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[Film] [Docu] Trust Me de Joanna Ratajczak, 2024

Culture
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artichaut

le samedi 27 septembre 2025 à 23h39

Trust Me, documentaire de Joanna Ratajczak, 2024, 1h27
Film en allemand, polonais et anglais, sous-titré en français.
Liens : AlloCiné, Instagram, Arte, Canal+

Pitch : Par amour pour son mari, une femme accepte d'ouvrir leur relation à de nouvelles expériences. Pendant quatre ans, une amie réalisatrice a filmé l'évolution de leur couple au plus près de leur intimité.

Présentation d'Arte
Alicja et Sebastian ont tout pour être heureux : une vie confortable entre Berlin et la campagne, deux beaux enfants et des métiers qui les comblent. Mais après quinze ans de vie commune, Sebastian est pris d'un irrépressible désir de liberté amoureuse et demande à Alicja d’ouvrir leur couple. Par amour pour lui, elle accepte de le suivre dans ce voyage à l’issue incertaine…

Profonde métamorphose
De 2019 à 2023, la réalisatrice Joanna Ratajczak, proche amie du couple, a filmé Alicja et Sebastian dans leur intimité, montrant la profonde métamorphose de leur relation et de leur vie familiale. Si Alicja confie ses pensées en voix off (en polonais, sa langue maternelle), le récit n’occulte pas le point de vue de Sebastian et montre comment l’histoire de chacun a façonné leur manière d’envisager leur vie affective. Lui, qui a grandi en Allemagne de l’Est, a connu une première vie maritale avant de découvrir, à la chute du mur de Berlin, combien la liberté était une valeur fondamentale pour lui. Alicja, de son côté, a eu une jeunesse très libre qu’elle considère comme fondatrice pour sa vie d’adulte. Angoisses d’abandon, jalousie, problèmes de communication, recherche de compromis… Dans un douloureux crescendo, le documentaire rend sensibles les difficultés auxquelles chacun se heurte, tout en laissant entrevoir l’espoir de les voir trouver un équilibre.

*
Merci à @Paul-Eaglott d'avoir signalé ici ce film. J'ai préféré en faire un fil autonome, pour pouvoir en parler.

Et pour commencer, je le cite :

Paul-Eaglott
Ca ouvre de multiples réflexions... Sur la juste dose de mise en scène dans un documentaire, sur les difficultés à communiquer à bon essient, sur la maladresse et ses (non-)conséquences, sur l'empathie et son absence, sur le mansplaining (quelques scènes bien salées !), et sur toutes les questions peu ou pas abordées dans le film : les rapports de pouvoir, les questions matérielles, etc.


— Si vous n'aimez pas le spoil et n'avez pas vu le film, ne lisez pas la suite. —

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artichaut

le dimanche 28 septembre 2025 à 00h05

Quitter la monogamie doit-il nécessairement se faire dans la souffrance ?
Et si oui pourquoi ?

La principale protagoniste du film, Alicja, accepte par amour pour son mari Sebastian d’ouvrir leur couple. Elle souffre, mais ne veut pas renoncer à leur projet. Notamment car elle a connu la liberté sexuelle dans sa jeunesse, alors que lui, non. Mais aussi car il insiste vraiment beaucoup.
Finalement elle s’ouvrira elle aussi à la liberté que prône tant son homme.
Ensemble ielles vont découvrir le couple libre, d’abord très subi avec très peu de mots et beaucoup de souffrance contenue, puis les conversations intimes et profondes, le sexpo, la fête, la drogue, le travestissement, la vie presqu'en comunauté ou en tout cas des vacances prolongées à plusieurs, l'amour libre, le shibari, le monde du «  bien être » ou du développement personnel… jusqu'à s'engager dans un trouple avec Camila qui vient tout bouleverser.

Alicja est enfin heureuse. Cette souffrance initiale était peut-être utile ? Nécessaire ?
Ielles continue désormais à trois : la NRE, le mariage symbolique à trois, puis les difficultés refont surface malgré la thérapie de couple et la sincérité radicale.
Alicja finit par se rendre compte qu'elle a toujours concédé aux désirs de Sebastian, son mari, et a si peu écouté ses propres désirs, ses limites, sa liberté.

Le personnage de Sebastian est par moment touchant, mais aussi souvent très énervant dans sa fausse naïveté. On aimerait que lui aussi soit confronté à la question de la jalousie vs compersion.

