas de rapport direct au polyamour j'ai su en tirer des enseignements des années plus tard sur ce qui aurait pu être différent si cette alternative aux relations était plus ancrée dans notre culture, si ce déconditionnement n'était pas entièrement à faire le jour où ça nous tombe dessus, si on valorisait le lien d'amour en premier lieu. Cela m'a aidé, en somme, à considérer le polyamour comme une alternative viable et à l'envisager comme un possible bien plus tard.

L'année de mes 18 ans, j'ai rencontré quelqu'un. Cette personne était tendre, différente de moi et loin de mes critères physiques de l'époque (critères ayant disparu aujourd'hui, fonctionnant au feeling car il n'y à aucun point commun physique ou presque entre mes différentes amoures). Je ne me doutais pas à l'époque que j'allais passer les 5 années suivantes de ma vie avec elle, dont 3 à vivre sous le même toit à Nantes (en passant par un petit appartement au bord de la mer sur la côte au cours de la seconde année de vie commune). J'y ai vécu une relation intense, mais non passionnelle. Intense dans le réconfort, la chaleur humaine, le respect, l'écoute et la bienveillance. J'y avais trouvé la relation "parfaite" que j'attendais à l'époque, elle répondait à tous mes besoins affectifs et plus encore. Trop, en fait, mais je ne m'en rendais pas compte à l'époque. La passion a laissé place à une relation où l'on prenait trop soin loin de l'autre, devenant inconsciemment comme des "parents" l'un pour l'autre. Le temps à fait que je si je pouvais aimer ma "mère" de substitution, je ne pouvais plus la désirer. A cela s'ajoutaient énormément de question sur un vide que je ressentais de plus en plus, que je comblais alors comme je le pouvais dans le cannabis, l'évasion dans le jeu vidéo, la pornographie. Ce vide à commencé à prendre beaucoup trop d'ampleur pour être vivable. Il est apparu progressivement, mais j'étais à l'époque un vrai handicapé de la communication. Si j'avais dit au Sif de l'époque qu'il serait aujourd'hui en train de livrer son histoire sur un forum qui traite des amours multiples, il me rirait au nez, lui qui était incapable de dire aux gens qu'il aime (amoures, ami(e)s, famille..) ce qu'il se passait en son for intérieur. Ce manque de désir pour mon amoure alors me pesait beaucoup, mais j'étais résolu à ne pas lui en parler trop. Aussi j'avais abordé le sujet, a ma manière maladroite de l'époque, mais ne souhaitais absolument pas donner l'impression de "mettre la pression" sur notre relation. Cela m'aurait fait bien plus de mal qu'elle se "force" à avoir des relations sexuelles de manière plus fréquentes pour me faire plaisir, pour me garder. Je n'aurais jamais pu bien vivre ça, ses envies ne rejoignaient plus les miennes. Il faut dire qu'on avait aussi laissé de côté tout le côté passionnel pour aller vers autre chose. Défaut de communication très certain de ma part, n'ayant jamais pu alors exprimer mes sentiments correctement et arrivé à un point ou je n'étais que ressentis, et où je sentais la cocotte sur le point de déborder. J'ai choisi de me séparer d'elle au bout de ces 5 ans (cela fait 2 ans maintenant), n'ayant à l'époque toujours pas en vue cette possibilité de vivre mes amours autrement, d'une meilleure manière pour moi et les autres.

Cette rupture m'a permis d'entrevoir de manière assez claire ce dont je souffrais : de dépendance affective, à un niveau assez élevé. Ce vide que je ressentais, j'ai toujours attendu de toutes mes relations qu'elles le remplisse. Et au delà de mes relations, de mon rapport assez fréquent à l'alcool, au cannabis, au porno, aux jeux-vidéos à l'excès (de 20h à parfois 4h, je paye encore les conséquences de plusieurs années de déficit de sommeil aujourd'hui), aux sensations fortes, à l'abandon dans des activités chronophages et non enrichissantes pour inconsciemment combler ce vide qui n'a fait que grandir au fil des années.

