Participation aux discussions
Discussion : Est-ce que la tromperie existe chez les poly amoureux ?

bouquetfleuri
le mercredi 05 mars 2014 à 23h06
Tromper : présenter à l'esprit une idée trompeuse; provoquer une erreur de jugement, d'appréciation.
J'essaie d'appréhender ce que signifierait "tromper" pour quelqu'un qui conduirait une expérience poly amoureuse. Il en ressort que l'on peut se tromper soi-même et par là tromper son partenaire, par négligence, par paresse, par inconscience.
Discussion : Est-ce que la tromperie existe chez les poly amoureux ?

bouquetfleuri
le mercredi 05 mars 2014 à 10h20
C’est une belle question, trouvée sur le groupe Polyamour de facebook, qui me permet d’approfondir une idée qui m’est chère et qui a du sens pour moi.
Est-ce que tromper est toujours l’expression d’un choix, d’une volonté de nuire ou de ne pas agir conformément à son éthique ? Tromper ne peut-il pas être le résultat d’un déni ou au moins d’un aveuglement sur ses limites et son incapacité à avancer avec la sérénité envisagée dans la construction de son projet relationnel ?
Ces deux questions liminaires encadrent bien l’espace de la tromperie, au moins de mon point de vue.
Je crois que pour vivre son expérience poly amoureuse, il est nécessaire de remettre en question quelques éléments importants de la construction personnelle considérés à tort ou à raison comme emprisonnant.
Il n’y a pas de débat sur l’idée que le poly amoureux est confronté à une morale qui le contraint par exemple ou que sa pratique sexuelle trouve une respiration nouvelle dès lors qu’il s’affranchit de ses propres empêchements.
Et on désigne couramment la société comme l’ennemi total, voire totalitaire. À juste titre à mon avis.
C’est là que le débat peut faire rage.
Quelle est l’exigence du poly amoureux par rapport à cet ennemi ? Peut-on se soucier de prendre de la distance avec des préceptes moraux sans réexaminer le discours qui les fait exister et peut-on les vilipender sans questionner notre habitus ?
Je dis souvent que le poly amour pourrait très bien être un pur produit de cette société qui permet toutes les revendications et qui s’organise pour permettre à chacun de ses membres de satisfaire au mieux ses envies ou besoins.
Choisir ses amours ressemblerait à de la consommation sentimentale, sans plus et le manque d’engagement revendiqué par certains accrédite cette vision des choses.
De la même façon se défaire de toute pression morale jusqu’à remettre en cause la nécessaire responsabilité entre deux acteurs d’une histoire d’amour ressemble à la créative contestation punk qui redonnait un souffle nouveau à la contestation sociale de mai 68.
Ou encore, qu'en est-il de cette injonction à "devenir quelqu'un" dans une vie de poly amoureux ?
Pourtant, il me semble que si l’expérience poly amoureuse est contestataire (anarchiste ?), elle s’articule sur d’autres ressorts qu’économiques ou sociaux. Elle se fait sur l’équilibre à trouver entre la personne et sa personnalité, c’est-à-dire entre la conscience de soi et ce qui est construit par la société dans une dialectique où la publicité comme la littérature, la culture comme le travail modèlent jusqu’à l’émergence du sentiment amoureux.
Et cette expérience intime ne peut pas être autre qu’universaliste, absolue et affranchie des règles sociales d’échange. Je reprends ici une phrase clé de Françoise Simpère : « il n’est pas nécessaire de parler du poly amour, mais il faut le vivre ». Je ne dis pas là que Françoise Simpère est d’accord avec ce que j’énonce, je n’en sais rien, mais cette phrase illustre bien la césure qu’il faut faire entre les relations normales et discursives de l’analyse et le fondement de cette analyse.
Je crois que beaucoup de poly amoureux ressentent profondément la séparation des pouvoirs, entre celui que l’on se donne et celui que la société conserve sur nos vies et jusqu’à des endroits insoupçonnés. Et s’il y a tromperie, c’est à cet endroit qu’elle se manifeste.
Mais s’il peut y avoir un sentiment de tromperie dans une relation poly amoureuse, un sentiment de tromperie nécessite-t-il une tromperie pour exister ?
La tromperie n’est pas forcément une histoire où la jalousie serait un levier réactif, elle peut être simplement la distorsion entre deux philosophies de vie, ou entre une volonté et son exercice pratique. Il se peut aussi que l’on n’ait pas conscience de cette distorsion, ou que l’on ne soit pas capable d’y faire face. Il y a sans doute également des degrés d’avancement dans cette voie et rompre avec des réflexes autour desquels nous sommes construits n’est pas chose aisée ou en tout cas pas aussi facile à faire pour tout le monde. La volonté ne suffit pas toujours.
Je crois aussi que c’est ce qui fonde la relation amoureuse. Je parlai récemment d’asymétrie avec quelqu’un et je disais que l’asymétrie était somme toute obligatoirement relative et que tout le travail dans la relation consistait à réduire cette asymétrie tout en conservant intactes l’identité des personnes.
Enfin, je crois qu’entre poly amoureux, il n’y pas (plus) tromperie quand on est capable de l’examiner, de la comprendre et d’y remédier, sinon il n’y a plus d’histoire d’amour, juste du commerce.
Et c'est sans doute là qu'elle commence, cette tromperie...
Discussion : Turn on & excitations plurielles

