La jalousie, je la connais sans la connaître. Donc je suis très mal placé pour parler du fait d'en souffrir, même si j'en ai souffert indirectement.
Cependant, quand je lis tes propos, je constate de la peur de ne pas en sortir, de continuer à en souffrir et, c'est de là, je pense que vient ce que tu appelles ton inaptitude à l'empathie. La peur et la souffrance diminuent l'empathie de n'importe quelle personne. (Mon exemple favori, c'est celui de l'absurdité de demander à une personne qui a une fracture ouverte de faire preuve d'empathie. Dans le cas de la souffrance physique, c'est souvent évident, mais dans le cas de la souffrance psychique, c'est plus souvent culpabilisant pour la personne en souffrance.) Bref, s'il y a culpabilité de te sentir "inapte" à l'empathie, cette culpabilité t'empêche probablement de sortir du cercle de la jalousie.
Pourquoi n'y a-t-il pas à culpabiliser d'éprouver de la jalousie ? (Mon point de vue est, ici, celui d'une personne qui a plus souffert indirectement de la jalousie.)
(1) Aucune personne ne choisit ce qu'elle éprouve. Éprouver de la jalousie n'est pas un choix, il n'y a que la manière de vivre avec la jalousie qui peut résulter d'un choix et donc, impliquer une responsabilité personnelle.
Quant à la culpabilité, il n'y en a que lorsque il y a des actes en infraction au sens de la loi, soit qui portent atteinte au bien être d'une personne. (Par exemple, atteinte à la vie privée, comme espionner.) Il faut, ici, distinguer la culpabilité psychologique de la culpabilité juridique, soit la peur de faire du tort et faire du tort. Souffrir peut conduire à oublier la peur de faire du tort, d'où la nécessité de faire attention aux actes dont la jalousie peut-être le motif, soit se montrer vigilant sur ce qu'il est possible de croire que la jalousie pousse à faire. La plupart des personnes qui souffrent de la jalousie y résiste et, tout ce que je peux leur souhaiter, c'est d'en prendre conscience car la jalousie met souvent à mal l'estime de soi et, pourtant, y résister est estimable.
Ilis, lorsque tu écris souffrir de la jalousie, tu souffres probablement autant d'en souffrir que d'en faire souffrir. Souffrir de faire souffrir, c'est de l'empathie. (Pas de l'empathie pour le bonheur d'une personne avec une autre personne que toi, certes, mais cela reste de l'empathie. Ne t'arrêter que là où tu te sens incapable d'empathie ne peut que nuire à ton estime personnelle et en prendre conscience là où tu en es capable, bénéfique.)
(2) Exister, c'est s'éprouver, ce qui signifie jouir autant que souffrir. Or souffrir peut occasionner le sentiment d'avoir commis une faute, soit un sentiment de culpabilité psychologique alors que la souffrance est avant tout le fait de l'existence. Ajouter la souffrance de cette dernière à la première ne peut, ici, que refermer le cercle de la jalousie et le rendre plus étouffant.
La culpabilité psychologique d'avoir commis une faute à l'origine de sa souffrance est destructrice pour la confiance et l'estime de soi. Cette peur peut être aussi la peur de faire souffrir et de se faire souffrir et, passée l'intensité qui intime une juste prudence, elles sont destructrices lorsqu'elles conduisent à prendre peur de soi. Et lorsque la confiance en soi et l'estime de soi sont ainsi mises à mal, c'est alors qu'il semble impossible de s'en sortir. À la souffrance de la jalousie et de la culpabilité, il faut ainsi ajouter celle de la peur. La peur fait partie de chaque personne et elle peut faire souffrir : vivre dans la peur fait souffrir, notamment d'un sentiment d'insécurité. Reste que, apprivoisée, la peur peut également procurer un sentiment de sécurité lorsque elle devient une aptitude à la prudence pour soi et pour l'autre. Avoir peur de (se) faire mal peut signifier la prudence.
Sinon, s'il est possible d'éprouver la culpabilité psychologique d'avoir commis une faut à l'origine de sa souffrance, cela vient du fait que le plus souvent, la souffrance réclame un coupable alors que le seul fait d'exister et, par là-même de s'éprouver, suffit à pouvoir souffrir. C'est là que la culpabilité psychologique d'avoir commis une faute à l'origine de sa souffrance peut apparaître absurde. Cet amalgame peut également perdre de son sens dès lors qu'il opère moins facilement avec la souffrance physique car la souffrance physique intègre plus facilement l'accident comme cause de souffrance. Il est cependant plus difficile de concevoir les accidents de la vie qui peuvent conduire à une souffrance psychique que pour la souffrance physique, c'est pourquoi l'amalgame - une souffrance, un coupable - opère plus facilement pour la souffrance psychique.
Le simple fait de croire être la personne coupable de sa propre souffrance peut être l'un de ces accidents.
Il est juste de se sentir responsable de sa souffrance, mais cette responsabilité ne signifie pas de la culpabilité, mais la nécessité de répondre aux questions que posent cette souffrance. Chaque personne apprend plus de ses souffrances que de ses joies parce que, au contraire de la joie, la souffrance rend l'apprentissage nécessaire.
Confondre responsabilité et culpabilité peut être un autre accident.
Je n'ai, ici, donné que des accidents purement psychologique, mais quiproquos, malentendus et évènements peuvent constituer parmi d'autres, d'autres facteurs d'accidents de la vie.
Ilis, visiblement, tu rejettes la faute de ta souffrance sur l'amour, ce qui signifie que tu ne cherches pas de coupables, que tu ne veux culpabiliser personne de ta souffrance. Si c'est le cas, te le reconnaître ne peux qu'être bénéfique pour ton estime personnelle.
Par ailleurs, trouver la juste distance avec ta peur de souffrir, de faire souffrir et de te faire souffrir en amour peut t'aider autant à retrouver confiance en toi qu'à te sentir en sécurité, capable de te protéger et de protéger.
Pour rappel, je n'ai que peu d'expérience directe de la jalousie. J'ajouterai simplement que ce que j'écris vient simplement d'un questionnement personnel où, dans une relation, lorsque l'autre personne venait à souffrir de la jalousie, je ne voulais pas qu'elle souffre en plus d'en culpabiliser.
Message modifié par son auteur il y a 9 ans.