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artichaut

le dimanche 28 septembre 2025 à 00h13

J'ai beaucoup aimé les parti pris de la réalisatrice. Très peu de mots, beaucoup de suggestions et de scènes de vie filmées. On se retrouve un peu en immerssion avec elles-eux.

On est loin, très loin de ces docus/reportages qui se composent d'une série interminables de plan fixes d'interviews face caméra (devant lesquels je m'ennuie toujours terriblement). Là il y a une vraie patte artistique, une palette de sensations, des émotions, de l'humour, de la pudeur et de l'impudeur. Et des mots, mais juste ce qu'il faut, et le plus souvent prononcés par les portagonistes eux-même in situ. Comme dis @Paul-Eaglott on se pose la question de la mise en scène (des scènes rejouées pour la caméra ?) au sein du docu.

Et l'amour est vraiment palpable entre les protagonistes. Même si cette liberté voulue/choisie/désirée est en partie performative (pour Alicja surtout qui se sent obligée de presque tout accepter par amour).

Et pour une fois la question du trouple ne fait pas du tout cliché, ni poncif cinématographique mainstream à deux balles. Ça arrive après un vrai processus d'ouverture du couple tout azimut, et c'est hyper cohérent que ça arrive à ce moment-là.

Même le presque-retour-à-la-normale de la fin du film, ne m'a pas dérangé. Au contraire finir sur l'euphorie du trouple aurait été frustrant et suspect.


*
Dommage par contre que la qualité vidéo sur ArteTV soit aussi pourrie (même le générique est illisible) entouka chez moi. J'aurais aimé savoir de qui sont certaines chansons utilisées dans le film (de certains protagonnistes du film ?)…

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artichaut

le dimanche 28 septembre 2025 à 00h32

Encore une fois c'est pas très positif sur le couple libre, le polyamour et la non-monogamie.

On peut avoir un sentiment d'échec, de gâchis, de souffrances inutiles, de vaines tentatives et de non-monogamie utopique.
Mais pour autant les personnages insistent beaucoup sur tout ce que le chemin leur a apporté. Et on les voit réellement éprouver cette liberté prônée, cette déconstruction voulue.

Et en tout cas il n'y a pas de fausses illusions, et de tromperie sur le dit-"polyamour". Le film ne cache ni les bonheurs ni les difficultés. C'est tout sauf un chemin de tout repos.

Je ne sais pas si la réal est mono ou non, mais en tout cas elle ne porte aucun jugement moralisateur sur le choix des protagonistes de vivre la non-monogamie et toutes ces expériences de vie. C'est suffisamment rare pour être noté.

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artichaut

le dimanche 28 septembre 2025 à 01h02

Une déclaration de la réalisatrice
Ami de longue date de mes deux protagonistes, j'évolue librement et impartialement dans leur environnement personnel. J'ai observé avec un vif intérêt comment leur relation s'est formée et a évolué au fil du temps. À l'hiver 2018, j'ai été soudainement confrontée à leur situation modifiée, suite au désir exprimé par Sebastian. De conversations intenses avec eux sur leurs valeurs, leurs certitudes, leurs espoirs et leurs craintes est née mon envie de documenter l'évolution de leur relation et de réaliser un film sur les traditions culturelles, les concepts, les problèmes – et les possibilités – de toute relation de couple dans le monde actuel.

Mes premières approches de la caméra nous ont motivés, ainsi que les protagonistes, à investir du temps et du travail dans ce projet. Alicja a immédiatement pu, et Sebastian, après une très courte période d'adaptation, a accepté de m'oublier moi et la caméra comme témoins. Le résultat de ces premiers jours passés ensemble révèle un naturel extraordinaire dans leur comportement face à la caméra.

Présenter sa propre situation à un public plus ou moins large n'a plus rien de fondamentalement exceptionnel à une époque où l'on se présente constamment sur les réseaux sociaux. Les murs qui protégeaient autrefois la sphère privée, derrière lesquels chacun cachait problèmes et défauts, deviennent de plus en plus transparents. Mais l'autoportrait se fait généralement de manière contrôlée. L'acteur détermine lui-même le regard extérieur qu'il porte sur lui et ne se montre pas forcément authentique. À l'inverse, Alicja et Sebastian laissent simplement la porte entrouverte lorsqu'ils sont prêts à partager. Tout comme leur relation, la création de ce film est axée sur l'ouverture et la vérité. Cela m'a surpris à maintes reprises, et cela s'applique également à la plupart des personnes confrontées à leur histoire jusqu'à présent.