bouquetfleuri
le mardi 04 mars 2014 à 09h50
Le polyamour est un cheminement, on ne le répètera jamais assez. C'est un cheminement qui passe par la connaissance de soi, la déconstruction de schémas mal appropriés à notre épanouissement, la remise en question de la morale et son remplacement par une éthique personnelle etc.
Un des points cruciaux (il y en a mille) est la mise en abîme du Verbe, du discours qui encadre notre intime et qui brille en général par son insuffisance, mais qui charrie à la fois notre coercition intégrée et, partant, la culpabilité qui se rattache à l'exploration, naturelle et obligatoire, de nos pratiques sexuelles.
Sur ce point clé de notre lien à notre histoire, la psychanalyse offre de précieux outils. Lire Freud, Jung, Reich ou Fromm permet bien souvent de poser d'autres mots et de nous découvrir comme on aime le faire.
Il peut y avoir une autre forme de dialogue, c'est ce que propose le tao ou le tantra, plus éloigné du verbe et plus proche de la réalité physique. Mais le travail de connaissance est le même et reste à faire par chacun, sans procuration possible.
Les psychanalystes conduisent le travail à travers des mots, les praticiens du tantra conduisent le travail à travers des pratiques physiques, mais l'appropriation du rapport à soi ne peut être faite que par le sujet.
Certaines personnes n'auront besoin ni des psychanalystes, ni des praticiens de tantra parce qu'elles ouvrent leur vie à la réflexion permanente, à la critique, à l'analyse qu'elles s'imposent et gèrent en autonomie, d'autres préfèrent un accompagnement pour le confort que cela représente, le lien, l'efficacité aussi, sensible dans les résultats plus ou moins conformes à des attentes qui ne seraient pas un objectif mais un idéal.
Il n'y a pas de recettes pour arriver quelque part, mais mille et une manières d'avancer. Chacun choisit la sienne, chacun choisit son travail. Un travail, cela coûte des efforts, de l'investissement, parfois c'est de l'argent, parfois c'est du temps, parfois ce sont des souffrances mentales et parfois, c'est une combinaison de tout cela.
L'essentiel est de cheminer. Il n'y a que quand on se croit arrivé qu'on peut être sûr de s'être trompé de chemin.
Message modifié par son auteur il y a 12 ans.
Discussion : 4 ème jeudi à Lyon, février