Je n'avais pas encore entrepris de thérapie au sortir de cette relation. J'ai jugé bon de faire mon deuil relationnel et de trouver dans ce célibat ce qu'il me manquait dans cette relation : le sexe. J'ai eu une amie avec bénéfices quelques mois après cette relation et ce pendant quelques mois. Je me suis vite rendu compte que le sexe sans sentiments, sans renier bien sur le plaisir du jeu, de la découverte des corps, du plaisir donné et reçu.. ça ne me convenait pas. J'ai besoin d'écoute, d'empathie, de confiance, d'affection et de sexe. Et je me rendais malheureux que ces besoins ne soient pas comblés par une seule et unique personne à qui je donnais la charge de tous les régler. Cette amie avec bénéfices est tombée amoureuse de moi et souhaitait une relation avec plus d'engagement, ce qui n'était pas mon cas. Nous avons alors stoppé cette relation.

A cette époque, j'étais en grand questionnement sur mon rapport à l'informatique de manière générale. J'étais cadre en développement logiciels dans une SSII (ah, on me dit dans l'oreillette qu'on dit ESN maintenant?). Mais avec la rupture précédente, tout avait été remis en question en moi : mon rapport à l'amour, ma communication, mon rapport aux autres, mon rapport au travail et à l'écoute de soi. Car si j'ai toujours su prêter une oreille attentive, si les gens ont tendance à venir vers moi car je suis doué d'écoute et d'empathie, je n'avais jamais développé la capacité à écouter mes propres ressentis et mes émotions. Quand j'étais envahi par le négatif ou le vie, ce brouhaha prenait simplement possession de moi et j'étais incapable d'y voir clair moi même : comment pourrais-je un jour être honnête avec les gens que j'aime sur ce que je ressens si j'étais incapable de discerner quoi que ce soir autre qu'un assourdissant bruit blanc en moi ? Et en ce qui concerne le travail, les raisons qui m'avaient poussé à choisir cette orientation professionnelle face à la réalité du métier, à sa froideur que j'y ressentais alors n'étaient plus en adéquation avec un besoin nié et inconscient de prendre du temps pour moi, de faire le point sur ma vie, de comprendre les réelles sources de mon insatisfaction permanente et les solutions à y appliquer pour vivre heureux.

Je changeai alors d'entreprise. Toujours en ESN, mais d'emblée sur un projet a équipe réduite et sympathique dans une structure qui si elle est aussi grande, avait le mérite de proposer des locaux et un cadre beaucoup plus humain. Je me sentais professionnellement revivre! Et au bout de quelques mois je rencontrai sur mon lieu de travail l'amoureuse qui m'introduit au polyamour. Elle me l'annonce à notre premier rendez-vous. C'est une nouvelle que je ne prends pas beaucoup de temps à considérer : je suis quelqu'un d'ouvert d'esprit, et tel qu'il me l'a été décrit je me suis dit que j'y trouverais peut-être une réponse aux "échecs" (alors considérés comme tels) de mes précédentes relations. Tout va très vite et nous sommes déjà à passer tout notre temps ensemble. En plus du travail nous nous voyons tous les soirs, soit chez l'un soit chez l'autre. Et très vite, le vide me rattrape. Mes insécurités me rattrapent, mon angoisse de l'abandon aussi. Ces blessures sont réactivés car elle me parlait de son ex, elle éprouvait beaucoup de tristesse. Je souhaitais être là, lui apporter cette écoute, cet espace de discussion que je n'avais jamais su offrir pleinement auparavant. Les rares fois où un tel dialogue à pu exister, ce fut au prix de grandes souffrances pour moi (causées par moi-même en réalité, par mon anticipation du futur, mon attachement au passé, ma non confiance en moi, ma non-indépendance, mon incapacité sauf en de rares moments d'être pleinement au présent, à ce que j' "ai" plus qu'à ce que je risque de "perdre"). J'ai fait une dépression. Elle est partie deux fois en vacances pour voir ses amis quelques jours et à chaque fois, cette impossibilité de me lever, cette perte de sens, de buts dans ma vie. Le projet qui me plaisait s'était arrêté pour raisons financières et je ne me plaisait pas dans mon nouveau projet. Je n'avais plus le goût au travail et pour ainsi dire plus le gout à la vie. Je suis allé voir un médecin dans un premier temps qui m'a prescris des anti-dépresseurs et des anxiolytiques que je n'ai jamais pris. J'ai passé une partie de ma vie à endormir mes ressentis négatifs au cannabis et ça ne soigne pas les blessures, ça ne fait qu'endormir les crises. Un usage médicinal ciblé pour apaiser des crises ne me paraissait pas la bonne solution. Je ne voulais pas "être d'attaque pour continuer à vivre en société", ce n'était pas ma requête profonde. Ma requête était de trouver ce qui causait ce mal-être, d'y travailler et de le régler.

