Une morale polyamoureuse?
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Popol (invité)
le jeudi 29 décembre 2011 à 06h35
Régulièrement, un certain malaise me saisit en lisant les fils.
Et si le polyamour, loin d'être un gage d'ouverture et une recherche de liberté, présentait le risque de n'être simplement qu'un nouvel ordre moral, comme un gros sac de voyage où on mettrait pêle-mêle... les mêmes choses que ce que beaucoup d'entre nous fuient dans la morale monoamour?
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Popol (invité)
le jeudi 29 décembre 2011 à 07h21
J'me réponds moi-même, mais c'est pas par hasard: j'avais à peine posé cette question qui me lancine (néologisme personnel) qu'Eric posait ailleurs une réflexion voisine d'une autre de mes préoccupations.
Alors je reporte ici...
Je me gratte souvent la tête, en me demandant ce qui change vraiment, entre un mono et un poly.
On revendique le droit à la différence, et ce serait logique qu’une fois on ait droit à l’indifférence, mais je sens, parfois, un tel besoin d’être différent-avant-tout, simplement ! que je me demande si le polyamour n’est pas ici et là un pansement sur des blessures de vie qui suintent : ça va pas tenir, ça colle mal.
Pour le reste, on fait des enfants, on cherche des moyens d’existence tout en tentant de préserver la créativité, on cherche de l’amour; en somme, on cherche notre place tout en revendiquant autre chose, mais on a autant que les autres besoin de trouver l’équilibre entre l’autonomie et le besoin d’appartenir à un groupe. Et en tenant parfois des discours très proches de la morale dominante, non-exempts de rigidités mentales concernant les vieilles factures entre hommes et femmes, les relations tarifées versus le romantisme, etc ; bref, est-on prêts à lâcher le sentiment d’être si particuliers, pour n’être que des particuliers parmi les autres ?
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(compte clôturé)
le jeudi 29 décembre 2011 à 08h35
Popol
Je me gratte souvent la tête, en me demandant ce qui change vraiment, entre un mono et un poly.
Ben... j'aurais tendance à répondre "normalement pas grand-chose" puisque nous sommes avant tout des êtres humains et que de ce fait nous avons tous à peu près les mêmes besoins et envies en matière de relations humaines (être aimés, rassurés, nous sentir importants pour l'autre, nous sentir particuliers, etc. bref tout ce qui touche à l'estime de soi / confiance en soi). Pour moi le fait d'être mono ou poly ne change pas ces besoins fondamentaux.
Popol
On revendique le droit à la différence, et ce serait logique qu’une fois on ait droit à l’indifférence, mais je sens, parfois, un tel besoin d’être différent-avant-tout, simplement ! que je me demande si le polyamour n’est pas ici et là un pansement sur des blessures de vie qui suintent : ça va pas tenir, ça colle mal.
Quant au droit à la différence et à l'indifférence, ça me fait penser à ce que j'ai pu parfois lire dans des commentaires sur Rue89 par exemple, sur le thème "mais pourquoi vous la ramenez, contentez vous de vivre dans votre coin et ne nous prenez pas la tête [à nous les mono] avec votre mode de vie". En théorie je suis d'accord sauf qu'en pratique je crois que le droit à l'indifférence n'existe pas, cf. les réactions de rejet parfois fortes que le mode de vie poly suscite auprès des personnes qui ne le connaissent pas.
Pour illustrer par un exemple personnel, j'estime avoir la chance énorme d'être entourée de parents et amis qui ont tous réagi avec bienveillance lorsque je leur ai parlé de mon mode de vie. Leurs réactions ont toujours été à peu près les mêmes : "pourquoi pas, si tu es heureuse comme ça c'est très bien mais moi je ne pourrais pas vivre de cette manière". Ce qui me fait penser qu'en leur parlant de ma vie (= en leur mettant sous le nez quelque chose qu'ils n'auraient pas forcément eu envie de voir) je leur montre qu'une chose qui leur semblait complètement impossible est possible et que ça peut fonctionner en rendant les gens heureux. Si je n'avais rien dit (=droit à l'indifférence), je pense que j'aurais raté en outre une opportunité de discussions enrichissantes avec eux. Conclusion : je pense que j'ai bien fait d'en parler et que si je n'avais rien dit et les avais laissés découvrir le truc par eux-mêmes cela aurait pu susciter de l'incompréhension de leur part.
Message modifié par son auteur il y a 11 ans.
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wotan
le jeudi 29 décembre 2011 à 09h31
je me gratte la tête et me dit que j'ai un problème avec la morale. Elle implique la notion de bien et de mal. La morale judéochétienne, la morale anarchiste (suivez mon regard ;-) ), la morale libérale, écologiste. Je préfère penser Ethique ! Mais bon tout est possible.
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Popol (invité)
le jeudi 29 décembre 2011 à 11h41
Je parle bien du droit à l’indifférence ALORS que l’on a mis au courant les gens autour, ce n’est pas la même chose que de se la coincer. Ni que de provoquer gratuitement - sans esprit d’ouverture ni souhait de discussions enrichissantes aucun finalement - des situations de rejet qui mettent la personne en puissance de se poser en victime.
La morale est pour moi ce qui permet à un groupe une cohésion relative parce que les mœurs en vigueur prônent certaines valeurs, en tolèrent d’autres… ce qui par essence est en changement constant – pas par miracle, mais par volonté d’ouverture, justement : en amenant sur le tapis certaines questions avec délicatesse, pour ne pas mettre les récipiendaires de notre coming-out en panique morale. Donc en utilisant la patience et en faisant preuve soi-même de ce qu’on voudrait obtenir d’eux.