bouquetfleuri
le vendredi 28 février 2014 à 09h24
22, v'là les poly-amoureux !
Hier, nous étions 22 avec autant de femmes que d'hommes
Les cafés poly du 4ème jeudi du mois se suivent à l'Antre Autre et sont tous différents, à la mesure de la diversité des femmes et des hommes qui viennent parler d'eux, qui viennent entendre les autres, qui viennent chercher dans des questions et des réponses toujours empreintes d'une expérience personnelle des repères et des précisions utiles.
Utiles est le bon mot. Ces discussions servent d'outil.
Non que les conversations fassent émerger des outils directement utilisables ou des procédures infaillibles ou encore des recettes à mettre à sa sauce, bien au contraire, chacun fait bien attention de n'imposer aucune définition, il n'y a aucune prétention a un "savoir particulier" qui se transmettrait de haut en bas, mais l'interactivité dans ces cafés poly fait la place belle au sens que l'on donne à sa vie ou à ses espérances, à la raison que l'on cherche ensemble, au questionnement qui libère, au futur joyeux qui se dessine parfois dans des larmes contenues, dans des émotions palpables, dans des mots qui rendent justice à la recherche de chacun des participants.
Je suis toujours étonné de cette magie, je crois que ce sont tout simplement des tranches de vie entre gens bienveillants. C'est aussi cela, pour moi, le confort du polyamour : une intelligence à consommer ensemble.
Merci à tous les participants, merci pour votre gentillesse, votre présence, votre parole.
À très vite
Discussion : Sensations nouvelles et agréables… et doutes.

bouquetfleuri
le jeudi 27 février 2014 à 08h13
Des couples, je n'en ai jamais vu qui ne fonctionnaient pas.
Ils n'apparaissent pas tous comme on croit devoir l'attendre ou pas, ils se déchirent parfois jusqu'à la distance salvatrice, ce qui n'est pas pire de croire qu'ils ne font qu'un, ils peuvent avoir du mal à s'investir dans une entité dont il ne savent pas toujours qu'elle n'est pas l'addition de leur deux personnes, mais tous les couples fonctionnent, à leur manière...
Discussion : Le polyamour... un principe, ou une constatation ?

bouquetfleuri
le mercredi 26 février 2014 à 14h11
Je souscris à ce que dit Lulutine.
C'est d'ailleurs le miracle de la vie et la première raison de détruire étiquettes et jugements. Tout peut s'agencer et s'organiser au mieux des intérêts de chacun, de vous quatre donc (les trois adultes et l'enfant) et cela peut très bien ne ressembler à rien de connu, rien de prévu, rien de désigné, rien de répertorié.
Bon, il faut que chacun le veuille, que chacun s'écoute et que chacun soit bienveillant pour que cela aille plus vite. Le volontarisme ne suffit pas toujours, mais le défaitisme ne sert à rien.
Il faut parfois sortir des cadres moraux dans lesquels un projet a été élaboré pour construire une éthique propre, mais ce qui est certain, c'est que le "bonheur" (sa vie assumée, sa libération, sa relation amoureuse) ne se construit pas seul, et pas sans les autres.
Courage, le bonheur est toujours pour bientôt
Discussion : Le polyamour est-il la réponse à mes soucis ? Suis-je poly ou juste perdue ?

bouquetfleuri
le mercredi 26 février 2014 à 11h47
Pour affiner encore un peu, plus que de continuum, je parlerais de ramifications.
L'univers sensuel n'est pas de même nature que l'univers sexuel, et si j'ose faire une comparaison (qui ne sera pas raison, on est d'accord) je dis que la forme (le sensuel) est la partie émergée du fond (le sexuel). Les sens nous permettent une appréhension du monde, de notre environnement, de l'autre et de nos relations et construisent une histoire autant qu'une mémoire voilà (histoire et mémoire) ce que je nomme sexualité.
Discussion : Le polyamour est-il la réponse à mes soucis ? Suis-je poly ou juste perdue ?