C'est à cette époque que j'ai découvert le forum PA.info . Vous m'avez permis alors, de par vos témoignages, à apaiser cette peur d'être abandonné, de mieux comprendre les vécus, que les difficultés d'acceptation que je ressentais étaient partagées par d'autre. Cela m'a été d'un grand recours quand personne dans mon entourage proche n'a su me prêter d'oreille attentive, sans jugement. Car jugé, j'ai été. Les gens de confiance, mes amis, ont tous refusé ce lien pour moi. "Peur de l'engagement, et la famille ?, pas sain, c'est pour les gens qui ne savent pas ce qu'ils veulent, on est plus à Woodstock, elle veut juste baiser plein de gars et appeler ça amour, et d'ailleurs quand on aime on aime qu'une personne sinon on n'aime pas" et j'en passe. J'ai pu alors comprendre qu'ici une écoute, un dialogue était possible. Et j'ai participé, à ma manière. Dans ma dépression, sans n'avoir rien réglé, en plein dans mon brouahaha de ressentis contradictoires et générés par ma propre personne, en cassant tout sur mon passage. Il était de toutes façons trop tard : de par ma façon d'être, ma non communication, par tout ce à quoi je m'identifiais et ce que je ne savais pas encore de moi, j'ai trop pesé sur cette relation à laquelle elle a mis un terme pour se préserver. Ce fut le deuil relationnel le plus compliqué de toute ma vie. Elle m'avait alors proposé de garder contact, de transformer notre lien afin de pouvoir (c'est mon interprétation aujourd'hui) se garder près l'un de l'autre sans se blesser, où en se blessant moins. Et moi encore, dans mes projections, dans mon deuil intense et jamais ressenti auparavant de dire oui puis non, je t'aime puis je te hais.. au point qu'elle coupe contact.

J'ai commencé par changer de bâtiment pour ne plus la croiser tous les jours. On m'a mis sur un poste à responsabilités, où je faisais des allers retours entre le client à Paris (autant dire interdiction de laisser s'échapper la moindre émotion) et le centre de services à Nantes. Je me suis rendu compte au bout de quelques mois que ce n'était plus possible. Tout était remis en question, j'étais dévasté. Mon deuil n'avançait pas, ce poste m'en demandait trop, j'avais besoin de repos, de confronter ce vide, de trouver du sens à ma vie, dans mes actions, mon travail, ma communication, mes relations. J'étais totalement en perte d'identité. J'ai fini par faire un abandon de poste et retourner chez mes parents à une 50aine de km de Nantes, près de la côte.

J'ai entrepris un suivi psychologique. J'en ai ressorti plusieurs choses au bout de plusieurs séances. J'ai pu comprendre d'où venait ma dépendance affective et mes angoisses d'abandon "injustifiées" (mère absente pendant la petite enfance, puis trop présente quand elle est revenue) dans un premier temps. Dans un second temps, cela m'a permis d'entreprendre vraiment mon deuil relationnel, en apprenant à écouter mes émotions, à comprendre ce qui venait de l'autre et ce qui venait de moi. Enfin, de comprendre ce dont j'avais vraiment besoin: d'apprécier ce vide en moi, de l'apprivoiser, de ne plus lutter. D'accepter ce qui est et ce qui a été comme une part de mon passé, d'en tirer des enseignements, d'en grandir. D'apprendre, au fur et à mesure à lui sourire quand il se manifeste (et c'est devenue rare, malgré les déclencheurs auxquels je me suis confronté en conscience pour me tester), à l'apprivoiser et à le combler moi-même.

