Construire la non-exclusivité en dehors du couple
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crest
le dimanche 01 décembre 2024 à 12h06
Coucou,
J’essaie de trouver des stratégies pour être moins fusionnel dans mon couple avec ma compagne, qui a une relation avec une autre personne depuis quelques temps, cette situation étant amenée à durer.
De mon côté je ne suis pas super emballé par l’idée d’avoir une autre relation de mon côté. Notre couple était ouvert dans son principe depuis le départ mais monogame de fait, très fusionnel et très fluide jusqu’à ce que cette ouverture se concrétise, avec peu de consentement de mon côté (j’euphemise parce que je n’ai pas trop envie d’appuyer là-dessus dans mon propos pour l’instant).
Je lis ce forum et en particulier ´artichaut’ pour trouver de nouvelles façon de voir. Et de me sortir d’impasses qui je pense ont un lien avec les mots qu’on utilise pour décrire une situation.
Par exemple je coche pas mal de cases de la personne ´mono’ et ´polyacceptant’. Et s’ensuivent des réflexes comme par exemple l’idée qu’avoir une autre relation de mon côté serait une façon de retrouver l’équilibre intérieur perdu.
En partant du principe que ma partenaire qui a deux relations et mes metamours qui en ont deux aussi ne sont pas en polyamour mais en polymonogamie, je me dis que je pourrais construire du polyamour d’une autre manière qu’en investissant des relations amoureuses, sachant que dans mon couple la complicité est très forte avec beaucoup d’activités communes, répondant à mon idéal du couple de « créateurs » (en l’occurrence dans le champ social/politique).
Je me dis aussi que ce changement dans mon intimité, soit je le ressens négativement comme une nostalgie douloureuse où tout était plus simple, soit je le vois comme un nouvel espace dégagé pour construire une autre manière d’être au monde, plus hardie envers les autres, moins recroquevillée sur le couple, que je pense on peut investir très fortement, non pas par conformisme social (et c’est là où je suis moins d’accord avec artichaut) mais parce c’est pour moi un espace de liberté et de sécurité incroyable dans une société en crise.
Cependant c’est un autre genre d’espace que je visualise comme alternative au couple. Le polyamour n’est pas forcément le nom de cet espace mais dans mon cas c’est peut-être une sorte de première mesure révolutionnaire, dans la mesure où la nouvelle relation de ma compagne peut être une force de changement comportant une part destructrice et créatrice.
Une autre raison qui pourrait donner du sens à une abstinence polyamoureuse dans mon cas (ne pas avoir d’autre relation alors que la voie est libre) c’est que je cumule pas mal de privilèges. Et que dans un sens la configuration où je reste avec une seule relation est une façon de rééquilibrer les liens existant et voir quelle dynamique ça peut créer.
Message modifié par son auteur il y a 9 mois.
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Hestia
le dimanche 01 décembre 2024 à 13h57
Je viens réfléchir avec toi !
En relation polyamoureuse depuis 1,5 ans, pas d'habitat partagé. Mon amoureux a envie d'avoir d'autres relations (et en a). Moi... Pas du tout ! Enfin j'ai eu une relation en parallèle pendant 1 an, et je n'ai pas envie de renouveler l'expérience pour le moment.
Ce que j'ai trouvé pour le moment c'est développer d'autres activités/relation non amoureuses que je peux partager, ou non, avec lui.
Actuellement en activité je pratique pas mal l'escalade (avec développement d'amitiés fortes centrées sur ce thème), activité qu'on partage aussi ensemble.
Et je joue de la musique "pour moi".
J'essaye de soigner des relations amicales importantes pour moi et de favoriser les activités "entre parents" ou juste avec mes enfants quand on ne se voit pas (il n'a pas d'enfants, moi si).
Et je vis (depuis des années, mais là aussi je le considère différemment depuis mes réflexions sur le polyamour) avec 1 chat, 2 chiens et un poney avec qui je ne partage pas les mêmes interactions quand je suis seule que quand je suis avec mon amoureux (typiquement je dors avec mes chiens et mon chat quand je suis seule, pas quand on est deux).
Je ne sais pas si ça répond un peu a tes interrogations ou si j'ai juste déballé ma vie 😅
Et toi, est ce que tu arrives a identifier ce que tu aimerais développer en "temps à toi" ?
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artichaut
le dimanche 01 décembre 2024 à 15h10
Hestia
Et toi, est ce que tu arrives a identifier ce que tu aimerais développer en "temps à toi" ?
Je me pose exactement la même question.
Parce que ça a l'air archi super ce que tu as envie de vivre @crest !
Et que sans doute ce forum à besoin d'un peu plus d'exemples concrets en la matière.
Ce que j'entends @crest c'est que tu n'as pas envie d'avoir une autre relation 'monogame' (sous entendu amoureuse et sexuelle) qui viendrait s'ajouter à celle que tu as déjà et qui te convient ("espace de liberté et de sécurité incroyable dans une société en crise"), mais que tu voudrais être moins fusionnel dans ton couple, quitter les mots-impasses, chercher de nouvelles façon de voir, et opérer des changements dans ton intimité pour construire une autre manière d’être au monde, plus hardie envers les autres. Archi super programme.
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artichaut
le dimanche 01 décembre 2024 à 15h44
Pour ma part, en laissant le 'polyamour' là où il est et à ceux/celles qui veulent l'utiliser, j'aurais envie de dire qu'une des premières choses possible serait d'intensifier les amitiés, à commencer par celles que tu as déjà. Prendre des rendez-vous avec ces personnes, et mettre des mots forts sur tes ressentis/émotions vis à vis de ces relations, de les partager à ces personnes, et de proposer (sans imposer) de faire de la place pour donner plus d'espace à ces relations (si telle est ton envie, bien sûr). Vous donner des rendez-vous régulier, pour partager ce qui vous fait kiffer.