Chaque jour, des milliers de couples cherchent l'épanouissement autrement. Environ la moitié des adultes européens trompent leur partenaire. L'infidélité est la cause la plus fréquente de divorce. La jalousie est la principale cause de violences mortelles dans les pays occidentaux. Plus de la moitié des conjoints admettent ne pas trouver leurs désirs sexuels satisfaits avec leur partenaire. Le mode par défaut dans les relations conjugales est : mentir, tromper, blesser, rompre. Une alternative consiste à s'ouvrir à une toute nouvelle dimension. Cela implique souvent la révélation de désirs et d'aspirations intimes. Cependant, cette révélation implique généralement une discussion sur les possibilités de leur réalisation. Le concept fondamental de la relation de mes protagonistes est la simplicité.

Le film présente la révélation de toutes leurs pensées. Mon film vise à rendre tangibles cette révélation et ses conséquences pour le spectateur. L'idée est que le spectateur expérimente et ressente ce qui se passe lorsque même les questions les plus fondamentales sont posées et répondues aussi ouvertement que possible. L'obscénité avec laquelle le sujet de l'ouverture d'une relation est traité dans un débat public superficiel occulte le processus difficile et, certainement dans la plupart des cas, douloureux d'instaurer une nouvelle culture du partage dans les relations. C'est précisément à ce processus que je souhaite confronter le spectateur. Que signifie vivre une relation stable et durable dans un monde où tout ce que nous désirons semble être à portée de main et auquel nous avons accès.

Source : filmfreeway

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artichaut

le dimanche 28 septembre 2025 à 01h16

artichaut
Quitter la monogamie doit-il nécessairement se faire dans la souffrance ?
Et si oui pourquoi ?

Je reformule ma question en l'élargissant au delà du film :

Est-ce inhérent à la monogamie que la monogamie soit si souvent si douloureuse à quitter ?

Et si oui, pourquoi ?

Vous en pensez quoi ?
(de préférence des personnes pour qui justement ça a été — ou c'est encore —douloureux)

Est-ce parce que c'est une norme ? Par ce qu'elle est sur-valorisée et présentée (le couple, le mariage) comme l'apanage d'une vie réussie ? Est-ce pour le confort (affectif, matériel, social…) réel ou symbolique, qu'elle apporte ? Est-ce parce que pour la plupart on a vécu dedans étant enfant, donc c'est notre seul modèle réellement intégré, comme inscrit familialement en nous ?

Et la jalousie est-elle le symptôme de cette douleur, de cet arrachement ?

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artichaut

le dimanche 28 septembre 2025 à 12h35

J'ai adoré cette scène de sincérité radicale quelques temps après que Camila soit venue habiter chez Alicja et Sebastian :

à 1h14
Alicja et Camila sont sur un lit, elles se font un câlin, puis se séparent l'une en face de l'autre.
- Camila : Je te déteste, Alicja.
- Alicja : Je sais, je le sens.
- Camila : Et je sais… que toi aussi, tu me détestes.
- Alicja : Plus maintenant. À une époque oui, mais plus maintenant.
- Camila : Moi, je sens que je te déteste. Je ne te supporte plus. Je ressens de la colère envers toi. Je suis jalouse de toi. J'aimerais que tu disparaisses. Et je ne sais pas comment faire pour renouer le dialogue et raviver l'amour entre nous, parce que pour l'instant on ne se supporte plus.
- Alicja : Je préférerais que tu parles pour toi. Pas de "on ne se supporte plus", "on se déteste". Dis-moi ce que tu ressens.
- Camila : OK. Je ne te supporte plus.
- Alicja : Merci.
- Camila : J'aimerais qu'on trouve un terrain d'entente qui nous convienne à toutes les deux, mais je ne vois aucune solution.
- Alicja : Actuellement… Je ne te déteste pas. Je suis désolée que tu en sois arrivée là. Je suis passé par là, moi aussi. Je sais ce que c'est. Maintenant, ma priorité, c'est de m'aimer moi. Je ne veux plus passer du temps avec toi ou t'avoir auprès de moi. Je veux juste prendre soin de moi. Je dois me protéger de toi. Je compatis, je suis désolé, mais je ne t'aime pas comme Sébastian peut t'aimer.

La scène continue (mais hors contexte du film, c'est peut-être moins pertinent, je la transcris quand même) :

- Camila : Donc, Sebastian, souffre, mais tu ne peux pas l'aider parce que tu dois t'occuper de toi ?
- Alicja : C'est une question ridicule.
- Camila : Pourquoi ?
- Alicja : Parce que le lien n'est pas le même.
- Camila : OK, mais réponds-moi, tu serais capable de l'aider ?
- Alicja : J'en sais rien.
- Camila : Même si tu penses d'abord à toi ?
- Alicja : T'as vu Sébastien ? On dirais un vieillard. Il est vraiment au bout du rouleau.
- Camila : Oui.