A de moment là, j'avais arrêté mes lectures entamées (J. Salomé, "Le Courage d'être Soi" et l'ebook d'Hypathia conseillé à l'époque par bonheur). Je considérais le polyamour comme vecteur de souffrance pour moi, de par les blessures qu'il ravivait et que je ne pouvais gérer et avait donc considéré que ça ne me correspondait pas, que je n'étais pas prêt. J'ai supprimé alors mon compte de l'époque. Pour accompagner mon deuil j'ai décidé de me remettre sur des sites de rencontre, sans vraiment d'attente autre que partage et éventuellement amitié (ne me sentant prêt pour rien d'autre) afin d'au moins détourner un peu mes pensées de mon ex. Sans attente, j'ai rencontré quelqu'un avec qui le courant est bien passé, très bien passé. Et elle est polyamoureuse! Je me dis alors en rigolant "diantre, la foudre peut donc tomber deux fois au même endroit!". Elle me plaisait beaucoup, on passait des bons moments ensemble. J'avais deux solutions : refuser d'alimenter ce lien par principe, puisque la nature de la relation m'avait blessé auparavant ou bien prendre la décision en conscience d'essayer, cette fois en sachant mieux m'écouter et communiquer, en apprenant des erreurs du passé. Je choisis la seconde option.

La relation a duré quelques mois. J'ai été beaucoup moins dans l'anticipation, mais pas toujours dans un état serein. J'ai été confronté cette fois-ci a de vrais déclencheurs (je l'ai vu embrasser son ex en arrivant en avance chez elle un jour (moi en avance, quelle idée de me dénaturer ainsi!)), elle avait une relation d'amour platonique avec un métamour et voyait encore quelqu'un d'autre de temps à autres pour une relation sans sentiments, uniquement sexuelle (bien qu'ils aient eu un passif, et dont elle ne m'avait alors pas parlé). Je me suis rendu compte avec tout ce vécu que pour moi ce n'était pas tant l'instant qui blesse, qui ravive les blessures, que son anticipation. Que notre imagination, nos angoisses qui essayent de reprendre le contrôle en imaginant les scénarios. Que la grande source de souffrance dans mon cas était la mentalisation, pas l'acte en lui même. Lors de son week-end avec son autre partenaire sexuel (sexe qui est je le sais mon plus gros déclencheur à ce jour, mais j'y travaille), bien que loin d'éprouver de la compersion, je n'ai pas souffert. Parce que j'ai su apaiser mes mentalisations, j'ai su ne pas ruminer toute la semaine avant que ça arrive. Pas en étant dans le déni quand j'y pensais, mais simplement en acceptant ce que je ressentais, en m'écoutant. Qu'en écoutant la tempête sans porter de jugement, sans m'en vouloir de ressentir ainsi, sans en vouloir à l'autre d'être ainsi, la tempête se dissipait d'elle même car elle n'avait rien à dire sinon sur moi. J'ai pris la responsabilité de mes propres blessures, et de leurs guérisons. Alors bien sur, avant d'en arriver là il y a eu des couacs. J'ai quand même eu des jours où j'étais inconsolable, il y a eu des moments difficiles. Notre relation telle qu'elle était est aujourd'hui terminée parce que nos désirs ne rejoignent pas nos besoins d'indépendance respectifs. On s'est donnés des intentions que l'on n'avait pas avec le filtre de nos passés meurtris respectifs (et je ne me plains pas du mien sachant le sien), on a eu des soucis de communication qui ont mené à la rupture. Nous nous sommes revus une fois depuis pour discuter calmement de tout ça, afin de s'accorder des deuils apaisés. De pouvoir se dire en conscience ce que nous avions besoin de dire. Le travail sur la communication ne s'arrête jamais. Je n'ai pas envie qu'elle sorte de ma vie et c'est réciproque, et souhaitons toujours partager mais autrement. Nous nous revoyons demain soir afin de discuter de ces modalités de cet autrement.

