Un énième témoignage - aka "j'aime plusieurs personnes mais je ne me sens pas polyamoureuse"
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MPB
le vendredi 17 mars 2023 à 10h10
Bonjour à toustes,
Voilà quasiment un an que je lis les différents témoignages de ce forum, certaines ressources (articles, livres conseillés), et j'aimerais tout d'abord remercier les personnes ayant partagé leur histoire ainsi que les personnes qui prennent souvent le temps d'y répondre : je vois les pseudos les plus actifs et, quelque part, ai un peu appris à vous connaître au travers de vos expériences.
Comme beaucoup, je ressens le besoin inexpliqué de me livrer à vous : bien sûr, au fond de moi, j'aimerais qu'un miracle se produise et que les réponses tombent du ciel, mais évidemment il n'en sera rien et c'est normal.
Merci d'avance pour votre temps et votre lecture =)
Voilà : je suis "en couple" (ce terme ne fait plus vraiment sens pour moi aujourd'hui mais a défini une de mes relations pendant des années, je l'emploie donc pour le contexte) depuis un peu plus de 10 ans avec C., nous sommes mariées depuis 6 ans. Jusqu'en janvier 2022 nous étions en relation monogame exclusive, et cela nous convenait bien. Côtoyant le milieu queer et d'autres façon de relationner, nous nous questionnions parfois sur une ouverture de couple : C. a toujours été plus ouverte que moi sur la question, disant que nous ne nous appartenions pas et que, pour elle, avoir envie de vivre d'autres expériences sexuelles était normal, pour sa part elle n'était pas fermée à une ouverture de couple lorsque nous abordions le sujet, sans non plus en avoir un besoin vital, nous ne statuions donc jamais quelque chose, mais avancions. Pour ma part, je partais de très loin, avec une vision très fermée du couple (style je trouve mon âme soeur très jeune et je passe ma vie avec si c'est possible), et plus jalouse que C. (sans que cela soit maladif).
Fin 2020, nous avons fait un plan à trois, pas du tout prévu, les choses se sont faites naturellement avec une personne très proche. Nous avons aimé l'expérience, ne fermant pas la porte si elle se présentait à nouveau (avec une autre personne), et avons à nouveau abordé notre vie sexuelle. À l'époque (et depuis un bon moment), je considérais avoir une libido assez faible, du moins en dessous de celle de C. : j'ai plus souvent été la personne qui disait non. Le sexe avec elle me plaisait, mais... j'aimais parfois autant nos moments de câlins. Je me disais souvent que je pourrais vivre sans sexe, mais pas sans câlins. J'ai même pu m'interroger sur une potentielle asexualité.
Bref, à ce moment là, nous nous sommes dit que nous pouvions éventuellement parler d'une ouverture sexuelle du couple, en en parlant avant de passer à l'acte si l'une d'entre nous se sentait attirée par une autre personne. Pour ma part, je savais déjà que je risquais d'être peu concernée : jusqu'ici, je n'avais jamais réussi à envisager du sexe pour du sexe, en one shot, mais je pense que je voulais voir si j'en serais capable.
Fin 2021, en octobre, nous rencontrons deux personnes en couple hétéro (et je parle bien du couple) : M. et Y.
Nos deux couples se rapprochent, de par un véganisme partagé et une propension pour le militantisme, plus marquée chez M. et moi. D'ailleurs, après quelques sorties à 4, c'est avec elle que j'ai partagé une journée d'action animaliste, et ce premier contact à deux nous a rapprochées. Par la suite, nous avons continué à nous voir, à deux, trois ou quatre, mais M. et moi étions les maillons communs.
De son côté, elle a senti venir des sentiments vers décembre, mais, ayant peut-être peur de m'en parler ou voulant de voiler la face, elle m'a "simplement" avoué une attirance physique. M. parle souvent de sexe, et à ce moment-là je trouvais ça à la fois "trop", et à la fois j'admirais cette libération, cette capacité à me poser des questions auxquelles je n'avais jamais pris le temps de réfléchir. J'ai donc commencé à me demander ce qui se passerait si j'écoutais mon envie, sans me cacher derrière le fait que j'étais en couple. La vérité, c'est que j'avais peur de faire l'amour avec une autre personne, peur de ma performance, d'autant que M. n'avait connu quasiment que des relations hétéros (et beaucoup !). Mais l'envie était là.