bouquetfleuri
le mardi 25 février 2014 à 15h46
Le distingo entre sensuel et sexuel ne me paraît pas aussi évident.
Boire un café avec une personne que l'on aime (ou pas d'ailleurs) peut être un acte éminemment sexuel. Ce n'est pas parce que l'appareil uro-génital n'est pas convié dans l'opération (et même cela se discute) que l'acte ne construit pas quelque chose de la sexualité entre les deux personnes, imbrication d'histoires, réminiscences, investissement dans l'interface etc., parce que justement il s'articule autour des sens.
Quelqu'un dans un autre fil disait ne plus rien avoir de sexuel dans sa relation avec son mari, mais une complicité et une entente intellectuelle intactes.
Il me semble qu'on ne peut pas dire que la sexualité n'est qu'une collection de gestes précis sanctionnés par plus ou moins de plaisir. La valeur "zéro" en terme d'actes spécifiquement admis comme étant des actes de type sexuel ne transforme pas la sexualité en non sexualité.
Et il est difficile de parler d'épanouissement ou pas si les cases ne sont pas cochées comme on le ferait soi-même.
Accepter de considérer que ce qui est sensuel est sexuel me semble être un bon travail à faire pour libérer sa parole, pour revisiter sa pudeur et examiner sa culpabilité forgée sur les mots que la société met à notre service. Cela sert à comprendre par soi-même qu'on fabrique en permanence son identité. Je le crois fermement en tout cas
Message modifié par son auteur il y a 12 ans.
Discussion : Le polyamour... un principe, ou une constatation ?

bouquetfleuri
le mardi 25 février 2014 à 15h12
Continue de ne pas te considérer comme polyamoureuse, cela n'a aucune espèce d'importance.
En revanche, vis tes deux relations amoureuses le mieux possible.
Il n'y a pas de recette, il n'y a pas de procédure, juste la vie qui s'installe avec le temps dans d'autres configurations que celles qu'on imagine ou projette parfois.
Mais cela demande un peu de travail
Message modifié par son auteur il y a 12 ans.
Discussion : Comment dire à son "premier partenaire" qu'on veut etre polyamoureux ?

bouquetfleuri
le mardi 25 février 2014 à 09h02
Je surenchéris ce que dit Siestacorta, en me retrouvant totalement dans ce qu'écrivent RIP et Cendre, aller vers son expérience polyamoureuse, c'est sortir de l'amour "marchand", dessiné et construit par des habitudes sociales mortifères.
Il ne s'agit pas que d'un dialogue cantonné à la résolution d'un problème accidentellement émergent, il s'agit du devenir de deux, trois personnes et plus, ce "devenir" que l'on retrouve dans la maxime nietzchéenne : "deviens ce que tu es".
Changer d'horizon, changer de monde est un travail, une torture. Mais si c'est une torture qui libère, elle fait mal, comme toutes les tortures
Discussion : 4 ème jeudi à Lyon, février

bouquetfleuri
le lundi 24 février 2014 à 13h46
Bonjour nausica,
les rencontres du jeudi sont justement faites pour cela, échanger entre nous et offrir quelques heures de réalité à des questions plus ou moins théoriques, laisser émerger de possibles réponses à partir d'expériences différentes et permettre à chacun de trouver un cadre réconfortant pour encadrer son problème, sa curiosité ou son bonheur.
Tout le monde est bienvenu.
À jeudi, donc...
Message modifié par son auteur il y a 12 ans.
Discussion : Je suis un nazi

bouquetfleuri
le dimanche 23 février 2014 à 11h05
Mille degrés ! On est plutôt dans la crémation, là...
Discussion : Je suis un nazi

bouquetfleuri
le samedi 22 février 2014 à 19h13
Un radical marrant ne peut pas être un nazi. Et heureusement !
Discussion : Pourquoi diable, faut-il tout avouer ? (Edit : en particulier une nouvelle relation)