J'ai bien conscience ici de ne pas parler que de polyamour.
Si j'ai tenu à témoigner ici de tout ça, c'est pour mettre plusieurs choses en avant que je juge pertinentes et je l'espère qui pourrait peut-être un jour être utile à d'éventuels monos ou DA en transition qui cherchent à soigner leur blessure tout en gérant une transition vers le polyamour, de la même manière que vos témoignages ont pu m'aider à mieux comprendre ce mode relationnel et me connaître mieux moi-même :
- Si je cherche dans toutes les relations qui ont eu du sens pour moi à ce jour, il est des liens qui auraient pu perdurer, des amours qui auraient pu continuer de s'enrichir et de s'épanouir si j'avais eu connaissance du polyamour et avait entrepris ce travail sur moi plus tôt. J'étais pourtant plutôt mono convaincu.
- La communication est la clé. Un de mes torts a été de prendre le contrepied de ma vie de "ne rien dire" à me permettre de "tout dire" et de noyer l'autre sous mes ressentis sans comprendre l'impact de mes actes sur l'être aimé. Pour communiquer en pleine conscience de soi et de l'autre, il faut d'abord à se connaître soi. Apprendre à accepter la tempête, à l'écouter, pour comprendre ce qu'elle à à nous dire sur nous même. Et de là se responsabiliser par rapport à ses propres blessures et ne plus imputer à l'autre la charge de les régler pour nous mêmes.
- Voir un psychologue peut aider à travailler sur ses propres blessures. Par contre dans mon cas, il considère que le polyamour n'est pas sain. Si je m'en fiais à son jugement, je devrais arrêter de lire ici et "fuir" ce mode de relations pour retrouver ma sanité. Heureusement, c'est moi qui le paie :).
- Le polyamour m'a permis de me trouver, de me découvrir. Cela s'est peut-être parfois fait dans les larmes, dans la souffrance, mais je ne me suis jamais aussi bien connu et senti qu'aujourd'hui. C'est assez paradoxal : je n'ai plus d'emploi, je suis de retour chez mes parents, je suis de nouveau célibataire après ce qu'on pourrait considérer simplement comme un nouvel "échec" relationnel (ce que je me refuse de faire). Mais j'ai gagné un souffle de vie que j'avais perdu depuis des années. Travailler sur mon indépendance affective, même si tout n'est pas parfait encore m'a ouvert la porte sur l'ensemble de mes dépendances et sur mes comportements qui généraient de la souffrance en moi, et sur comment les modifier durablement. Aujourd'hui je ne fume plus du tout (de cigarettes et de drogues), je vapote encore un peu avec pour objectif 0 nicotine pour 2019, j'ai trouvé un nouvel emploi dans une société de taille plus petite, plus proche de ce que je recherche et je commence début janvier (après deux semaines d'entretien), j'ai rétabli une alimentation saine, le sommeil j'y arrive de mieux en mieux, j'ai perdu les kilos dont je ne souhaitais plus. J'arrive désormais à m'apprécier mentalement et physiquement, ce que je ne croyais plus (pas?) possible ayant depuis aussi longtemps que je m'en souvienne des soucis de confiance en moi. Nouvel appartement dans quelques mois, nouvelle vie en solitaire sans appréhension de la solitude.
- ... et le plus important. Le polyamour de mes ex m'a appris à mieux comprendre, vivre, apprécier l'amour. D'apprendre à recevoir, ce dont j'étais incapable. D'apprendre à m'en satisfaire et à m'y épanouir vraiment sans projection, dans l'instant présent. Je me sens littéralement grandi par ces expériences!

Mon avis n'engage que moi, mon vécu. Il n'a pas pour vocation à servir d'exemple. Je ressentais juste l'envie (et le besoin aussi!) de témoigner d'un amour.. pour vous.
Là où je n'ai su trouver dans mon entourage d'écoute, de guidage, de conseils quand j'étais en roue libre, vous m'avez été d'une grande aide. Les ouvrages que j'ai lu et lis encore aujourd'hui (du Salomé, du Thalmann, Eckhart Tolle..) qui ont grandement contribué à mon apaisement m'ont été conseillés ici.