J'ai donc parlé à C. . Évidemment, je me rendais bien compte que c'était risqué, cette histoire : je ne lui parlais pas d'une personne qu'elle ne croiserait jamais et que je ne reverrai plus, mais bien d'une personne de laquelle je devenais proche, et dont nous côtoyions souvent le conjoint. C. a été d'accord pour une seule fois, en précisant bien qu'elle ne voulait absolument pas de polyamour dans notre vie. Ce n'était pas du tout mon objectif d'ailleurs : je voyais comment M. agissait dans son couple et ça ne me parlait pas du tout. Je n'imaginais pas pouvoir développer des sentiments (à ce stade, vous avez déjà compris la suite !)
Nous avons donc l'amour en janvier 2022 M. et moi, Y. était également au courant. C'était un moment extrêmement important pour moi, pour de multiples raisons. En revenant chez moi, j'avais pris beaucoup de temps pour parler à C. ce soir là, et les jours suivants. La communication a toujours été un de nos atouts, et semblait encore fonctionner : nous étions toujours aussi proches, voire plus, de mon côté personnel je me sentais...puissante, bref, la sensation était géniale. M. et moi n'avons que peu reparlé de notre expérience durant les semaines suivantes par contre : nous avions fait ce que nous voulions, et toute la tension et les sous entendus semblaient avoir disparu, la vie reprenait son cours, sans ambiguïté, et ce pendant deux mois (nous continuions à nous voir, à deux, à trois ou à quatre). Je m'appliquais à être très présente pour C., à la rassurer, quitte à m'empêcher d'aller boire un verre avec M. si elle me le proposait (c'est un exemple)
Fin mars, M. partage avec moi sa peur de développer des sentiments pour moi : de mon côté, il m'était déjà arrivé de développer des sentiments amicaux très forts pour des personnes, et aujourd'hui d'ailleurs les mots amour et amitié me posent beaucoup de questions, également les sentiments que j'ai pu ressentir envers certaines personnes. Quoi qu'il en soit, je sentais que je m'attachais très fort à M., et lorsque C. me demandait régulièrement si je l'aimais encore (oui) et si j'aimais M., j'ai dû me rendre à l'évidence : la frontière était floue. C. m'a demandé si je voulais refaire du sexe avec M., et je ne le savais pas. C. m'a dit que c'était ok pour elle que je retente (jusque là, l'ambiguïté ayant disparu, je ne pensais pas réitérer). De son côté, C. a rencontré Mi., avec laquelle elle a commencé à relationner, presque au moment où je recouchais avec M., un mercredi. Le week-end suivant, je partais pour quelques jours dans une coloc queer où j'ai pu évoquer mes polyrelations, et lorsqu'une personne m'a demandé si je parlais de polyrelations ou de polyamour, j'ai été frappée : alors comme ça, j'aimais vraiment deux personnes ? Pourtant j'avais dit à Camille que moi non plus, je ne voulais pas de polyamour. Est ce que j'avais "fauté" ? Et elle, qui passait le week-end avec Mi., allait-elle tomber amoureuse d'elle ? Allions-nous nous perdre ? Cette fois-là, c'est moi qui ai eu besoin de l'appeler pour être rassurée.
Lors de ces quelques jours, beaucoup de personnes ont partagé leur expérience du polya. De belles personnes, de belles relations. Ça me faisait rêver. Ça pouvait marcher, alors ? Je pouvais vivre mon histoire avec M., sans perdre C. ? Peut-être être heureuse si elles étaient épanouies ?
J'envoyais quelques messages à M., que je devais voir le lundi, car l'excitation et la joie m'empêchaient d'attendre. Je croyais avoir trouvé LA solution, et il est clair à l'époque que je n'ai absolument pas mesuré tous les enjeux, toutes les souffrances possibles. Je ne m'étais pas assez documentée non plus. Bref, j'ai fait des erreurs.
M., qui parlait avec Y. au fur et à mesure de nos messages, a été plus prudente et plus fine : elle a voulu mettre fin à notre relation, ayant peur de souffrir, de vouloir plus, et de faire souffrir Y.
La douche froide.
Le soir même, C. me consolait comme elle le pouvait, et déjà j'avais honte qu'elle doive être là pour épancher les larmes que je versais pour une autre. Ça me semblait injuste de lui demander ça.