En revanche j'ai detesté que la thérapeuthe de couple coupe la parole à Alicja, alors que pour moi on arrive au noeud de l'intrigue :

à 1h17 (juste après, donc)
"2023, Berlin."
Alicja et Sebastian sur un canapé face à probablement une thérapeuthe pour couple.
- Alicja : Je ne sais pas quoi faire. Analysons la situation. Camila et moi, on ne se parle plus. Ou difficilement.
- Sebastian : Il y a sûrement une solution…
- Alicja : Je peux ? Ne m'interromps pas. Ne m'interromps pas.
- Sebastian : Ok
- Alicja : Je veux dire qu'au vu de mes faits et gestes à la maison, de mes agissements, compte tenu de la nouvelle personne que je suis et de mes limites, j'ai l'impression d'être une enfant qui apprend à marcher. C'est la vérité. Et j'admets que j'aimerais que mon chez moi redevienne un lieu où je peux recharger mes batteries.
- Sebastian : Tes limites ? C'est ma chambre aussi. C'est chez moi et c'est ma vie aussi.
- Alicja : T'avais l'habitude que je cède, que j'accepte tout…
- Sebastian : Ça n'a rien à voir !
- Alicja : Que je sois conciliante, et toujours prévenante, mais aujourd'hui, j'en ai assez d'être prévenante.
- La thérapeuthe : Ok. Et si on faisait une pause ? Je crois qu'on n'est pas très constructifs. C'est quoi pour toi la liberté ? De quoi as-tu besoin pour te sentir libre ?
Et Alicja répond à la question.

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Siestacorta

le dimanche 28 septembre 2025 à 13h45

Pour répondre à ta question sur "est-ce que ça doit faire mal de quitter la monogamie", je crois que la question de la sécurité est centrale.
Et le problème, c'est que la "simplicité" de la réponse par la monogamie, bien que rarement appuyée sur un connaissance de soi vraiment solide, c'est psychologiquement convaincant.
Je peux l'imaginer facilement, encore plus avec le côté fixette émotionnelle qui y encourage, donc c'est moins effrayant que ce que je ne sais imaginer et n'ai pas vécu, ou pas eu l'occasion de désirer.

Pat ailleurs...
Comme c'est la norme, la non-exclusivité va en plus surgir plutôt que d'être d'emblée présent dans le paysage.
Ça surdétermine un parcours souffrant...

Message modifié par son auteur il y a 5 jours.

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artichaut

le dimanche 28 septembre 2025 à 14h25

Siestacorta
Pour répondre à ta question sur "est-ce que ça doit faire mal de quitter la monogamie", je crois que la question de la sécurité est centrale.

On pourrait alors demander :
- est-ce que ça doit faire mal de quitter la sécurité ?
et aussi
- peut-on quitter la monogamie sans quitter la sécurité ? (là est peut-être un bon chemin de prospection — c'est peut-être d'ailleurs ce que tentent les personnes avec "couple socle" : quitter la monogamie, mais pas trop)

Siestacorta
Et le problème, c'est que la "simplicité" de la réponse par la monogamie, bien que rarement appuyée sur une connaissance de soi vraiment solide, c'est psychologiquement convaincant.

Et pourtant on sait que c'est un leurre. Divorce et ruptures, ou même décès "prématuré", sont là pour nous le rappeler sans cesse.
Mais je suis d'accord, ça reste "psychologiquement convaincant". Comme pas mal de discours simplistes : un problème / une solution.

Siestacorta
c'est moins effrayant que ce que je ne sais imaginer et n'ai pas vécu, ou pas eu l'occasion de désirer.

Quitter la monogamie c'est un peu comme quitter la religion. Ça fait forcément peur, et c'est forcément éprouvant, même si ça peut être stimulant et joyeux. C'est un saut (ou en tout cas un chemin) vers l'inconnu.

Siestacorta
Par ailleurs...
Comme c'est la norme, la non-exclusivité va en plus surgir plutôt que d'être d'emblée présent dans le paysage.
Ça surdétermine un parcours souffrant...

Ce qui surgit est forcément souffrant ?
Mais je vois ce que tu veux dire, oui.
Quoique la souffrance sera surtout du côté de la "non-exclusivité subie".

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