L’éthique est pour moi l’essence de ce que chaque personne pratique pour ne pas être trop tiraillé entre ses propres valeurs et celle de la communauté où il vit. C’est un travail quotidien pour ne pas se mettre en position haute, et pour garder une parité de communication et de coexistence de manières de vivre parfois si opposées que la guerre pourrait se déclarer.
La morale est communautaire et quelque part, un oreiller de paresse; alors que l'éthique est individuelle, et beaucoup plus exigeante en matière d'honnêteté intellectuelle, au premier chef parce qu'après, pour l'appliquer concrètement, c'est encore autre chose!)
Une morale en soi n'est qu'une sorte de charte, aucune n'est condamnable dans l'absolu, sauf du moment qu'elle se pose en vérité vraie. Et là, que ça regarde des valeurs que je cultive moi-même ou des valeurs qui me donnent de l'urticaire quand elles me sont imposées, je me gratte beaucoup, beaucoup, beaucoup.
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Dakhla
le lundi 02 janvier 2012 à 21h22
Bonsoir Popol et Wotan,
Pour répondre à vos problèmes, je pense qu'il faut prendre un antihistaminique et peut-être un peu de cortisone si vos démangeaisons se poursuivent.
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Dakhla
le lundi 02 janvier 2012 à 21h54
Si Popol, j'ai autre chose.
Tu dis mono ou Poly on recherche toujours la même chose être aimés, être rassurés, nous sentir important pour l'autre,l'estime de soi...Nous avons tous les mêmes envies et les mêmes besoins...
Je suis d'accord mais Je me permets d'apporter une précision qui a son importance sur notre différence d'avec les monos et la morale.
Je suis mariée et amoureuse, et, je suis heureuse quand mon mari lui aussi se sent rassuré par une autre femme, se sent important aussi de son côté. Donc, je ne suis pas sûr que nous ayons vraiment les mêmes envies et les mêmes besoins. Nous en revenons à la non exclusivité encore une fois. On fuit la morale mono, on en retrouve une autre (le bien et le mal, cela reste important) mais assez différente tout de même.
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Popol (invité)
le lundi 02 janvier 2012 à 22h01
Bof... peut-être que vous deux arrivez à vous démarquer, mais pas tous les polyamoureux que je lis ici. Il y a autant de polyamours que de polyamoureux dans leurs relations multiples, et les moralistes ont aussi leur place au panthéon.
Je me réfère pour cela à la discussion initiée par un libertin, au sujet de l'ouverture d'un site de rencontres, où parmi les diverses idées revient quand même souvent l'idée d'exclure les personnes en recherche de sexe... cherchez l'erreur...
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Popol (invité)
le lundi 02 janvier 2012 à 22h15
Alors va lire le fil suivant:
/discussion/-vf-/Creation-d-un-site-de-rencontres-...
(quand même, ce serait plus facile avec une carte et une boussole, peut-être?)
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Dakhla
le lundi 02 janvier 2012 à 22h38
La morale serait-elle une recherche à tout prix...incohérente...paradoxale..
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Popol (invité)
le lundi 02 janvier 2012 à 22h59
Essplique? C'est moi qui capte pas , ce coup-là...
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PolyEric
le mardi 03 janvier 2012 à 02h07
Popol
....parmi les diverses idées revient quand même souvent l'idée d'exclure les personnes en recherche de sexe... cherchez l'erreur...
Je viens de découvrir cette phrase et j'en pense beaucoup de bien.
Etre pour l'amour (sexué et multiple) ne consiste pas à être contre le sexe ou alors je rend mon tablier.
De plus, si le polyamour apparaît comme un truc moraliste, c'est la fin du polyamour. Le seul truc qui pourrait être moraliste, c'est le devoir de dire les choses à son partenaire. Mais pour ma part, je considère ce devoir comme le plaisir no 1 du polyamour, à condition d'avoir un(e) partenaire vraiment polyamoureu(x)(se) bien sûr.
Donc finalement, de morale, il n'y a point. Il n'y a que la recherche d'un plaisir profond et entier qui ne se refuse rien. Certes, ce plaisir vient souvent avec quelques galères (malheureusement), mais quand on aime, on ne compte pas.
Message modifié par son auteur il y a 11 ans.
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Popol (invité)
le mardi 03 janvier 2012 à 08h06
Ben, disons, un polyamour qui ne tiendrait compte que des sentiments amoureux, pour moi ça coince.
Je remarque que, contrairement à ce que je pensais, le polyamour n'est pas toujours un catalyseur de libertés, mais reporte parfois simplement dans les relations multiples et franchement assumées les cadrages et les limites personnelles du monoamour de la personne qui vient de virer sa cuti.
Tout comme certains libertins contrôlent les relations de leur partenaire pour en exclure les sentiments, en fait. Tant que cela reste individuel ou en accord avec le(s) partenaires(s), c'est OK. Mais si ce n'est pas compris comme une valeur non-universelle, ça devient une morale qui ne dit pas son nom. Je dirais que la possibilité de virer une grosse lourde ou un gros lourd, c'est bien, mais que ça devrait rester une possibilité, et que le top du top pour moi, c'est de laisser copains et copines se faire leur propre opinion sur la "densité" des gens... et même, de leurs intentions du moment.
Le meilleur moyen d'éviter les gros lourds, c'est de les mettre en garde dès qu'ils jouent les enclumes, et de les refuser en carnet d'adresses s'ils remettent le couvert. Mais risquer de perdre un contact intéressant sur la foi d'une soirée où un polyamoureux se sent l'âme à la gaudriole, je trouverais dommage.