Mais M. est revenue, quelques jours après. Elle ne tenait pas, voulait tenter quelque chose avec moi. A la condition que Y. ne l'apprenne pas. Ça ne me parlait pas du tout, allait à l'encontre de mes valeurs, mais l'égoïsme a pris le dessus car je voulais vivre le week-end que nous avions prévu de longue date et qui avait lieu quelques jours après. Je voulais vivre ça, deux jours avec elle. Je précise que M., après m'avoir avoué ses sentiments des semaines avant, m'avait proposé une relation adultérine, ce que j'avais refusé, voulant pour ma part être très transparente avec C.
Nous avons passé ce week-end, à l'issue duquel M. a quitté Y. : elle s'était rendu compte que ses sentiments pour moi étaient très forts, et qu'il était injuste de rester avec Y., qu'elle ne le voulait pas. Nous étions alors mi-avril. (Pour la petite histoire, Y. est resté un ami proche de M., et a été un soutien pour elle dans cette histoire. Lui et moi nous croisons régulièrement aussi).
M. et moi avons alors discuté d'une possible relation. Pour ma part, j'envisageais un polyamour hiérarchisé, et la peur de perdre C. et la relation que je connaissais avec elle m'a amenée à faire beaucoup de mal à M.. Je pensais être claire avec elle, je lui expliquais que je ne me voyais pour l'instant pas la présenter à mes amies, pas passer Noël ou des choses comme ça avec elle, bref, aujourd'hui j'ai l'impression de lui avoir proposé des miettes, mais à l'époque ça me semblait juste. Avec C., nous avions mis en place beaucoup de règles pour protéger notre relation, mais à ce moment là je ne prenais pas vraiment en compte les sentiments de M. : je me disais qu'elle savait dans quoi elle s'engageait, qu'elle avait bien conscience que je ne voulais pas lui faire plus de place, je pensais être droite et juste. Ce n'était pas le cas, malheureusement. Cela a fonctionné un temps, mais M. voulait me voir plus souvent que ce que je ne me projetais, voulait envisager nos anniversaires ensemble, que je parle d'elle à ma famille, etc. Une sorte d'ascenseur relationnel. Je me sentais prise entre ma peur de la blesser, mon envie de la voir (NRE oblige !), mon envie de la voir pour ne pas la blesser, mon envie de voir C. (pour profiter mais aussi pour ne pas qu'elle se sente abandonnée et pour ne pas avoir l'impression de déserter)...il y avait beaucoup de pression.
Lorsque je lui demandais elle attendait que je quitte C. pour elle, elle me répondait toujours que non, que tout était clair. Elle m'a avoué beaucoup plus tard que oui, c'est ce qu'elle voulait, mais qu'elle savait que je partirais si elle le disait. Nous avons passé trois mois très compliqués, où j'avais l'impression de ne jamais pouvoir répondre à ses attentes (et pour cause !), où je me sentais au milieu de C. et M., où la rupture avec M. me semblait être la seule solution. Nous avons tenté cette séparation à plusieurs reprises depuis le début, mais n'avons jamais réussi à tenir.
En juin et en août, M. a tenté de rencontrer d'autres personnes, dans un premier temps pour faire de moi sa relation secondaire (elle a vite abandonné), puis "seulement" pour du sexe (elle n'a pas réussi). À ce moment là, j'étais déchirée : ça me semblait être une bonne chose, une possibilité de créer un équilibre entre nous, une façon de diminuer ses attentes envers moi. D'un autre côté, j'avais si peur. M. me disait souvent ne pas être polyamoureuse, et qu'en tombant amoureuse d'une personne elle avait toujours su que c'était fini avec une autre. J'avais peur de la perdre.
M. a longtemps refusé de lire des ressources sur le polya (moi, j'épluchais ce forum compulsivement !), par peur de se rendre compte qu'elle "était nulle", que tout le monde réussissait sauf elle. Pour elle, je ne pouvais plus être amoureuse de C. (ce n'est que plus tard que je l'ai su bien sûr). Et au fur et à mesure, vers septembre, nous avons pu parler plus librement de tout ça. Mais M. était très mal, je ne voyais pas à quel point (ou ne voulais pas voir ?).
Avec C., c'était également compliqué, de par un éloignement physique : sans savoir l'expliquer, je ne parvenais plus à faire l'amour avec elle. J'ai quelques pistes (notamment la découverte du BDSM avec M., mon côté dominant que je ne me vois pas du tout exercer dans le sexe avec C.), mais ce message est déjà long et je ne sais pas s'il convient de développer tout ça tout de suite, même si je me rends bien compte que beaucoup de blocages partent de là. Je tentais de préserver C., en ayant l'impression que cela blessait M., bref, je ne voyais aucune issue.
