1. Qu’est ce que alt.polyamory ?
Alt.polyamory est un groupe de discussion sur Usenet de personnes désirant discuter de polyamour et de sujets liés. Il a été fondé par Jennifer Wesp le 29 Mai 1992.
2. Qu'est ce que le polyamour ?
Être polyamoureux c'est « aimer plus d’une personne ».
Cet amour peut être sexuel, émotionnel, spirituel, ou n’importe quelle combinaison des trois, selon les envies et les accords des individus impliqués, mais il est inutile d’essayer d’y inclure un goût pour la tarte aux pommes ou la piété filiale, ou la passion pour un club de foot.
Le terme polyamoureux est aussi utilisé comme terme descriptif par des personnes ouvertes à plus d’une relation même si elle ne sont actuellement impliquées que dans une seule. Certaines personnes pensent que cette définition est un peu floue, mais elle se doit d’être assez large pour inclure la grande variété d’arrangements polyamoureux existants.
3. Mais n’est-ce pas « tromper » ?
Non.
Oh, vous vouliez une réponse plus longue. OK. D’après le dictionnaire, tromper signifie « fraude, tromperie, arnaque ». Il y a une jolie citation de 1532 : « Le premier critère de tromperie est de sembler être sans être réellement ». En d’autres termes, tromper signifie faire croire par des actions délibérées que l’on est d’une nature particulière alors que l’on est, en fait, quelque chose d’autre. Cela revient à dire concernant le polyamour que les polyamoureux ne disent pas à leurs partenaires, amants, ou amants potentiels qu'ils sont monogames alors qu'ils ne le sont pas, pas plus qu'ils ne leur laissent penser qu'ils le sont, même si cela peut être plus confortable ou avantageux de le laisser croire. Les mots honnête, négocier, communication et être ouvert reviennent souvent dans les discussions parlant de la manière dont le polyamour fonctionne.
Ainsi que le dit Stef :
« Je crois que la clé pour définir le polyamour est l’ouverture, c’est à dire : avoir des relations multiples avec la connaissance et l’accord de ton/tes partenaire(s) plutôt que par la tromperie. (Avec quel degré d’ouverture, combien de détails partagés, varie bien sûr grandement). Un grand nombre de personnes ont des liaisons en secret alors qu'ils sont censément dans une relation monogame. Je pense que de telles personnes ont le potentiel pour être polyamoureux mais je ne pense pas qu'ils pratiquent le polyamour. Une autre clé de définition du polyamour, à mon avis, est que cela ne nécessite pas une implication sexuelle (bien que cela soit cependant souvent le cas). »
De manière générale, si quelqu'un vit ouvertement plus d’un amour, et se dit polyamoureux, il l’est probablement ; si il/elle vit plus d’un amour et se dit monogame, ne croyez-pas qu'il s'agisse de polyamour.
4. Primaires, secondaires, vés et triades : polyjargon et polygéométrie
Puisqu'il y a de nombreuses manières d’organiser des relations (ou de ne pas les organiser, si on est béni par la déesse du Chaos, ou si on a un goût particulier pour l’anarchie joyeuse, ou si on est un égalitarien de principe), il y a également de nombreuses manières de décrire ces arrangements divers. Ce polyjargon a évolué dans les newsgroups avec le temps, et ces mots ne sont que descriptifs. Aucune approbation ou désapprobation concernant une type particulier d’arrangement ne doit y être vu ou impliqué.
Primaire – Mot souvent utilisé dans une relation hiérarchique multi-personnelle pour designer la personne avec laquelle on est le plus fortement liée. Dans certains cas, ce lien ou cette implication prend la forme d’un mariage légal. Puisque la bigamie n’est pas légale, l’option d’épouser deux (ou plus) primaires légalement et simultanément n’est pas envisageable, bien que des cérémonies non-officielles puissent être envisagées. Dans certains cas, primaire désigne l’amant le plus ancien.
Secondaire – découle de primaire, dans une relation hiérarchique, et désigne une personne avec laquelle on est impliqué sans les complexités ou investissements émotionnels, légaux ou économiques d’un lien primaire.
Oui, certaines personnes parlent de tertiaires, etc. Certains également n’aiment pas les termes et les concepts de primaires et secondaires, préférant avoir un « cercle d’égaux » ainsi que l’appelle une polyamoureuse. Stef a proposé le terme « Polyamour non-hiérarchique » pour ce type d’arrangements.
Triades – trois personnes impliquées d’une manière ou d’une autre. Souvent utilisé dans un sens d’implication forte, dans certains cas comprenant une cérémonie d’engagement, mais aussi utilisé simplement pour désigner trois personnes liées.
Vé (“V”) – Trois personnes, dont la structure place une d’entre elles en bas, à l’articulation du V, aussi appelé le point de pivot. Dans un V, les partenaires des bras ne sont en général pas aussi proches l’un de l’autre qu'ils ne le sont du pivot.