bouquetfleuri
le mardi 18 février 2014 à 23h38
Hahaha, PolyEric, tu es un tendre voyou assez intelligent. Le charme que perd mon charabia abstrus se retrouve dans ta façon de nous expliquer que tu commences à comprendre des choses niées naguère, c'est joli.
Discussion : Votre fameux 14 février

bouquetfleuri
le mardi 18 février 2014 à 11h01
Pour un fameux 14 février, ce fut un fameux week end !
Nous nous sommes retrouvés en bonne compagnie. Cela, nous le savions avant de commencer la fête, mais c'est toujours émouvant de voir la tendresse, l'émotion et les picotements sensuels gagner un groupe et de différentes façons.
Il y eut pour cela quelques moments clés, les repas et autres dégustations de rhum ou de limoncello sont des instants où des bons vivants qui communiquent examinent avec beaucoup d'attention ce qui rentre et sort de leur bouche, et les discussions en petits groupes font le lien avec d'autres activités communes.
Il y eut par exemple la "douche de l'égo" ou "rinçage du narcisse" : un sujet se soumet à l'assemblée qui lui envoie gaiement tout ce qu'elle aime de lui. Cela donne une scène touchante où l'émotion est le dialogue entre les participants.
Il y eut aussi la déclaration d'amour faite par chacun à un ou une participante tiré au sort. C'était l'occasion de mesurer que la déclaration d'amour est tout sauf stéréotypée, et que si les mots paraissent semblables, c'est bien la forme qui la rend unique et nouvelle.
Il y eut aussi cet exercice inspiré du tantra. Dans l'assemblée en circulation, deux personnes s'arrêtent face à face et se fixent dans les yeux, en silence, recevant l'accueil bienveillant que chacun prodigue à l'autre.
Enfin, cette soirée particulière s'est conclue par une lecture à voix haute. Les auditeurs confortablement allongés, les uns contre les autres laissaient le sens des mots les envahir comme ils laissaient leurs sens s'échapper dans des frottements de tissus, des baisers délicats, des caresses tendres ou des ronflements amusants.
Merci à Lili-Lutine et à Fredlutin pour leur accueil généreux, bienveillant et plein d'attention
C'était un fameux 14, 15, 16 février !
Discussion : Goûter-poly du dimanche à Paris (février)

bouquetfleuri
le dimanche 16 février 2014 à 13h22
Coucou,
le week end de la Saint Valentin s'achève à Avignon, la belle et chaleureuse équipe regagne tranquillement ses pénates.
Lili-Lutine, Fredlutin et moi-même nous envolons pour vous accompagner par toutes les pensées bienveillantes que nous avons amassées.
Profitez bien de vous.
À bientôt chers amis parisiens
Discussion : Pourquoi diable, faut-il tout avouer ? (Edit : en particulier une nouvelle relation)