Aujourd'hui je suis persuadé que le polyamour n'a jamais été la cause de mes souffrances. Il a été révélateur de mes blessures, et en cela m'a permis de me responsabiliser et d'apprendre à les régler. J'y travaille toujours, comme sur la communication relationnelle où j'ai encore du chemin à accomplir. Je ne ferme pas de portes, je reste ouvert à la vie et il faut garder espoir.

Je n'ai à ce jour ressenti ni la compersion, ni n'ai concrétisé le polyamour dans son application pour moi-même. Je sais aujourd'hui avoir aimé plusieurs personnes simultanément, de manière différente et sans que l'amour envers l'une n'enlève à l'amour envers l'autre. Je ne sais pas si j'aurais l'occasion de faire l'expérience un jour de l'un ou de l'autre, je ne souhaite plus me projeter trop avant pour le moment. Ce que je sais c'est que je n'en serais pas là où j'en suis aujourd'hui sans ces expériences. Et pour cela, je remercie cette magnifique façon d'aimer qui ne possède ni n'écrase, qui valorise et qui entends dans sa nature (pas toujours dans son application). Et qui permet à chaque lien d'exister dans son unicité, qui permet à l'amour de gonfler sans rien enlever dans nos cœurs.

Si tu as eu le courage de lire jusque là sans te décourager et que tu viens au prochain café poly organisé sur Nantes, je t'offre une bière ou un thé.

Avec tout mon amour! :)

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Sif

le lundi 17 décembre 2018 à 23h39

Ah et au fait.. /!\ Alerte Pavé /!\
Comment ça il fallait prévenir avant ? :-/ <3

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bonheur

le mardi 18 décembre 2018 à 10h42

J'ai presque tout lu ! élève moyenne donc... :-D

Je retiens en particulier ceci :

Sif
Pas en étant dans le déni quand j'y pensais, mais simplement en acceptant ce que je ressentais, en m'écoutant. Qu'en écoutant la tempête sans porter de jugement, sans m'en vouloir de ressentir ainsi, sans en vouloir à l'autre d'être ainsi, la tempête se dissipait d'elle même car elle n'avait rien à dire sinon sur moi. J'ai pris la responsabilité de mes propres blessures, et de leurs guérisons.

Je te souhaite une guérison dans l'apaisement. Je suis très préoccupée par moi actuellement, mais je suis présente Sif. D'ailleurs, j'ai commandé ce we de nouveaux livres. Je les énonce pêle-mêle ici, pour que ceux qui lisent, notent éventuellement :

Ruediger Schache : "les 7 voiles pour atteindre la vérité" "les 10 secrets du magnétisme amoureux" "le conseiller du coeur"
Gary Chapman : "les langages de l'amour" "ce que j'aurais aimé savoir avant de me marier"

Concernant "les 10 secrets du magnétisme amoureux", je l'avais lu, un de mes amours me l'avait prêté... et je pense que je devrais le relire (ce que je fais rarement)

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Heika

le mardi 18 décembre 2018 à 11h24

Bon, plus qu'à me rendre au prochain café poly de Nantes (bière ou thé, pas de préférence) ;)

Merci pour ce magnifique témoignage. Merveilleux présent que tu nous fait là <3

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bonheur

le mardi 18 décembre 2018 à 11h38

Pour moi, ça aurait été bière, mais depuis Dijon, ça ferait loin :-( . Par contre, je rencontrerai volontiers Sif (+) .

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Caoline

le mardi 18 décembre 2018 à 12h52

Joli témoignage qui je pense en effet peut être utile à d'autres. Merci de l'avoir écrit ici.

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Toinou

le mardi 18 décembre 2018 à 17h00

Bon bah, on est de passage sur Nantes pour le nouvel an, je prendrais une bonne bière ;)

Bon ok, je ne sais pas s'il y a un café poly à ce moment... Mais quand même...