Triangle (ou triangle équilatéral) – relations ou trois personnes sont chacune impliquées avec chacun des deux autres. Parfois aussi appelé Triade.
Mariage en série (ou mariage en ligne) – terme tiré des œuvres de Robert A Heinlein, auteur de science-fiction, signifiant un mariage qui de temps à autre incorpore des membres plus jeunes, arrivant finalement à une population en équilibre (les mariés mourant au même rythme que les nouveaux sont ajoutés). Ceci est une forme d’immortalité familiale différente de la forme traditionnelle concernant des générations d’enfants successives. (Définition de M. Schafer, et, oui, il y a des gens qui sont dans de telles situations et utilisent ce terme pour décrire leur famille).
Polyfidélité – Relation impliquant plus de deux personnes ayant pris un engagement de conservation de l’activité sexuelle au sein du groupe, à l’exclusion de partenaires extérieurs.
Quads, pentacles, sextets et plus – Il y a des polyamoureux dans de multiples configurations à plus de trois membres. La géométrie en devient compliquée, et les nomenclatures créatives ne manquent pas. Comme pour tout autre aspect du polyamour, les limites précises de l’intimité varient de groupe en groupe et de membre à membre à l’intérieur d’un groupe.
5. Et la jalousie ?
Certaines personnes semblent dépourvues de jalousie, comme si cette pièce n’avait pas été installée en usine. D’autres, y compris des polyamoureux de longue date, ressentent de la jalousie, qu'ils interprètent comme un signal (« il est temps de se poser des questions et de faire attention »), comme ils le feraient pour la douleur ou la dépression.
La jalousie n’est ni une preuve d’amour (et c’est là que le polyamour diffère de la monogamie possessive ou insécure) ni un échec moral (et c’est là que le polyamour est différent de la manipulation de partenaires afin de les impliquer dans des relations pour lesquelles ils ne sont pas prêts).
6. Y a-t-il des règles pour être polyamoureux ?
Personne n’a de marque déposée sur le polyamour et la manière de le vivre. Le mieux que qui que ce soit puisse faire est de décrire comment cela fonctionne pour lui ou elle, et, comme pour tant d’autres choses, les opinions et les expériences peuvent grandement varier.
Certains ont des règles pratiques.
Joe et Kat :
« Tes besoins passent en premier
Nous parlerons de tout. »
Elise :
« Depuis une certaine “expérience formatrice”, je suis décidée à ne jamais laisser ma relation avec une nouvelle personne devenir un outil servant à éviter de penser aux problèmes d’une autre relation. De fait, un des éléments auquel je suis la plus attentive est le « trop-plein/débordement émotionnel ». J’ai pour principe de ne pas passer de moments intenses avec d’autres amours quand il y a quelque chose de déséquilibré avec un amour. Bien sur, cela tend à accélérer l’ouverture des négociations concernant les difficultés en question ;-)
« Je pense qu'il est injuste pour mes amours d’utiliser le temps que je passe avec eux comme palliatif au fait il y ait des problèmes ailleurs car cela m’empêche de faire le travail que j’ai besoin de faire, que j’ai accepté de faire quand je me suis engagée dans la réalité de cette relation. »
Si vous voulez des règles pratiques, il faut les créer vous-même. Rien ne vous est garanti à l'avance et c'est à vous de continuer à faire vivre vos relations en permanence.
7. Comment décider qui dort où et quand ?
C’est la question la plus posée lors de présentations du polyamour. (Ce qui, d'ailleurs, étonne souvent les polyamoureux : pourquoi l’aspect sexuel semble-t-il plus important que la dimension émotionnelle ou les autres questions intimes d’une vie polyamoureuse ?)
La réponse est que les gens impliqués décident, et qu'ils décident également de la manière dont ils décident. Certaines personnes se regroupent et divisent la semaine, certains s’empilent joyeusement dans le même lit, et, pour ce que j’en sais, certains tournent peut-être une grande roue de loterie pleine de lumières clignotantes chaque soir... et certains peuvent s’aimer, ne pas coucher ensemble, et choisir d’habiter dans des lieux séparés si ils trouvent cela plus confortable. Chacun trouve en général sa propre réponse après un certain nombre de discussions et des essais, et en faisant preuve d’empathie.
Comme le dit Jack :
« Il faut se rappeler que la sexualité n’est pas l’aspect le plus important d’une relation. La meilleure chose que je peux faire pour mes partenaires est de les accueillir à la porte avec des gâteaux et un sourire. »
8. Tous les polys sont-ils bisexuels ?
Non . De nombreux polyamoureux sont bisexuels, et de nombreux polyamoureux sont monosexuels (c’est à dire qu'ils ne considèrent qu'un seul genre comme partenaires sexuels ou romantiques réels ou potentiels). Il y a aussi de nombreuses personnes qui ne se donnent aucune étiquette d’orientation sexuelle. Il est difficile d’être sur avant d’avoir posé la question, comme pour tant d’autres choses. Le mieux est en général d'éviter les suppositions et les généralités.