bouquetfleuri
le vendredi 14 février 2014 à 09h33
Green-Man-Outside
il n'y a pas un polyamour, mais des polyamours. Vous avez simplement oubliez le "S"
Ce point-là ne fait pas débat, je crois que tout le monde est d’accord mais je trouve ta remarque vraiment importante.
Je crois surtout que c’est à définition qu’il manque un « s ». Il y a en effet la définition sociologique, la définition anthropologique, la définition morale, la définition politique etc.
Mais d’enlever le « s » à polyamour est bien le signe que beaucoup l’érigent en objet et certains peuvent même en faire un objectif. Et si nous ne nous entendons pas naturellement sur la définition de cet objet , c’est-à-dire si la circulation du mot n’est pas logique et incisive comme peuvent l’être beaucoup d’autres mots, c’est bien parce que cet objet occupe en nous une certaine place qui n’est justement pas définie.
Il se joue là une confrontation entre le théorique et le pratique qui ne trouve son issue ni dans le théorique, ni dans le pratique. Accepter de formaliser ses choix et modeler son parcours, voire le modéliser en fonction du polyamour fait de cet objet une idée supérieure et organise l’ensemble des individus qui agissent de cette façon en église, ou en communauté comme on voudra.
Mais la vie est tout sauf théorique et l’amour l’est encore un peu moins. Peut-être que le radical poly s’applique essentiellement aux types de personnes pensant un peu la même chose en ce qui concerne l’amour…
Pour moi le poly-amour n’est pas un objet, pas plus que l'amour. À l’instar de Lacan, j’ai envie de dire que le polyamour n’existe pas. Il n’est pour moi qu’une résultante, au mieux un symptôme.
À partir d’ici, je vais parler de ma vision de cet objet qui n’existe pas en soi.
Si je veux avancer dans la définition de ma façon de vivre qui me permet de construire plusieurs relations amoureuses, je remarque que j’ai pris beaucoup de distance avec le mécanisme social, celui qu’on traite de naturel et qui n’est que culturel, j’ai pris de la distance avec le commerce ordinaire qui met les individus au rang de marchandise, je me suis éloigné des réflexes qui organise la société en société patriarcale avec toutes les souffrances et les conforts qui lui sont associés.
Je suis un contempteur de cette société qui depuis des millénaires conduit l’atomisation de tous les groupes pour aller vers une individualisation forcenée, individualisation dont le système actuel (capitaliste, que nous acceptons ou subissons tous) est le meilleur garant.
Toutes les lois de tous les temps conduisent à cette individualisation avec l’axe majeur de la protection de la propriété et son corollaire, la possessivité.
Il ne suffit pas d’analyser le phénomène pour s’en défaire, mais c’est un premier pas obligatoire. Ouvrir les yeux est bien souvent la meilleure façon de voir les choses. Mais nous sommes pétris de ces gestes, de ces obligations et si nous acceptons d’exporter dans notre façon de vivre cette ouverture amoureuse ce qui détériore et la nature et l’expérience humaine, nous ne pouvons pas construire ce polyamour (qui n’existe pas, je le rappelle).
Le polyamour (celui qui existe) peut très bien être un avatar de cette société et que permet justement le renfermement de l’individu dans ses choix particuliers. Par exemple, l’individualisation conduit à renfermer deux individus ensemble dans une cellule familiale (on va parler de mono amour), à les rendre autonomes.
Ils évoluent dans le rapport que leur fournit la société qui est le commerce ordinaire, le rapport de force, et ils consomment l'amour qu'on leur offre.
Les polyamoureux aussi peuvent être dans la consommation et l’organisation de leurs sentiments dans le modèle patriarcal, collectionnant les instants et les expériences comme autant de produits non investis.
De la même façon, j’ai beaucoup de mal avec cette notion d’autonomie si elle remplace celle d’autorisation. L’autorisation est l’action de se rendre auteur (du grec soi-même) de sa vie, auteur de ses choix, l’autonomie, elle, est la faculté de faire ses choix librement, de se déterminer par soi-même que l’on associe à l’indépendance morale, voire l’indépendance tout court.
Qu’advient-il de l’autre dans cette conception consumériste de l’amour comme d’un objet extérieur ?
C’est par la réfutation de tous les mécanismes intriqués à une morale et une organisation particulière de la société que je m’affirme, pas forcément une rébellion mais au moins par une critique et l’élaboration d’un autre monde, d’abord intérieur puis social. Et c’est plus une posture philosophique tout au long de ma vie que l’application parcellaire de préceptes bienveillants et formatés qui m’entraîne vers d’autres amoureuses que moi-même.
C’est ainsi que se construit ce que je peux appeler par commodité mon polyamour, par la dilution de mon individu dans l’existence de l'autre, de certains autres, et pas de tous les autres.
J’ai la conscience assez claire que pour vivre mon polyamour, il faut être illuminé.
Pour une fois que cela me sert de l’être, je ne vais pas m’en plaindre !
Message modifié par son auteur il y a 12 ans.
Discussion : Quelqu'un vous aime ! Vous le découvrez : aimez-vous plus facilement ?