Je passe beaucoup de détails qui n'en sont pas, mais nous voilà déjà en janvier 2023 : M. et moi nous séparons, car nous ne sommes pas heureuses. Surtout elle. Elle attend des choses que j'ai peur de demander à ma relation avec C., et je ne me sens presque plus apte à cerner mes envies. J'ai l'impression de faire au mieux, d'être honnête, d'être amoureuse, mais cela ne suffit pas bien sûr. Je suis épuisée.
Précision : C. a beaucoup souffert des comportements très possessifs de M. à mon égard et, malgré les excuses de M. sous forme de lettre, d'invitation à passer un moment à deux, de cadeaux symboliques (nourriture), C. n'a jamais refait de pas vers M.
En janvier, après cette séparation, C. décide d'aller parler à M., de voir comment l'aider à mieux vivre cette relation avec moi si d'aventure elle voulait retenter quelque chose. Je précise que C. n'est pas ok pour que M. et moi dormions dans notre maison (à C. et moi) ni n'y fassions de sexe (de mon côté, c'est ok en ce qui concerne C. et Mi., mais pas les autres relations de C.), mais M. peut venir chez nous pour passer du temps. C. a pu expliquer pourquoi à M., notamment parce que C. et moi n'avions plus ces rapports là comme je l'ai dit, et que je sais qu'elle en souffre beaucoup, et ne peut pas imaginer que M. et moi fassions chez nous ce que C. ne partageait plus avec moi.
Nous avons donc retenté quelque chose. M. a été apaisée sur beaucoup de points, presque trop. Selon ses dires, elle comprenait mieux le polyamour, et voulait elle aussi chercher d'autres relations amoureuses. Cette recherche a duré moins de deux mois, car M. a pris conscience, toujours selon elle, qu'elle aimait n'aimer qu'une personne, lui donner toutes ses attentions et ses pensées, ne voulait pas penser à une personne en étant avec une autre, peut-être comparer, bref. Cependant, elle voulait des "jokers" (qui n'en étaient pas donc pas dans le cadre de notre relation) : auparavant, dans ses relations amoureuses, elle avait pu ressentir le besoin d'aller faire du sexe avec d'autres personnes, selon elle très ponctuellement et rarement, "une fois par an". M. a un rapport au sexe qui n'est pas du tout le mien, ce qui n'est pas grave mais engendre beaucoup d'incompréhension entre nous, d'autant qu'une ambivalence subsiste selon moi : M. semble à la fois considérer le sexe comme une partie de tennis, un partage d'un moment qui n'engage pas vraiment le corps et l'esprit (là ce sont mes mots, mes impressions), quelque chose qu'elle n'apprécie pas plus que ça, mais qu'elle semble chercher très frénétiquement (via des sites de rencontre etc actuellement). M. dit avoir beaucoup évolué sexuellement grâce à moi (notamment même au niveau du consentement) et c'est vrai que nos rapports évoluent vers un BDSM qui tend à être de plus en plus cadré, M. était plus avancée que moi sur ce sujet mais nous découvrons maintenant ensemble et aimons beaucoup ça. Ce qui me fait aussi beaucoup apprendre sur moi, qui considérait presque pouvoir me passer de sexe : il s'avère qu'avec M., le sexe est un pilier de la relation (reconnu par nous deux), pilier que j'ai peur de perdre.
Car oui, je me découvre une peur panique de ses autres relations, pourtant uniquement sexuelle et ne représentant selon elle aucun danger pour notre relation. M. me répète souvent que je suis la personne qu'elle préfère voir, à tous les niveaux. D'ailleurs, je parle de ses relations, mais depuis ses recherches je crois qu'elle n'a couché qu'avec un homme, une seule fois (je dis "je crois" car je ne veux pas savoir lorsqu'elle voit quelqu'un, ce qui montre évidemment que je ne le vis pas bien).
Voici donc le topo ultra résumé : M. et moi ne sommes pas heureuses, nous en sommes conscientes et l'avons verbalisé. Elle aimerait une relation monogame avec moi, même si elle dit très souvent qu'elle comprend vraiment la place de C. dans la vie et ne veut pas que je la perde, ni qu'elle sorte de ma vie. Au départ, j'ai eu l'impression d'être mise sur un piédestal+++ : énormément d'attentions, une mise à disposition énorme (avec des biais de consentement évidemment), beaucoup de souffrances parfois tues, juste pour être avec moi. Car selon M., elle n'a pas eu le choix du polya car ne voulait pas me perdre. Elle a donc pu me reprocher ce qu'elle considère comme mon choix uniquement.