9. Les relations polyamoureuses durent-elles ?
Certains durent, d’autres non, tout comme n’importe quel autre type de relation. Certaines personnes du newsgroup sont ensemble depuis des années ; certaines possèdent même des maisons et ont des enfants ensemble. Être polyamoureux n’est pas une garantie que les relations seront plus faciles, bien qu’il y ait des avantages à partager ses joies et ses peines.
10. Comment puis-je savoir si je suis polyamoureux ?
Je ne suis pas sûr ; toi seul peut le dire, et, selon la philosophie de certains, une personne n’est pas polyamoureuse, seul un comportement peut l’être. Certains trouvent cette approche utile, d’autres préfèrent penser qu'il y a des personnes polyamoureuses.
Certains poly ont tendance à se reconnaître dans des descriptions cadrées et hurlent « Oui ! Oui ! Je savais que je n’était pas seul ! Hourra ! »
Si vous n’êtes pas sur d’être poly, le mieux est sans doute d’agir avec gentillesse et responsabilité, et de communiquer aussi clairement que possible pendant que vous apprenez. D'ailleurs, c’est la meilleure manière de faire pour les poly également.
De plus, être polyamoureux n’est pas de manière inhérente mieux que d’être monogame, donc il n’est pas nécessaire de penser que vous devez prêter allégeance pour poser des questions.
Un autre élément à prendre en compte est que le mot polyamoureux n’est, comme toutes les étiquettes, qu'un outil. Ce que vous faites et la manière dont vous traitez les gens que vous aimez leur importe probablement plus, à long terme, que de savoir si vous correspondez à une description particulière, donc pas de raison de se focaliser là dessus, d'accord ?
Et prenez soin les uns des autres.
Un autre point de vue :
« Il n’existe pas de personnes polyamoureuses ou monogames; il n’y a que des relations polyamoureuses ou monogames. La même personne peut, selon les périodes de sa vie, être heureuse aussi bien dans une relation monogame que dans une relation polyamoureuse. Ce qui est bien dépend de vous et de vos sentiments, et des sentiments de ceux avec lesquels vous êtes impliqué.
Vous pouvez à certains moments être impliqué dans une relation monogame, qui correspond alors à ce dont les personnes impliquées ont besoin ; et à d’autres moments, vous pouvez être dans une relation qui fonctionne mieux au sein d’un réseau de relations polyamoureuses. Dans tous les cas, ce qui est important est probablement d’agir avec gentillesse et responsabilité, et de communiquer clairement avec vos partenaires intimes et potentiels à propos de ces questions.
Ne reniez pas vos sentiments ou les sentiments de ceux auxquels vous tenez. Explorez ce que vous et ceux que vous aimez ressentent réellement, plutôt que ce que la société veut que vous ressentiez, ou ce que vous pensez qu'il serait logique que vous ressentiez, ou ce qu'on vous a dit que des polyamoureux (ou des monogames) devraient ressentir.
Puis comportez vous d’une manière honnête, et qui rende heureux et satisfaits les gens que vous aimez, les gens qu'ils aiment et vous-même.Si le résultat est que vous avez plus d’une relation intime en même temps, ou que vous êtes engagé dans une relation avec plus d’une personne, ceux qui aiment les catégories et étiqueter les gens vous appelleront poly. »
11. Et pour ce qui est d’habiter ensemble, de s’engager, se marier et tout ce genre de choses ?
Bonne question.
Posez-là : il y a beaucoup beaucoup d’approches différentes parmi les gens du newsgroup. Depuis la cohabitation, à la vie en communauté, au mariage de groupe et à des solutions imprévues, il y a une multitude manières de faire. Concevez-en une nouvelle et voyez comment elle marche. Désapprenez vos a priori découlant d’anciens arrangements. Posez des questions et faites preuve d’empathie.
Plus que tout, le polyamour concerne la construction de nouvelles configurations de relations. Il ne s'agit pas de collectionner et d'échanger les partenaires comme des cartes pokémon.
Comme le dit amanda r. clark :
« Etre poly, c’est être ouverte à l’opportunité si elle se présente, ne pas refuser des engagements parce que quelque chose de mieux pourrait se présenter plus tard. »
12. Qu’en penseront les enfants ?
Comme le dit Martin Schafer :
« Si vous pensez que vous ne faites rien de mal et si vous êtes capable de l’expliquer honnêtement, ils penseront probablement que c’est une bonne solution. Pour certains d’entre nous, disposer de plus de personnes impliquées dans l’éducation d’un enfant est un gros bénéfice pratique en terme de mode de vie. Les détails du fonctionnement de tels arrangements sont un sujet de discussion fertile, aussi bien ici qu'entre les individus concernés. »
13. Comment commencer (ou continuer) une relation polyamoureuse ?
Premièrement, il n’y a pas de règles. Personne n’a le copyright du polyamour. Chacun construit sa relation à sa mesure et à celle de ses amours.