Sinon, long récit, riche en auto-compréhension. Bravo. Et bon vent ;-)

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Siestacorta

le mardi 12 novembre 2019 à 20h53

Sif


Aujourd'hui je suis persuadé que le polyamour n'a jamais été la cause de mes souffrances. Il a été révélateur de mes blessures, et en cela m'a permis de me responsabiliser et d'apprendre à les régler. J'y travaille toujours, comme sur la communication relationnelle où j'ai encore du chemin à accomplir. Je ne ferme pas de portes, je reste ouvert à la vie et il faut garder espoir.

De liens en aiguilles je tombe là-dessus...
Merci.
Pourquoi les psys comprennent pas que le polyamour, oui, on peut se faire mal dessus, mais qu'on y apprend aussi tellement ? Qu'on y croise, et parfois embrasse, des vies qui rendent un peu moins con ?
C'est pas plus destructeur que toutes les autres fois où on sort de nos zones de confort. Ca peut faire mal, mais c'est pas fondamentalement néfaste.
Et même pour quand on finit pas vraiment poly à la fin, et même si ce n'est qu'une époque pour certains, pourquoi ce serait pire de passer par là que les blessures et ruptures monos ? Alors qu'en plus, on a quelques chances de tomber sur des gens attentifs à des recherches d'équilibre "in progress", qui s'imposent pas une solution unique en béton ça marche pour tous sinon c'est toi le problème ?
Pourquoi on prend pas en compte quelques bons côtés ? Bien sûr que ça questionne, bien sûr que c'est exigeant. Mais à l'opposé, se réfugier dans une sécurité exclusive où on peut tranquille se noyer dans la saumure et s'illusionner jusqu'à la lie sur soi-même et ses rapports, ça passera mieux auprès des proches et des familles et du psy, parce que tout le monde y le fait... Ah ça, se serait cool. L'oiseau qui est né en cage croit que voler est une maladie.
Greu.

Bref. J'espère que depuis ça, t'es toujours pas trop mal sur ton chemin.

Message modifié par son auteur il y a 3 ans.

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HeavenlyCreature

le mardi 12 novembre 2019 à 22h42

À fond Siesta! De ces 2 dernières années je ressors avec la quasi certitude que le polyamour n'est pas pour moi. Pour autant, je suis reconnaissante du chemin que ces expériences amoureuses plurielles m'ont fait parcourir. C'est justement pcq elles m'ont profondément fait violence que j'ai pu toucher du doigts mes fonctionnements et mes blessures, que j'assume enfin mes limites. Non pas pcq c'est la norme, mais pcq ce sont MES besoins profonds.

Message modifié par son auteur il y a 3 ans.

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artichaut

le mercredi 13 novembre 2019 à 02h31

HeavenlyCreature
Non pas pcq c'est la norme, mais pcq ce sont MES besoins profonds.

C'est le problème d'une norme qui se donne pour le Tout, et comme telle invisibilise toutes les autres façon de faire ou d'être : quand on commence à remettre en cause les normes, c'est pas simple d'accepter qu'on puisse éventuellement être, finalement, à certains égards, proche de cette norme.

Car des questions font surface : est-ce par habitude ? est-ce parce que c'est confortable ? ou bien parce que je suis ainsi ?

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artichaut

le mercredi 13 novembre 2019 à 02h39

« J'ai toujours crû que j'étais un citron, parce qu'on vit dans un monde où tout le monde s'habille en citron, parle comme un citron, vit comme un citron, que les films et livres ne parlent que de citrons, etc. Puis un jour je découvre que ce ne sont que des déguisements, et sous ces déguisements il y a des clémentines, des oranges, des poires, ou même des ananas, des mangues, des pommes, des kiwis, etc. Truc de ouf ! Pourtant dans toute cette immense pluralité, il y en a bien quelques un·e·s (très très peu en vrai) qui réellement sont des citrons. Parce que les citrons existent aussi, en vrai, et pas que comme déguisement. Mais pour être un citron réel, faut quand même se débarrasser de son déguisement de citron. Parce que un déguisement de citron, sur un citron, c'est tout de même un peu inutilement encombrant ! »

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artichaut

le mercredi 13 novembre 2019 à 05h55

…sur la dépendance affective (DA) j'ai trouvé ce fil (y'en a d'autres) : Amours pluriels ou manques pluriels ?

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