J'ai par exemple dans ma vie, eu une relation à un moment, avec qui on se voyait une fois par semaine pour discuter et cuisiner ensemble.
Identifier tes kiffs quelqu'ils soient, et rencontrer des personnes possédant les mêmes, pour partager de la complicité, ne peut qu'être réjouissant et nourissant.
Un autre possible est de mettre beaucoup plus de tendresse dans tes relations. La tendresse peut s'exprimer par des cadeaux, des mots doux, et bien sûr du tactile (câlins à gogo, gestes affectifs et co-dodos) et ça permet, en toute simplicité, de quitter les dynamiques purement 'hétéro'. C'est pas toujours facile, et ça peut créer de l'ambiguïté. À toi de savoir doser, pour proposer sans imposer, etc.
Il y a, si besoin, dans certaines villes des ateliers, stages & co travaillant ces questions.
Rencontrer certaines communautés (LGBT notamment) plus ouvertes à ça, peut aussi faciliter les choses.
Un autre possible, pour rester dans le domaine du corps, est d'explorer le champ du Kinky-BDSM, par exemple en te rendant à un Munch. Le champ du naturisme ou de la co-nudité, les massages en tout genre (pour qui aime ça). Ou toutes les formes de danses (du tango à la danse libre, en passant par la danse contact, ou la biodanza…).
Une autre manière de partager profondément de l'intime, peut consister à participer à des cercles de paroles (mixtes ou par genre), voire d'en organiser soi-même.
Quand on commence à explorer le monde des possibles, la modalité 'sexualité-amoureuse' peut vite perdre de sa superbe et paraître bien fade et étriquée, surtout eu égard aux monceaux de problèmes que ça draîne quasi systématiquement. Sans parler des risques de réactivation de traumas & co, et la gestion des conflits associés. Franchement développer de nouvelles relations 'monogames', la flemme !
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Aki
le lundi 02 décembre 2024 à 17h23
Salut @crest.
Si ça peut t'aider, je te donne mon vécu et mes conclusions :
J'ai été pendant des années dans des relations de couple exclusif (hétéro) qui m'ont littéralement enfermées, pour lesquelles je me suis coupé avec le temps de mes amitiés, de mes passions, de ma famille, etc. Les ruptures (souvent accompagnées d'infidélité sexuelle de la part de mes partenaires) ont été dévastatrices (et certaines ont failli être fatales).
Aujourd'hui, le polyamour m'oblige à ne pas tomber dans ce travers de la monogamie (= "tous les deux, pour toujours, quoi qu'il arrive") et l'anarchie relationnelle me permet de vivre et valoriser d'autres formes de relation, notamment de fortes amitiés avec des femmes et une proximité physique avec mes amis.
Bref, les RAS ont moins une place centrale dans ma vie qu'avant, même si elles restent (très/trop) importantes.
Nourrir d'autres formes de relation, quelles que soit les conditions/pratiques/échanges, me semble essentiel pour être en bonne santé relationnelle (et acquérir une certaine résilience émotionnelle).
C'est comme favoriser la biodiversité dans un écosystème, ça le rend plus vivant et donc plus à même de surmonter des crises.
Sortir d'une vision hétéro et mono-normée de l'Amour, développer d'autres formes d'amour évite de mettre toutes ses attentes, espoirs, projets, rêves dans le même "coffre-fort" (ce qui par définition est risqué, lourd et coûteux).
Et surtout, il est important de développer la relation la plus important : celle à soi-même. Prendre soin de soi, faire des choses qui nous épanouissent, trouver des activités seul, faire des relations un plaisir parmi tant d'autres.
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crest
le mardi 03 décembre 2024 à 21h50
Merci pour vos réponses, en particulier celles d'artichaut qui me fait voir les choses autrement. Il y a déjà de bonnes bases pour un nouvel article ^^
La belle liste donnée pour redéployer les relations hors du couple est super intéressante, pour l’indécrottable amoureux que je suis. Dans cette liste, c'est le cercle de parole que je pratique et je peux témoigner que ça m'a fait du bien dans les périodes de panique sentimentale, puisqu'il y est directement d'intimité avec des personnes avec qui on ne partage pas une intimité amoureuse. Et qui peuvent ensuite devenir des ami.es.
Message modifié par son auteur il y a 9 mois.
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crest
le dimanche 05 janvier 2025 à 13h34
Pour l'instant le fait que ma compagne ait une nouvelle relation après plusieurs années d'exclusivité a plutôt tendance à réactiver chez moi un surinvestissement émotionnel dans la relation (on parlait ensemble que je "redevenais amoureux"), pas tellement propice au programme que je me suis donné ici. Pourquoi ce surinvestissement ? Parce que j'ai encore cette pensée nostalgique -qui ne m'aide pas trop- que le surgissement de cette nouvelle relation provient du fait que j'aurais délaissé la relation avec ma compagne pendant un temps assez long.
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artichaut
le dimanche 05 janvier 2025 à 18h28
crest
Pourquoi ce surinvestissement ? Parce que j'ai encore cette pensée nostalgique -qui ne m'aide pas trop- que le surgissement de cette nouvelle relation provient du fait que j'aurais délaissé la relation avec ma compagne pendant un temps assez long.
Réinvestir l'affectif et le relationnel après l'avoir délaissé, est potentiellement une bonne chose. Et qui peut faire du bien à tout le monde.
N'y a t-il pas de l'auto-jugement dans cette notion de surinvestissement ?
Après investir l'affectif et le relationnel seulement sur le plan amoureux/couple, c'est sans doute celà qui serait dommage.
Mais on n'efface pas des années de monogamie d'un coup de baguette magique.