Un élément cependant qui ressort de toute conversation sur le polyamour est la communication. Si il existe un élément fondamental, c’est probablement celui-ci. Si vous êtes capable de parler de vos espoirs, vous êtes en bonne voie pour les réaliser.
Si vous êtes déjà impliqué dans une relation, et que vous n’avez jamais parlé de ce que vous ressentez et de ce que vous voulez, et que la question que vous posez est « Comment est-ce que je commence ce truc poly ? », il se peut que vous hésitiez à en parler à votre partenaire. Ce qu'il vous faudra faire dépend de votre éthique et de votre situation ; mais il y a des chances que, si vous demandez dans le cadre du newsgroup, beaucoup de poly vous suggèrent d’en parler avec votre partenaire. Il se peut qu'ils soulignent le fait que même si vous ne décidez pas de vivre polyamoureusement, vous pourriez bien augmenter le niveau d’intimité de votre dyade monogame en ayant cette discussion.
D’autre part, cela pourrait aussi tout faire capoter, et c’est pourquoi certains hésitent. On peut aussi ajouter : qui ne tente rien n’a rien. Enfin, il peut être utile d’augmenter le niveau d’intimité de votre relation et de traiter les problèmes visibles avant d’avoir cette discussion spécifique.
Joe Avins pense que ce n’est pas une bonne idée que d’essayer de faire entrer de force une relation dans une définition quelle qu'elle soit. Il préfère l’approche « détendez-vous, soyez ouverts et voyez ce qu’il se passe », et cite Pete Seeger : « Allez-y en douceur, mais allez-y. »
Si vous êtes déjà dans plus d’une relation et que vous ne l’avez pas révélé, vous trouverez des personnes dans le newsgroup ayant déjà expérimenté cela – dans toutes les configurations – et qui sont prêts à discuter de leurs opinions et de ce qu'ils ont choisi de faire.
14. Comment est-ce que j’explique ça aux gens ?
David Rostcheck dit :
« Ce n’est pas la peine de vous expliquer, ou de répondre à qui que ce soit. Vous êtes heureux. Vos sentiments n’ont pas besoin de justification. C’est un erreur d’essayer de réconcilier ce que vous ressentez avec une classification sociale, parce que la classification pourrait bien ne pas vous correspondre.
Commencez avec vos sentiments, à les comprendre et à les accepter. Vous, vos sentiments, et les personnes qui vous importent sont les choses importantes.
Vous prenez les choses à l'envers en essayant de vous expliquer. Vous n’avez pas à vous expliquer au monde. Vous existez simplement, et votre relation existe. Si d’autres personnes veulent la comprendre, alors vous essayez de leur expliquer avec des termes basiques : ce que vous ressentez, et le fait que vous êtes heureux.
Voilà comment je m’y prends face à des questions spécifiques :
— Vous sortez avec ma fille ou avec l’autre fille ?
— Je sors avec les deux.
— Alors vous la trompez ?
— Non, elles le savent toutes les deux, nous sommes tous amis et nous sommes heureux comme ça.
— Bien, mais laquelle vous aimez ?
— Je les aime toutes les deux.
— Laquelle aimez-vous le plus ?
— Je ne comprends pas la question. Elles sont différentes. Comment est-ce que vous mesurez ?
— Pourquoi ne vous engagez-vous pas avec une d’elle ?
— Pourquoi ne pourrais-je pas m’engager avec les deux ?Vous voyez, il n’est pas nécessaire de se contorsionner pour répondre selon leurs termes. Ils se pourrait que ce soit à eux d’apprendre vos termes pour vous comprendre. Souvenez-vous, vous avez trouvé quelque chose qui vient naturellement et qui vous rend heureux : le fait que les autres le comprennent est une question secondaire.
Tant que vous faites ce que vous désirez, vous serez heureux. »
15. Y a-t-il une poignée de main secrète de alt.poly ?
Pas que je sache ;-) Il y a eu plusieurs symboles de proposés, le plus commun semble être le perroquet. Comme les badges perroquet et autres décorations sont relativement faciles à trouver, ce symbole semble devoir l’emporter sur les autres. Il a aussi l’avantage d’être humoristique, ce qui est une qualité nécessaire dans un groupe aussi sérieux et conservateur que alt.poly :-)
Traduit de l'anglais de alt.polyamory Frequently Asked Questions (FAQ), publiée en 1997.