Malgré l'apaisement par la suite, nous ne trouvons pas notre équilibre, et moi-même, bien qu'une partie de moi soit convaincue que voir d'autres personnes pourrait épanouir M. et, quelque part, nous aider, je ressens trop d'insécurité et je manque de confiance en elle pour être sereine quant à ça. D'autant que mon histoire personnelle m'amène à me méfier des hommes cis, que je côtoie d'ailleurs assez peu dans mes cercles amicaux etc : je sais que là, c'est uniquement mon problème à moi, il n'empêche, cela ne m'aide pas du tout je crois, car M. cherche des relations sexuelles avec ces personnes là en priorité. Elle sait tout ça, le sent, me propose d'arrêter, ce qui serait pour moi horrible, car je sais que l'enfermer serait extrêmement malsain et irait à l'encontre de mes valeurs de justice etc : le déséquilibre entre nous est déjà trop marqué. Cependant, si je n'arrive pas à gérer ça, je sais qu'il faudra que je parte, pour ne pas me mettre en danger. Car voilà : suis-je réellement polyamoureuse ? Aimer plusieurs personnes a la fois, oui, évidemment, je peux le faire, quel que soit le mode de relations. Mais le mode de vie polya ? L'organisation, les insécurités, les "autres"? Je crois que sur le papier, je suis d'accord avec ce que je lis, la non appartenance, l'amour bienveillant et partagé à l'infini, dans le respect et le consentement. Quant à le vivre...
Je ne suis pas dupe : mon expérience actuelle ne reflète pas le polyamour. M. et moi partions de très loin, sans cadre, empêtrées dans des idées très hétéronormatives (je ne cite pas C., pour qui le polya semble naturel ! Elle est amoureuse de Mi., relationne actuellement avec Ma., et parle à d'autres personnes avec qui elle a pu créer du lien avec ou sans sexe), et aujourd'hui je ne vois aucune autre solution que la rupture, la vraie cette fois. Il est extrêmement difficile de se dire "tout ça pour ça !", surtout en voyant l'évolution et le chemin parcouru, mais j'ai du mal à me dire que nous pourrons construire quelque chose avec tout ce passé et ces blessures qui nous encombrent. Est ce que je viens l'écrire ici pour être confortée dans ce choix ? Je n'ai pas pu tout vous raconter (je pourrai toujours répondre à des questions par commentaires si besoin), ni les interminables discussions, les disputes, les drama...Mais aussi le beau, le militantisme partagé, les discussions sur la société, l'amour, le sexe, la découverte d'un sport commun, les balades le long de l'eau, les week-ends à la mer.
J'ai imaginé quitter C. pour me donner une chance de vivre une histoire avec M. et voir ce que ça donnerait (mais je n'ai pas assez confiance en elle et en nous, et surtout je ne veux pas quitter C.), j'ai imaginé quitter M. (et l'ai fait plusieurs fois), j'ai imaginé quitter les deux, pour poursuivre sur mon chemin, identifier les relations que j'aimerais avoir, mes limites. Peut-être rester seule très longtemps, mais la fatigue et la lassitude parlent sûrement. Aujourd'hui je ne comprends pas ce que j'attends d'une relation, ni si je suis capable de...vivre ce que j'ai en tête.
Est ce que ma relation avec C. a été trop abîmée pour survivre ? Est ce que je devrais rencontrer une personne "polypoly" avec qui le cadre serait mis dès le départ, pour que je voie réellement ce que je peux ressentir (jalousie, compersion etc) ? Est ce que je suis finalement monogame exclusive, même si j'interroge ce modèle ?
C. est triste que nous nous éloignions physiquement, et pour l'instant je n'arrive pas vraiment à réfléchir à ce blocage (qui vient de moi) et à comment le résoudre. Mais je sais que, malgré notre relation solide, malgré tout ce que nous avons construit, C. risque de partir si cette complicité physique ne revient pas. Ce qui me met une pression dessus. D'autant que je sais que M. ne pourra pas dormir chez nous tant que ces blocages persisteront, et que bien sûr elle en souffre, bref, tout le monde souffre, et quelque part je me sens fautive car tout me semble partir de moi, d'une "solution" irréfléchie, alors que C. et M. n'étaient pas du tout pour le polyamour. La barque coule et je suis le capitaine : ne pas maîtriser la situation que je semble avoir choisi (même si j'ai plutôt l'impression de la subir actuellement !) me blesse.