bouquetfleuri
le jeudi 13 février 2014 à 14h14
Oui Siestacorta, tu as raison, j'ai oublié de développer pourquoi c'est impossible pour moi. Je ne vais pas le faire ici, par faute de temps, mais dans un café poly, un de ces jours, sans doute...
En deux mots, je ne peux pas aimer une table, parce qu'une table ne me répondra jamais. Je ne peux aimer qu'une personne vivante. Si l'amour ne trouve pas de réponse, alors, pour moi, ce n'est pas de l'amour, mais une partie de l'amour, peut-être la première reconnaissance, le premier désir. Si j'entretiens ce désir comme de l'amour, c'est de l'érotomanie (pour faire vite).
L'amour étant une pulsion de vie qui s'accorde avec ma nature de faible mammifère, il a besoin pour survivre de rencontrer la même pulsion de vie ailleurs, ou dans d'autres ailleurs. S'il ne la rencontre pas, il ne peut exister autrement que dans un mécanisme de dégradation adossé et légitimé par une conformation sociale (le romantisme en est l'exemple littéraire).
Et ce n'est pas parce qu'il y a une réponse amoureuse que ce dernier est forcément heureux. (enfin, pour moi, si parce que sinon il n'émerge pas). Le travail nécessaire (la souffrance) pouvant construire en partie le bonheur, et cela n'a rien de messianique.
Message modifié par son auteur il y a 12 ans.
Discussion : Quelqu'un vous aime ! Vous le découvrez : aimez-vous plus facilement ?

bouquetfleuri
le jeudi 13 février 2014 à 13h21
Quelqu'un vous aime ! Vous le découvrez : aimez-vous plus facilement ?
Je suis nuancé à propos de cette question. Ce découpage me paraît ubuesque. Si je l'admettais ainsi, cela pourrait signifier que l'on peut aimer sans être aimé, ce que je ne crois pas du tout, l'amour n'étant pour moi qu'une juxtaposition volontaire de deux incidences, de deux fragments de vie, de deux inconscients, de deux intérêts ou de bien autre chose, mais qui fasse exister deux êtres en dehors de leurs représentations.
Donc si quelqu'un m'aime, c'est que je connais ce quelqu'un, que je peux lui parler, que je communique avec lui et je ne peux donc pas découvrir qu'il m'aime, mais accompagner l'émergence d'un sentiment qu'il exprimera jusque dans les mots les plus banaux, sauf si je ne l'entends pas auquel cas son "amour" ne subsistera pas longtemps.
Enfin, et pour les mêmes raisons, rien ne peut être plus ou moins facile, tout s'opère au rythme qui se doit. Et ce n'est pas parce que l'on risque d'explorer des pratiques réservées à ceux qui se disent tout (hahaha) que ce sera plus facile à faire.
Discussion : Pourquoi diable, faut-il tout avouer ? (Edit : en particulier une nouvelle relation)

bouquetfleuri
le jeudi 13 février 2014 à 10h31
PolyEric
Elle a l'air intouchable, (cette définition)
Peut-être que la définition d'un objet qui est un concept réducteur dans son sens de la vie des gens ne peut pas être une définition de cet objet.
La définition du poly-amour est faite par les milliers de mots, les milliers de gestes et les milliers de pensées et de sentiments que vivent, conçoivent, perçoivent et reçoivent des milliers d'individus qui cherchent à devenir eux-mêmes, en compagnie ou pas d'autres personnes qui elles-mêmes cherchent à être et non à paraître.
Si une définition existait, fiable, entière, elle serait le produit d'un langage construit pour permettre aux gens de paraître, d'exister dans leur apparence aux autres. Le cheminement inverse, en gros
Je crois que c'est ce qui explique que l'on peut très bien parler du poly-amour sans être d'accord in extenso sur une définition, tout simplement parce que parler du poly-amour, c'est seulement parler de soi, partiellement ou totalement, sans que l'on connaisse les ressorts qui se détendent chez les autres
Message modifié par son auteur il y a 12 ans.