Voilà, tout cela est peu glorieux, même si je sais que je grandis beaucoup, que je me pose des questions, que j'avance beaucoup plus loin que je ne m'en serais crue capable : je remets beaucoup de modèles sociétaux en question, et quoi qu'il arrive par la suite, j'espère que je pourrai dire que ça sera par un choix réfléchi de ma part.
Je vous remercie d'être arrivé.e.s jusqu'ici, et je vous souhaite le meilleur dans vos amours, quelle que soit la forme de ces amours (s'aimer soi-même, c'est aussi de l'amour)
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Topper
le vendredi 17 mars 2023 à 12h29
Bonjour @MPB, la situation dans laquelle tu es, est fondée sur de mauvaises bases. A la lecture de ton récit, pour moi, le problème central est M.
Si tu avais abordé un mode relationnel non-monogame avec une autre partenaire, cela aurait sans doute été complètement différent. Il y a beaucoup trop d'éléments concernant M. qui viennent en contradiction avec un état d'esprit et une éthique relationnelle nécessaire pour qu'une relation polyamoureuse sereine se mette en place.
M. profondément monogame, cherche à relationner dans le mensonge, quitte Y. car amoureuse de toi, se rend exclusive, ne se documente pas sur le polyamour...
C'est typiquement des personnes qui n'ont pas déconstruit leur construction monogame. Ce n'est pas un problème si ça lui convient. Mais relationner avec une personne qui ne lui offrira pas ce qu'elle attend, ça ne peut donner que de la frustration, de la souffrance et un désastre avec de multiples dégâts collatéraux.
C'est le genre de personnes qu'il faut éviter.
Ou alors avec qui il faut prendre énormément de précautions pour se protéger et protéger l'autre de soi. La NRE est un vrai piège car elle n'invite pas à s'auto-modérer. Pourtant, je pense que lorsqu'on amène une personne monogame à être dans une relation non-monogame, ça donne une responsabilité vis-à-vis de l'autre. Cela veut dire, ne pas faire miroiter des choses, pas de promesses, limiter au maximum les dynamiques de codépendance en gardant une certaine distance, en maintenant le "chacun sa vie", en ne faisant pas des activités typiques de couple (séjours prolongés, voyages, dîners romantiques, etc.), éviter à tout prix les ascenseurs émotionnels.
Tout ça en sensibilisant et en amenant l'autre à une déconstruction et un apprentissage du polyamour (ou d'autres modes relationnels), car si ce cheminement ne se fait pas ce sera toujours problématique. En constatant des évolutions positives, il est possible de s'engager progressivement dans une relation plus impliquante.
Le BDSM rajoute une couche de complexité par l'intensité qu'elle procure au niveau physique et émotionnel.
Le rapport de domination complique davantage les choses en créant un rapport de dépendance et de vulnérabilité de la personne soumise.
Tout ça pour dire que la combinaison de tout ça n'était pas de bonne augure pour la suite.
Je vois bien qu'il y a des tentatives pour M. d'avancer mais c'est beaucoup plus compliqué en partant sur des bases caduques.
Cela me paraît pas surprenant que ce soit aujourd'hui compliqué avec C. C'est tellement le bordel avec M. que je ne vois pas comment tu peux avoir l'espace mental pour réfléchir aux problèmes d'éloignement que tu as dans ta relation principale. Cela doit être trop confus pour toi pour avancer sur plusieurs fronts en même temps.
Je pense que la meilleure chose à faire serait de te dégager du temps avec toi-même pour prendre du recul et faire le point sur la situation et ce que tu veux. Essaie de voir si tu peux te faire des week-ends ou plus longs séjours seule (sans interférences).
Tu peux essayer d'écrire tout ce qu'il s'est passé chronologiquement, quasiment date par date, comme si tu te racontait les choses à toi-même (faire un flot de pensée, si ça te parle). Raconter les évènements marquants, ça peut t'aider à avoir une meilleure lecture de ce qui s'est passé, les émotions par lesquelles tu es passée, qu'elles soient bonnes ou mauvaises. Cela peut aussi te mettre en exergue ce qui ne s'est pas bien passé et pourquoi. Peut-être encore que ça peut révéler des évidences qui répondront à tes questions.
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MPB
le vendredi 17 mars 2023 à 13h54
Salut @Topper =)
Merci pour ta réponse, qui met en lumière beaucoup de choses que j'avais déjà pointées : oui, les bases de cette histoire sont plus que vermoulues, en refaisant l'historique ça m'a d'autant plus sauté aux yeux. Et, comme tu le dis, en terme d'auto-modération, je n'ai clairement pas été dans les clous : bien que ne partant pas sur ces bases là, je n'ai pas résisté aux vacances/week-end, etc.
Aujourd'hui mon espace mental est saturé, par mon histoire avec M. évidemment. Tant d'heures de discussions par messages, appels, vocaux, même mon travail en pâtit, forcément. La semaine dernière j'ai donc eu la même idée que toi : m'accorder du temps à moi seule. Une amie m'a proposé l'hébergement, j'hésitais même avec un Airbnb, mais bref, je crois que je vais devoir faire ça.
Quant à l'écriture, il s'avère que j'ai tout écrit, au fur et à mesure. Ça serait donc plus une re(re)lecture, pour accepter ces évidences que je ne veux pas voir.
[Petite précision suite à mon témoignage : je m'entends bien avec Mi, l'une de mes métamours, que j'ai souvent croisée (parfois chez moi), on devrait aller boire un verre à deux pour la première fois la semaine prochaine. Car je me rends compte que je n'ai pas développé mes ressentis vis à vis des autres relations de C., alors que je les gère beaucoup mieux]
Message modifié par son auteur il y a 13 jours.
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Siestacorta
le dimanche 19 mars 2023 à 01h25
En tout cas, bravo pour la part d'honnêteté envers toi-même, et l'introspection.
C'est énorme, et tu semble bien placée pour le savoir, hélas pas suffisant pour que ça marche bien (on se demande parfois si ça nous empêche pas de prendre spontanément les décisions les plus nécessaires, right ?).
Je lis ceci, dans ta confidence : tu t'es surprise à vivre quelque chose de passionnel, toi qui sembles vouloir suivre des principes et ne te définissais sans doute pas comme passionnelle en sentiments ; et tu culpabilises, tout en regrettant qu'M. n'ait pas le recul de voir la pression qu'elle y met.
Je le sens comme ça, peut-être que je m'avance.
Bref, j'ai du mal à imaginer une voie heureuse pour vous ensemble, cette relation s'avère une impasse. C'est sans doute une des choses que tu as besoin de lire ici pour te ressaisir, te convaincre un peu plus.
Plus avant encore : oui, la quitter va vous faire du mal, sur le moment, oui tu auras sans doute des remords. Ça vaut peut-être mieux que les regrets de ne pas avoir vécu ça ou de le vivre en laissant les peines se perpétuer.
Je lis l'approche d'une rupture. Et on voudrait être pardonné, encore aimé quand même, et en fait c'est pas un espoir qui fait du bien.
Là où j'ai pu trouver un peu de sérénité (à plus long terme) dans une situation comparable, c'est en ne me forçant pas par "cohérence" à nier que j'aime tout en rompant, que ça reste.ra sincère et un peu beau quelque part. C'est pas quelque chose que la personne quittée peut entendre, évidemment, et le dire compliquerait sans doute encore les choses. C'est néanmoins important de moi à moi, parce que reconnaître mes sentiments, dans leurs réalités et leurs faiblesses, leur inadéquation et leur puissance, c'est finalement ce qui permet de pas confondre ça avec une raison de continuer dans la situation souffrante, quand on l'a - comme tu l'as fait ici - identifiée souffrante.
M. t'en voudra, aura sans doute un peu raison, mais que vous soyez deux à t'en vouloir de continuer, c'est pire, je trouve.
Toi tu auras perdu une époque amoureuse et sexy, et c'est triste, oui, vraiment oui.
L'amour ne se définit pas par sa justice, c'est à nous de faire des choses justes, et là ce qui semble juste c'est d'arrêter.
Encore une fois, tu as aimé, et fait de ton mieux sans doute, que ça se termine n'empêche pas de garder la joie que ce soit arrivé.
Voilà, ça pour à la fois être sombre et soutenant.
Courage.
(si je suis pas à côté de la plaque 😅)
Message modifié par son auteur il y a 11 jours.
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MPB
le lundi 20 mars 2023 à 16h23
Coucou @Siestacorta
Merci, tout d'abord =)
Je me savais pouvoir être passionnelle en sentiment, mais à ce point j'avoue que je ne m'y attendais pas, notamment en terme d'intensité des drama/disputes et de mes réactions, où je ne me reconnais parfois pas et qui font sans doute écho à cette intensité globale de la relation avec M., sexe compris.
Oui, tu as raison, j'ai besoin de lire, d'entendre, que je ne dois plus rien attendre de cette relation chaotique, malgré toutes les évolutions. J'ai discuté plus de 4h aujourd'hui avec Mi., une de mes métamours, chez moi, c'était improvisé mais très enrichissant, elle m'a même cuisiné un plat, nous étions dans le "prendre soin" (enfin, surtout elle, car j'étais trop épuisée pour ça, voire même pour exprimer ma reconnaissance), c'était très agréable. Mi. est neuroatypique, et je ne sais pas si c'est dû à cela, mais elle est très franche, très honnête, mais pas blessante pour un sou. Elle m'a dit qu'elle pensait clairement qu'il fallait que je quitte M., mais comprenait la complexité de la chose. Elle connaît de plus tous les sentiments de C. à ce sujet, et m'a aussi aidée à trouver des pistes pour que nous nous retrouvions, elle et moi. A travers Mi., son envie de prendre soin de notre relation à C. et moi, quitte à se mettre en retrait pour un temps, j'ai pu voir tout ce que le polya peut apporter de beau et d'enrichissant, si l'on sait dépasser les peurs. C'est ce polya que je veux vivre dans mes amours plurielles, si jamais je m'y relance par la suite. Un polya avec une partenaire déjà au fait de tout ce qu'implique ce mode de vie et qui, si mono, véritablement polyacceptante (malgré tout ce qu'on peut penser de ce terme qui fait débat si j'ai bien compris !)
M. sent que je voudrais la quitter, que je cherche la force de le faire. Elle me demande de lui laisser encore du temps, elle veut essayer encore, avancer...Dans ces cas-là, quand elle est dans mes bras, anticiper toute sa douleur et la mienne est terrible. Alors je me demande si je diffère parce que je ne peux m'empêcher d'avoir de l'espoir, ou pour grapiller encore quelques moments, ou "juste" pour ne pas être confrontée à tout ce que cette rupture implique.
Mais je rejoins @Topper : pour moi il serait de ma responsabilité d'arrêter, même si M. me dit que dans ce cas-là, je pense à sa place. Sachant M. dans cette monogamie très marquée et finalement non polyacceptante, je pense, et moi-même ne voulant pas quitter C., il ne reste plus grand choix.
Merci pour la force, que je reçois avec gratitude.
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MPB
le samedi 25 mars 2023 à 09h39
Pour donner une petite conclusion aux personnes qui tomberaient sur ce témoignage au fil du forum, et à @Topper et @Siesta qui ont pris le temps de me répondre : M. et moi nous sommes quittées il y a deux jours. La situation devenait trop...trop. Je ne prendrai pas forcément la peine de détailler la discussion, je crois que ce n'est plus vraiment la peine. Disons juste que nous nous sommes dit que cette fois, nous devions tenir, pour notre bien.
Cependant, je continue à lire tout ce que je peux trouver sur le polyamour. Je veux comprendre, je veux apprendre, je veux me trouver et connaître mes attentes en terme de relation.
Aujourd'hui j'aspire à prendre soin de moi, soin de C., et surtout soin de ma relation avec C., en espérant qu'il ne soit pas trop tard. Je cherche de la force dans mes relations "amicales", et pour l'instant il est hors de question pour moi de rencontrer de nouvelles personnes sans avoir fait un point solide, et sans avoir retrouvé une stabilité et un apaisement avec C.
J'aimerais également pouvoir participer sur ce forum, disons que je ne me mets pas de pression dessus mais c'est une réelle envie =)
Bref, merci encore pour tout
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Siestacorta
le mercredi 29 mars 2023 à 19h37
@MPB prends soin de toi, oui.
Peut-être, si le dialogue est possible, tenteriez-vous de vous entendre sur des modalités d'isolement entre vous : dinde froide comme on dit en anglais, ou garder un canal, limité en temps et en forme (je pense notamment à bloquer une partie des réseaux et messageries), où parler reste possible, si une forme de dialogue reste souhaitable.
Perso je crois que laisser beaucoup de temps passer mais pas rejeter le dialogue, même si c'est un équilibre compliqué, à moyen-long terme c'est humainement, affectivement, souhaitable. Rarement facile, risqué question braises, mais parfois c'est cohérent avec soi et donc plus satisfaisant.
Je le conseille pas, je le mentionne 😅
Message modifié par son auteur hier à 19h.